7 - le papier

62 17 7
                                    

Marzia laissa ses pieds la guider jusqu'aux limites de la ville. Elle longea les bords de la mer violette pendant un long moment avant de se décider à faire une pause. Son repas au salon de tatouage avait été bien maigre : elle avait encore une faim de loup.

Elle s'installa donc à la terrasse d'un petit restaurant, complètement différent ce ceux qu'elle avait testé jusqu'à présent. Si les autres avaient tous cet air vintage et simple de la vie d'autrefois, celui-ci se rapprochait beaucoup plus de ceux de la planète-capitale. A la pointe de la technologie.

Mais elle avait trop faim pour faire la difficile, et de toute manière, son esprit était occupé à autre chose.

Marzia dégusta toutes sortes de poissons et crustacés colorés avant de s'estimer repue. Le plat avait beau avoir été délicieux, une petite partie d'elle aurait aimé resté manger la nourriture épicée de Viktor. Elle aurait dû tenter de voir dans quel magasin il l'avait achetée.

Elle fit tourner son verre sur la table, le regard posé sur la mer calme. Le soleil n'avait pas cessé de briller dans le ciel de Zetenia depuis qu'elle était arrivée, et cela n'était pas pour lui déplaire.

La jeune femme se leva, attrapa sa veste d'une main et alla payer son repas. Une fois l'argent crédité, grâce au bracelet accroché à son poignet, elle lança un sourire à l'employé qui l'avait servi et se dirigea vers la porte. Elle ne savait pas encore comment elle allait passer le reste de la journée : continuer sa promenade lui ferait sûrement du bien, jaugea-t-elle.

— Attendez, vous avez fait tomber quelque chose !

Marzia se retourna. Le serveur s'adressait bien à elle : il se baissa pour ramasser un morceau de papier, et s'avança pour le lui tendre. Elle l'attrapa en remerciant l'homme. Ses yeux se posèrent sur le papier.

— Vous êtes sûr que c'est à moi ?

— Il est tombé de votre manteau.

Pourtant, la jeune femme était persuadée de ne rien avoir mit dans les poches de cette veste depuis l'avoir sortit de sa valise, le matin même. Elle hocha poliment la tête. Les regards autour d'elle la poussèrent à sortir du restaurant pour résoudre ce mystère une fois qu'elle serait seule, à l'extérieur.

— Bonne journée, souffla-t-elle.

La porte se referma automatiquement derrière elle. Le papier serré entre ses doigts, Marzia esquissa quelques pas sur le bord de la mer. Elle le déplia.

« Remise officielle des prix du concours de Zetenia »

Interdite, elle tourna le prospectus dans tous les sens - mais seule l'heure exacte de la remise des prix était indiquée. Elle laissa tomber son bras le long de son corps.

La seule personne qui aurait pu glisser ce papier dans sa poche était Viktor. Était-ce une invitation ? Pourtant, elle avait été plutôt claire lors du repas. Elle n'approuvait pas ses activités.

Elle vérifia la date sur le papier, mais c'était bien celle du jour même. Pensait-il qu'elle pourrait changer d'avis en un après-midi ?

Marzia secoua la tête, le regard posé sur l'eau clair. Elle était à la fois agacée et soulagée. Agacée, car elle n'arrivait pas vraiment à cerner Viktor Creek : et elle ne parvenait pas non plus à mettre ses propres pensées au clair. Elle avait toutes les raisons du monde d'être contre les intelligences artificielles perfectionnées... mais malgré elle, les arguments de Viktor flottaient dans son esprit, tentant d'ébranler ses convictions. Il avait l'air si sûr de lui lorsqu'il lui avait assuré que ses robots étaient sans danger.

Et soulagée. Soulagée parce qu'elle savait que leur conversation n'était pas terminée.

Marzia fourra le papier dans sa poche en continuant sa promenade : mais cette fois, elle se dirigeait vers le centre-ville. 

☆ ☆ ☆

This Side Of The MoonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant