Marzia Wolf n'avait beau être là que depuis une semaine, elle sentait déjà que le changement d'environnement lui faisait du bien.
Ce sentiment lui avait cruellement manqué ces dernières années : petite, elle voyageait de planète en planète, accompagnant son père dans tous ses déplacements. Mais lorsqu'il avait été muté à un poste supérieur dans son entreprise de voyage interplanétaire, toute sa famille avait dû emménager sur la planète-capitale.
La jeune femme posa la paume de sa main contre la baie vitrée, qui s'ouvrit instantanément. Le sol lisse et blanc était chaud sous ses pieds lorsqu'elle s'avança sur la terrasse. Le calme qui régnait dans la vallée lui faisait un effet étrange – après avoir été entourée si longtemps d'un bruit constant, omniprésent, ce changement était brutal. Elle se douta que si elle restait trop longtemps, elle ne supporterait plus de retourner à la capitale.
Un an : elle avait réussit à négocier une année de liberté, sans études et sans obligations. Et elle suivrait ensuite les pas de son père. Elle monterait les échelons de l'entreprise, atteindrait l'un des postes de direction, ne sortirait plus de la planète-capitale - sauf pour d'occasionnelles vacances prises lors d'une période pas trop chargée de l'année.
Prendre une pause en plein milieu de ses études avait semblé être une bonne idée. Mais maintenant qu'elle était ici, sur Zetenia, elle n'en était plus si sûre. Et si, au lieu de la motiver pour sa futur carrière, son séjour ne faisait qu'appuyer son indécision ?
Non. Marzia savait ce qu'elle voulait, et elle ne se laisserait pas démotiver. Sa tante lui avait répété que ce voyage n'était qu'une perte de temps : la jeune femme ne voulait pas lui donner raison. Pour une fois qu'elle pouvait faire quelque chose par elle même, elle en profiterait au maximum.
Marzia traversa la terrasse, passa de l'autre côté de la route en ignorant le sol rocailleux sous ses pieds nus, et s'appuya contre la large balustrade en pierre. Elle pouvait apercevoir le centre-ville en contrebas. La douce couleur violette de la mer, à l'ouest de la ville, contrastait avec les teintes chaudes et si originales du ciel. Comme dans la capitale, la technologie était présente, mais Zetenia possédait également une part de nature qui faisait son charme. L'équilibre entre les hauts immeubles et les étendues vertes était presque parfait.
Mais si ce mélange plaisait à Marzia, l'avis de la plupart des autres personnes divergeaient. Les destinations de vacances privilégiées variaient entre Asturn, Caral ou toutes les planètes très similaires à la capitale, et celles découvertes plus récemment.
La nouveauté était attractive.
Qui ne souhaiterait pas parcourir la nature encore vierge de toute technologie ? Certaines de ses planètes restaient comme cela. Vivre le plus simplement possible avait été à la mode ces dernières années, suite à la crise économique de Smoaria. Beaucoup avaient perdu leur travail, et vivre sur l'une des ces planètes naturelles était plus attractif que de chercher un nouveau job dans l'une des grandes entreprises de la capitale.
Marzia posa un écran tactile à plat sur la balustrade et vérifia que l'un de ses proches n'avait pas essayé de la contacter depuis la veille. Pas de message. La jeune femme leva les yeux vert le ciel orangé. Elle pourrait le contempler durant des heures – rien à voir avec le ciel blanc de la capitale, tout le temps pollué par les publicités holographiques des grandes compagnies. Ici, le ciel était dégagé. Naturel.
Marzia eut un mouvement de recul lorsqu'un hologramme surgit de l'écran devant elle. Elle reprit ses esprits et accepta l'appel en se composant un léger sourire. Elle fixa son regard dans celui de la silhouette transparente.
— Bonjour, Rhysa, lança-t-elle d'une voix douce.
— Salut. Je ne t'ai pas réveillée j'espère ?
La jeune femme se contenta d'un sourire. Son interlocutrice n'attendait de toute façon pas de réponse – les formules de politesse n'était pour Rhysa que cela : des formules. Cela n'était pas surprenant. Elle venait elle aussi de la capitale, où la politesse était omniprésente et pourtant sans aucune profondeur. Des phrases toute-faites.
En une semaine, Marzia avait rencontré quelques personnes de son âge. Il s'agissait en majorité des enfants de hauts fonctionnaires de la capitale qui venaient passer un peu de bon temps loin de leur famille. Comme elle, d'une certaine façon. Mais eux étaient sur Zetenia depuis déjà plusieurs mois... voir plus d'un an.
— Tu es libre ce soir ?, reprit Rhysa. Il y a quelque chose que tu dois absolument voir. On se rejoint tous à vingt-et-une heure sur la grande place.
— Et on va voir quoi, exactement ?
— Surprise ! Crois-moi, ça vaut le coup. Tu sera là ?
— Je serai là.
— Génial. A ce soir.
Sans plus de cérémonie, l'hologramme disparu. Marzia s'appuya de nouveau contre la balustrade, laissant la brise jouer avec ses cheveux.
Depuis qu'elle était arrivée sur la planète, elle passait pratiquement toutes ses soirées avec le groupe de Rhysa. Ils connaissaient la vallée bien mieux qu'elle, et lui faisaient découvrir tous les coins intéressants de la ville. Elle les aimaient bien – mais Marzia se doutait que la raison pour laquelle ils l'avaient si facilement prit sous leur aile était son nom de famille. La position de son père dans l'entreprise de voyage interplanétaire.
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This Side Of The Moon
Science-FictionAvant de continuer ses études dans le but de travailler dans l'entreprise de voyage interplanétaire de son père, Marzia souhaite passer une année de liberté sur une autre planète. Mais son séjour prend une tournure totalement différente, quand elle...