11.

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Cigarettes after sex dans l'appartement. Je danse en short dans mon salon. Les lumières sont blanches et grises, le tapis doux sous les pieds. 

A quelques mètres de là, elle pleure allongée sur son lit, le genou abimé d'une gamine de cinq ans, mais elle n'est pas tombée de vélo, elle. 

Je tourne je tourne sur moi-même. Le monde n'a pas de sens. 

J'ai tellement envie qu'on m'aime dans la musique et le bruit de la pluie. 

Le goût du sang dans la bouche elle renifle ravale ses larmes, ça sert à rien de toute façon. 

Lumières électriques sur sa peau éparpillée. 

J'ai le souffle court, je pleure en dansant, j'ai toujours si mal au cœur comme s'il coulait à l'intérieur de mon ventre, j'veux des mains contre moi. 

Ce qu'elle voudrait c'est un corps qui réchauffe le sien, un regard pour lui dire de se relever, que c'est pas si grave, que l'amour a toujours été une longue souffrance pour tout le monde, qu'il y aura d'autres matins dans les rayons mauves du soleil. 

J'éteins toutes les lumières, je suis dans le noir, je suis collée au mur, je fume en regardant le blanc des mes pieds. Face à moi la fenêtre de son appartement tout est éteint je l'imagine dormir paisiblement son corps sous les draps son copain qui embrasse le sommet de son épaule j'ai mal j'ai mal au cœur. 

Elle tremble en marchant vers la salle de bain. La porte a claqué derrière lui pourtant. Elle est seule. Elle n'arrive pas à s'arrêter de pleurer, pas de larmes juste des petits gémissements douloureux, qu'elle tente d'étouffer. Dans le noir tout résonne, elle s'arrête devant la porte elle est épuisée elle veut que tout s'arrête que le monde soit recouvert d'une poussière épaisse et moite et ne la laisse plus respirer. 

Je ferme les yeux je pense à mon corps disparaissant dans le sol je pense à être happé dans un trou noir venu de l'univers qu'une pluie de météorites s'abattent sur la terre, j'imagine des catastrophes comme s'il n'y en avait pas déjà assez, j'imagine mes catastrophes personnelles qui m'abatteraient d'un coup sec sans que je n'ai besoin de faire un geste j'imagine j'imagine j'imagine. 

Lentement elle se relève, ses poignets tremblent, elle a mal partout, elle ne sait plus depuis quand, elle a peur toute seule. Elle se traine jusqu'au salon, ouvre la porte battante du balcon. En face, l'appartement est plongé dans le noir. 

Quand j'ouvre les paupières elle est là, juste en face de moi. Les mains appuyés sur la rambarde du balcon. Elle regarde en bas, j'ai l'estomac qui se serre une sueur froide dans le dos je sais pas pourquoi mais je la vois déjà se laisser tomber je sais pas pourquoi mais je n'arrive pas à bouger je suis collée au mur mes doigts tremblent

sur la rambarde gelée mais elle n'a pas peur elle y a pensé si souvent et ce soir l'appartement d'en face n'est pas allumé, tout le monde dort et tout le monde s'en fout et elle, elle n'en peut plus c'est trop difficile elle n'est pas capable de supporter tout ça pas capable

de faire un geste, je suis comme face à l'écran gigantesque du cinéma et le film se déroule en noir et blanc, la bande est lente je la vois prendre une longue inspiration et

ce n'est pas si difficile au milieu de la nuit, il suffit juste de

se laisser tomber, c'est ce qu'elle va faire et

de cesser d'écouter les bruits du monde tout autour de faire comme s'il n'existait pas et

non

le vent

non

la nuit si profonde

non

le murmure de la musique

non

mourir dans le murmure de la musique

NON

mourir

-NON !

Love is a losing gameOù les histoires vivent. Découvrez maintenant