Constance
Fatima m'a invité le samedi soir à dîner. Avec Salim, ils vivent dans une vieille usine à soie entièrement retapée. Elle donne dans le creux d'une montagne, c'est une maison sublime, j'en tombe immédiatement amoureuse. Ils ont dû y passer dès années pour y arriver !
Ils ont deux petites filles adorables qui viennent m'accueillir à la porte et prendre mon manteau. Je remarque tout de suite sur la dernière, Aya, la cicatrice d'une fente palatine. Plus communément appelé "bec de lièvre" c'est une chirurgie minutieuse à mener sur des tout petits bouts de choux et qui se doit d'être le mieux réussie possible. Aya a de la chance, elle a eut un bon chirurgien, la cicatrice est belle. Plus tard elle devra encore subir d'autres opérations et une prise en charge d'orthodontie très lourde.
Fatima me prend le bras et m'entraîne dans la véranda en commentant les pièces pour m'expliquer toutes les rénovations qu'ils ont fait.
Je doute que la maison de Mamé ressemble à ça un jour ...
— Je suis contente que tu sois là ! Je me sentais seule au milieu de tout ces mecs.
Je me fige.
— Il y a qui d'autre ?
— Hervé, Gérard et Aimé.
Outch...
J'arrive dans la véranda au moment où elle me parle d'Aimé et je ne peux plus fuir. Il est là, vêtu d'un simple jeans bleu marine près du corps et d'un pull à col châle gris chiné, il me dévisage un instant et tourne la tête alors que Hervé et Gérard se lève pour me faire la bise.
Je m'approche d'Aimé pour lui dire bonjour et peut-être m'excuser discrètement au passage mais il se retourne et me fait un doigt d'honneur.— Vas voir ailleurs si j'y suis Constance.
— Je viens d'arriver laisse-moi au moins profiter un peu.
Il se lève et quitte la pièce.
— Woooo, chaud ! S'exclame Hervé en riant alors que Salim et Fatima sont plutôt gênés.
Gérard fronce les sourcils, interrogateur mais je grimace.
— Il se peut qu'Aimé m'en veuille pour une petite pique que je lui ai lancée.
Mon bailleur semble dubitatif.
— Tu as dû y aller franco pour qu'il réagisse ainsi, c'est plutôt quelqu'un d'avenant d'habitude.
— Je n'y suis pas allée de main morte mais à ma décharge, il n'a pas été extrêmement accueillant avec moi. Demande à Hervé !
J'ai l'air d'une gosse à essayer de me justifier ainsi. Et dire qu'avant je m'en foutait de ce qu'on pouvait bien penser de moi !
Hervé lève les bras au ciel et ajoute un petit "Hé" qui signifie clairement qu'il jouera les suisses dans cette histoire.
Fatima s'approche de moi et dit plus bas.
— Hervé m'avait pourtant dit que vous aviez l'air de bien vous entendre, je t'avoue que j'espérais un rapprochement.
Je la dévisage avant d'éclater de rire.
— Ah oui c'est mal parti en effet. Mais ne t'inquiète pas, je ne vais pas rester Fatima, je ne veux pas vous mettre mal à l'aise.
— Tu ne veux pas tenter de t'excuser d'abord ?
C'est marrant, avant personne n'osait me donner de conseil et maintenant tout le monde m'en prodigue, j'ai beau les connaître depuis moins d'un mois, ils font déjà avec plus de naturel ce que d'autre n'ont jamais su faire en quinze ans : se soucier de moi.
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Tout ça pour ça (terminée)
ChickLitElle : Il suffit d'une journée pour que tout bascule... ...Je suis tellement bien placée pour le savoir que j'aurais dû m'en douter qu'à moi aussi cela pouvait arriver. Et quand ça été mon tour, j'ai fais un truc fou ! Je suis rentrée chez moi...