This Side Of The Moon

2 - Le dragon incandescent (Ⅰ)

La grande place était noire de monde. Marzia avait l'impression que tous les habitants de la ville s'y étaient réunis. Elle cherchait en vain ses nouveaux amis dans la foule, se frayant un passage vers l'autre côté de la place, mais son regard était sans cesse attiré par son centre. Elle était trop petite pour voir par dessus la foule : mais de ce qu'elle arrivait à distinguer, elle avait l'impression qu'un cercle s'y était formé. De drôles de lumières colorés y brillaient également.

— Wolf !

La jeune femme se tourna dans la direction de l'appel. Mais celui-ci avait été noyé dans le brouhaha général, et elle n'était même pas sûre d'avoir vraiment entendu son nom de famille.

Elle hésita. Puis une main se posa sur son épaule : elle reconnut la voix de Rhysa à côté de son oreille.

— Tu es enfin là. Viens, ça va bientôt débuter.

Puis elle fit volte place et s'élança vers le centre de la place. Un sourire curieux accroché à ses lèvres, Marzia partit à sa suite. Elle éprouvait une sorte de sérénité, au milieu de cette foule, sans qu'elle ne sache pourquoi.

Marzia avait toujours été très sensibles aux ambiances. Celles produites par un environnement spécial, l'état d'esprit des personnes qui l'entouraient, ou un mélange des deux. Elle pouvait facilement se laisser plonger dans un état émotionnel qui correspondait à cette ambiance.

En l'occurrence, la foule qui se pressait autour d'elle et la pénombre seulement éclairée par les enseignes des bâtiments lui inspirait un sentiment de sérénité. C'était étrange. Mais en observant les visages l'entourant tandis qu'elle traversait la grande place, Marzia se rendit compte que cette ambiance provenait des habitants. L'air respirait la bonne humeur – ainsi que l'impatience.

Elle ne savait pas quel était cet évènement qui provoquait tant d'excitation, mais elle se doutait que c'était quelque chose d'important dans la ville. Une fête traditionnelle, peut être ? Il n'y en avait pas à la planète-capitale. Mais elle avait déjà assisté à toutes sortes de fêtes et coutumes étranges quand elle était enfant.

— Dépêche toi !, la pressa son amie.

Et elle s'arrêta soudain. Marzia leva la tête : elles se tenaient juste devant le cercle qu'elle avait cru distinguer un peu plus tôt. Des habitants de tous les âges, des écrans dans les mains, trépignaient d'impatience. Certains riaient avec leurs amis. Rhysa prit la main de la jeune femme et la tira vers un membre du cercle. Marzia reconnut l'un des garçons de leur groupe d'amis. Il tenait lui aussi une fine tablette entre ses doigts, tapotant sur l'écran à une vitesse époustouflante. Elle reprit doucement son souffle tandis que l'excitation la gagnait elle aussi.

— Qu'est ce que c'est ? C'est une fête ?

— Non, c'est un concours. T'as vraiment de la chance – il devait avoir lieu le mois dernier, mais il a été repoussé à cause du mauvais temps.

Marzia esquissa un sourire. Depuis qu'elle était arrivée, le soleil n'avait pas quitté le ciel orangé. Elle était effectivement chanceuse.

— Un concours de quoi ?, s'enquit-elle.

Son regard parcourut une nouvelle fois le cercle ; les participants, devina-t-elle. Elle se rendit compte que ce qu'elle avait prit pour de l'impatience était en réalité de la nervosité. Ou peut-être un mélange des deux. Marzia se doutait que le concours était technologique, mais elle se demandait ce que les membres du cercle comptaient faire avec une simple tablette.

L'un des amis de Rhysa se tourna vers elle pour lui répondre, mais cette dernière le coupa avec un regard menaçant.

— Surprise. Un peu de patience, Wolf.

Marzia leva les yeux au ciel et reporta son attention sur le cercle. La place entière s'était brusquement tue. Le silence était électrique : impatient. Un frisson lui parcourut l'échine. Rhysa lui lâcha le bras pour taper silencieusement des mains, un grand sourire fixé sur son visage.

La compétition commença.

Un léger claquement dans l'air retentit au dessus de la tête de Marzia. Elle leva le regard sur un oiseau. Il traversa la place dans quelques puissants battement d'ailes. Et ses ailes – elles étaient enflammées. Il poussa soudainement un cri, et le feu redoubla d'intensité, illuminant tous les habitants d'une lueur orangée. Soudain, un nouvel oiseau surgit du haut d'un bâtiment. Des rayons colorés se mouvaient sur tout son corps, le traversant de part en part. Et il disparut.

Marzia poussa un exclamation de surprise lorsqu'il réapparut quelques mètres plus loin, effectuant une figure dans les airs.

Les tablettes. Les participants contrôlaient ces oiseaux – probablement mécaniques. Ce n'était pas des hologrammes, ils étaient bien trop réalistes.

Des poissons volants, des serpents, et toutes sortes d'autres animaux fantastiques remplirent finalement le ciel. Des centaines de lueurs colorées le parcouraient dans toutes les directions. Marzia ne savait plus où regarder, ses yeux étaient attirés par tous les mouvements lumineux au dessus d'elle.

Les sons s'estompèrent autour d'elle jusqu'à qu'elle n'entende plus que les battements de son cœur. Ses pieds, ancrés au sol, lui permettaient de garder une sensation de réalité. Sans cela... Marzia aurait eut l'impression de s'envoler dans le ciel au milieu de toutes ces machines iridescentes. Son visage était la représentation même de l'émerveillement.

Tant de formes, de couleurs, de mouvements. Le ciel n'était presque plus visible en arrière plan. Soudain, le regard de la jeune femme se posa sur une machine qui se détachait des autres.

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