Chapitre 1

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Dans notre vision d'un monde meilleur, utopique, les humais ne se tuent pas, ne se mutilent pas. Etre d'une telle faiblesse, d'une telle estime de soi, pour vouloir mettre fin à une humanité aussi dépourvue du meilleur, controversée par l'état, et dégringolée par des gens qui disent vouloir construire une dynastie. Quelle ironie, une utopie qui vire au cauchemar, qui devient contre-utopie. Une dystopie...
Alors être ou ne pas être, ça en devient criminel d'être, de vivre. Voir des gens qui ont peur de perdre leur vie, alors qu'ils ne l'ont même pas commencée. Si ça ce n'est pas hallucinant... Plus une chose est bizarre moins elle est mystérieuse, non?
Dans une vision d'un monde meilleur, ne faudrait-il pas le contrôler? Le manipuler? Le désinvolter? Simplement se manifester.
Je le regardais, marchant, s'imprégnant du monde, s'accaparant la beauté, le charme, l'humour, l'imposture. Même son visage était innocent, ses cheveux ébouriffés, ses yeux malicieux, ses lèvres rosées, il l'était, il ressemblait à un ange.
Ne faudrait-il pas que je me serve? Le prendre comme il prend leur vie?
Je t'en prie, on est beaucoup plus intelligentes.
Se servir? Mais quelle décence.
Allons plutôt lui parler.
Il s'apprêtait à entrer dans son bureau quand je l'interrompue dans son élan:
-Bonjour Mr Stewart, un honneur, dis-je en lui tendant ma main. Je suis Jefferson, Maélice Jefferson, la nouvelle comptable.
-Tout le plaisir est pour moi, dit-il avec un sourire qui révélait deux fossettes au coin de ses lèvres, s'attardant un peu plus que prévu sur ma main.
-Vous n'avez trouvé qu'un sourire aguicheur pour me séduire, j'en attendais pas plus de vous.
Dis-je en contemplant la surface de son bureau, c'était tout de même le comptable d'une des plus grandes entreprises du pays, un bureau aussi grand ne manquerait pas à la liste pour un...
Son air surpris interrompit ma contemplation puis il reprit son air arrogant et suffisant:
-Excusez mes mauvaises manières, il m'est difficile de contenir mes habitudes aux côtés d'une si belle brune aux yeux bleus.
Je levai mes yeux au ciel, sérieusement, son jeu de petit Play-boy dragueur me tue d'ennui. Je me levai, lui faisant croire avoir stopper mon regard sur lui quelques instants, juste le temps de faire croire qu'il m'est intéressant mais sans plus, assez pour nourrir son besoin d'exister, mais pas suffisamment pour qu'il en soit satisfait, puis j'allai au bureau que le directeur m'avait attribué, juste aux côtés du sien. Quelle belle ironie.
En entrant, en me retrouvant seule au milieu de cet immense bureau, je sentis une tristesse d'abattre sur moi, comme si une force invisible comprimait ma poitrine et qui me fit sentir le cœur vide.
Je m'écroulai par terre, pleurant, sanglotant.
Quelle vie de merde, belle connerie.
Je mourrais sans doutes sans personne à mes côtés, suicidée ou tuée par ces fous avec qui je travaille. Divinité imbécile qu'on appelle dieu, c'est comme ça que tu traites tes enfants?
-Ruhhhhh.
Voilà que je me mettais à grogner toute seule, mourrais-je peut-être en métamorphe, changée en louve.
Je me recroquevillai par terre, en position fœtale, pleurnichant comme une petite fille de sept ans qui avait perdu son jouet préféré.
Mais... depuis quand je craignais la solitude? Je suis tout de même Maélice Jefferson.
Quel déshonneur.
-Et la vie elle-même m'a dit ce secret:" Vois, dit-elle, je suis ce qui doit toujours se surmonter soi-même".
Pour les incultes, c'est de Nietzsche.
Il faut bien se souvenir d'oublier nos démons.
Vous avez foi en dieu, j'ai foi en le savoir, la connaissance, la recherche, la philosophie et la science.
N'est ce pas un contraste divin et séducteur?
Je me levai de ce parterre marbré et froid, et me donnai ma prestance habituelle qui allait parfaitement avec ma silhouette désuète.
Il ne fallait pas que j'oublie mon but premier, il ne fallait pas qu'il dévie.
Vous savez ce que Nietzsche avait dit d'autre?
"L'homme a besoin de ce qu'il y a de pire en lui si il veut parvenir à ce qu'il y a de meilleur".
-Nous sommes sûrement frères et sœurs, il a juste quelques années d'avance, sûrement né à la mauvaise époque.

Que suis-je drôle.

Fine, thanks.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant