14.

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La chambre est plongée dans le noir mais j'aperçois son corps sous la couverture. J'ai mal au cœur. De la savoir si triste.

Moi même j'ai toutes ces choses qui ne vont pas droit dans ma tête, mais jamais au point d'avoir envie de mourir aussi brutalement. Jamais.

J'ai peur qu'elle recommence maintenant, j'ai peur de la perdre et je ne sais pas pourquoi j'ai cette peur alors que je ne la connais presque pas, je ne sais pas pourquoi cette forme sous la couette me semble si importante.

J'hésite à rentrer dans le lit à mon tour. Je ne sais pas si elle a besoin d'être seule... Je crois que si j'étais elle, c'est ce que je voudrais.

Je prends un plaid et je me décide à aller dormir sur le canapé du salon. Mon portable est resté sur la table et j'hésite à envoyer un message à Louis pour lui demander quoi faire. Mais si je le fais il risque de rappliquer pour s'assurer que je vais bien alors je repose le téléphone en soupirant.

Je ferme les yeux. Toutes les images de la soirée affluent sous mes paupières. Je ne dois pas y penser. J'ai eu peur mais tout va bien maintenant, tout va bien. Elle est dans mon lit, elle ne va plus tenter de sauter par le balcon. Elle est dans mon lit.

Je rouvre les paupières. Au milieu des ombres de la nuit, j'aperçois mon book posé sur la table basse. Ouvert sur une page au hasard. Deux femmes inconnues qui me regardent avec l'air de tout me dire. Deux femmes que je ne comprends pas.

Je ne comprends personne.

Ni elles, ni celle qui dort dans mes draps.

C'est pour ça que mes photos n'ont pas de sens. A quoi bon savoir capter les regards si c'est pour ne rien y lire ?

Je me lève et j'attrape mon book. Je le feuillette rapidement. Il n'a pas de sens. Rien en a. Je n'ai plus envie de le présenter. Ce n'est pas ça qu'il faut que je fasse. Il faut... Il faut que ce soit la voisine, partout, il faut que ce soit ses yeux, il faut que j'apprenne les morceaux de son âme, et que je les photographie un par un.

Je déchire méthodiquement les photos, les pages, tout, des petits morceaux de papier noir et blanc qui tombent sur mes cuisses. Je ne l'entends même pas arriver derrière moi. Elle s'agenouille à mon côté, je la regarde, j'ai les yeux qui pleurent tous seuls, elle me prend le book des mains, les photos collées à mes paumes moites, elle secoue la tête, mais elle ne dit rien. Cette nuit n'a aucun sens, cette nuit défigure ma vie entière, cette nuit est un grand tunnel sombre qui ne me laisse plus respirer.

Elle m'emmène avec elle dans mon lit, me prend dans ses bras, c'est pas logique du tout mais je m'en fous, je pleure en me collant à son dos, je pleure longtemps comme un bébé. Des vagues dans le ventre. Ses mains froides qui essuient mes joues. Deux pupilles noires, insondables.

La chaleur de son corps sur le mien.

Love is a losing gameOù les histoires vivent. Découvrez maintenant