Des murs qui tombent

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Constance

Ça me fait mal de reconnaître mais j'adore la 2CV dont je suis maintenant l'heureuse locataire, ça me rappelle mon grand-père. Aimé n'avait pas l'air non plus ravi de me la céder. Au passage c'est quoi ce prénom ? C'est vrai, qui, à trente ans s'appelle comme ça ? Surtout, sans être mesquine, ça ne lui va pas du tout. Comment un type aussi désagréable peut-il s'appeler Aimé ?

J'ai connu un professeur de renom qui se prénommait Aimé et à bien y réfléchir il était tout aussi désagréable ! Enfin jusqu'à ce qu'il voit en moi un potentiel à acquérir ...
Je balaye d'une grimace, ces souvenirs désagréables, je n'ai pas envie de me rappeler le travail. Pas encore.

Et pourtant, de venir voir Mamé me renvoie à lui, tout me renvoie à lui. Je passe les portes de la maison de retraite et frissonne, j'ai honte. Cela fait sept ans que je ne l'ai pas revu, mon boulot m'a tout pris, ma famille, mes amis et ... mon fiancé.
Il faut dire, à ma décharge que ma mère et Mamé ne se parlant plus je n'avais pas réussi à grouper les visites familiale. Je n'ai jamais su pourquoi cette rupture avait eu lieu et pourtant j'avais interrogé ma mère a de nombreuses reprises mais elle n'avait pas répondu. Toujours est-il que moi je ne prenais que deux semaines de vacances par an - et encore- et que venir à Saint-Jean m'était impensable.

Jusqu'à aujourd'hui.

Enfin aujourd'hui je ne suis pas à Saint-Jean mais au Vigan, il m'a bien fallu quarante bonnes minutes de route pour arriver là. Ici de tout de façon tout est loin.

Je m'arrête à l'accueil et laisse une jeune femme rondelette me guider, il se dégage d'elle beaucoup de bienveillance.

— Je suis heureuse d'apprendre que Madame Salvé a de la famille. Nous étions peinés avec l'équipe qu'il n'y ai jamais personne de sa famille à passer. Heureusement, le docteur Bastien passe la voir sur son temps personnel.

J'encaisse l'accusation à peine déguisée et trouve l'aide soignante tout de suite moins sympathique. C'est le cœur en miette que je passe la porte de la chambre et découvre Mamé qui joue aux cartes avec un vieux monsieur.

— Mamé ?

Elle se tourne vers moi et me dévisage une micro seconde avant qu'un immense sourire n'éclaire son visage.

— Connie !

Pitié pas cet affreux surnom.

Elle se lève et s'avance pour me prendre dans ses bras. Un instant, elle me tient éloignée pour me dévisager.

— Regarde moi comme tu es belle !

— Que dire de toi Mamé, tu es rayonnante.

Elle chasse mon compliment d'un geste de la main comme si elle était gênée mais je la connais, elle est tellement coquette que rien ne lui fait plus plaisir.

— Tu es de passage avec Peter ?

*raclement de gorge de ma part

— Non, je suis venue seule. Et je suis là pour un moment.

— En vacances ?

— En ... année sabbatique plutôt.

Elle hoche la tête.

— Tu as pris du temps suite à ce qui t'es arrivée ?

C'est à mon tour d'acquiescer et la laisse attraper mon bras et contempler l'ampleur des dégâts. Ou plutôt la partie émergée de l'iceberg.

— C'est la seule fois où ta mère m'a appelé en sept ans. Pour me dire que ma petite fille était au plus mal.

— Elle a exagéré Mamé, ce sont juste des petites cicatrices.

Tout ça pour ça (terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant