Troisième semaine

5.9K 366 89
                                    

Comme chaque jour depuis deux semaine, je rapporte un plateau-repas pour [t/p]. Aujourd'hui, un temps glacial s'était installé, remplaçant le calme de l'endroit par le bruit continu de l'averse qui s'abbat sur les vitres et même par celui du tonnerre.

Je rentre pour une fois de bonne humeur vu qu'Erwin ne m'a pas donné de papiers, mais la [c/c], d'habitude si joyeuse et active, était roulé en boule dans un coin, près d'une fenêtre, entrain de chanter ce qui me semblait être une berceuse pour se calmer.

-"[t...[t/p]?"

Elle se retourne légérement et me fixe, ma présence semble la rassurer grandement, mais dès qu'un nouvel éclair déchire le ciel, elle pousse un petit cri et replonge sa tête dans ses bras, envloppée d'une couverture épaisse.

-"o-on est...le 3...décembre..."murmure t-elle.

-"oui, et alors?"

-"ce même jour...il y'a quatre ans...ma-maman, papa, Fred...ils sont tous..."

Elle n'a pas besoin de terminer pour que je comprenne ce qu'elle veut me dire. Sa famille est morte quatre ans plutôt. Dans un élan de tendresse, je m'approche d'elle et la sert fort dans mes bras avant de la bercer doucement.

-"ce jour aussi...il y'avait du tonerre...il y'avait une tempête...c'était tellement fort...tout a cédé... Un arbre est tombé et a brulé."elle étouffe un sanglot, "la maison a aussi brulé...on était tous à l'intérieur..."

Ne pouvant plus contenir ses larmes, elle se met à pleurer des averses dans mes bras. Une question me brûle le lèvres: est-ce qu'elle est morte aussi ce jour là? Je n'ai pas le courage de le lui demander, et puis, honnêtement, c'est la conclusion la plus logique...

Je tente de la consoler mais je n'y arrive pas, alors, pour rester dans le cercle des confidences, je me déleste aussi du poids qui pesait sur mon coeur.

-"moi aussi, j'ai tout perdu... Le père que je n'ai jamais connu, la mère qui avait abondonné sa dignité pour survivre et m'offrir de quoi rester en vie, l'oncle qui m'a abondonné et le frère et la soeur qui se sont fait dévoré par un titan."

Je m'interromps dans mon récit et inspire une grande bouffée d'air. Ne pas y repenser, ne pas sombrer.

-"on était tout les trois des voleurs et des tueurs qui essayait de survivre dans les bas-fonds, un jour, un bourge nous a employé dans le but de dérober un document à Erwin et le tuer. Le plan était simple: se laisser prendre par le bataillon, passer inaperçus, accomplir la mission, et enfin, donner l'objet à notre employeur. Ils nous avaient promis trois pass pour la surface, l'occasion révée...on a attendu le moment adéquat pour nous faire remarquer par Erwin et tout s'est passé comme prévu. Je voulais assassiner le major durant la première expédition et je leur avait interdit de m'accompagner, c'était trop risqué... Mais ils ont insisté et j'ai cédé. Lors de la sortie, on s'est séparé, et c'est là que..."je ravalais mes larmes: je ne devais pas flancher, "je les avais laissé seuls. C'est à cause de moi s'ils sont morts. Si j'étais là pour les protèger, ou si je les avait laissé içi, en sécurité, entre les murs, ils ne seront jamais morts. C'est à cause de moi... Tout est de ma faute."

Je pleurais à chaudes larmes, je n'en pouvais plus... Je n'avais jamais fait part à quelqu'un de ce sentiment de culpabilité, de ces remords qui me rongeait à petit feu, mais même si j'étais prétendument l'homme le plus fort de l'humanité, je restais un humain comme les autres, et cette humain a fini par craquer.

-"non Levi... Ce n'est pas de ta faute..."dit-elle en essuyant une de mes larmes avec le dos de sa main, "tu ne pouvais pas savoir, tu n'y est pour rien. Au contraire, tu as essayé de les protèger, tu as voulu leurs permettre d'avoir une meilleure vie. Et qui sait, peut être que c'est ce qu'ils ont là-bas, là-haut."

Ces mots, je voulais juste que quelqu'un me les disent, que quelqu'un me dise que je n'y suis pour rien, que je ne pouvais pas savoir, des mots que personne n'a jamais prononcé, jusqu'à ce jour.

[t/p] se releva et me serra dans ses bras, elle me serra aussi fort qu'elle le pouvait, m'offrant du réconfort et en puisant aussi. Je m'accrochais à son haut et pleurais, encore et encore, tandis qu'elle déversait également sa peine dans un flux interminable de larmes.

Le ciel c'était éclairci et la tempête s'était calmée. Les derniers nuages se dissipèrent, laissant place à un magnifique ciel étoilé. Deux étoiles brillaient plus que les autres, elles avaient l'air si proches et si lointaines à la fois. Comme eux, comme leur souvenir, comme leur présence à mes côtès.

-"bon!"dit-elle ne essuyant ses dernières larmes, "j'ai une idée!"

-"j'ai le préssentiment que c'est de la merde..."

-"mais non! Je veux que, d'ici quelque semaines, je t'emmène faire un petit tour dans mon village natale! Dis oui dis oui dis oui dis oui dis oui dis oui dis oui dis oui dis oui dis oui dis oui dis oui dis oui dis oui dis oui dis oui dis oui!"

-"si tu veux..."

-"tu es malade c'est ça? Tu as certainement dû attraper un rhume après t'être longtemps assis près de la fenêtre."Elle posa sa main encore tremblotante sur mon front, "tu n'as pas de la fièvre pourtant..."

Je pris sa main et la tira vers moi pour ensuite la porter en sac à patate sur mon épaule.

-"c'est plutôt toi qui recommence à dire n'importe quoi."

Je voulais bien en savoir plus sur elle donc cette excursion n'allais pas être de refus, mais je ne voulais pas le lui dire. Je la reposai sur le lit et lui jeta la couverture dessus puis m'assis près d'elle, le temps qu'elle s'endorme, et, bercé par le rythme régulier de sa respiration, je m'endormis aussi.

~caporal Neko

Comme de la fumée [levixreader]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant