3 - Camille

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C'est la même routine, chaque jour. J'arrive au travail, je salue Pénélope, je démarre l'ordinateur et je me prends un café. Tous les matins. A la même heure. La même routine. Mais ce matin, c'est différent. Le chef, M. Silverston, est déjà dans son bureau. Il y a la remise des diplômes, aujourd'hui.

De son fauteuil, il crie mon nom et tout mon corps se tétanise sur place. Mon bureau donne sur celui de Pénélope, dont la porte est ouverte. Elle me fait un signe de tête pour me faire réagir. Je prends mon courage à deux mains et rejoins monsieur Silverston qui fait les cent pas. Il n'attend même pas que je ferme la porte pour me hurler dessus. Le bâtiment est vide, mais quand même.

_ Les diplômes, bon sang, Jenson ! vocifère-t-il en les secouant devant mes yeux. Le sceau ! Le sceau est à l'envers sur chacun d'entre eux ! Il reste un quart d'heure pour les refaire ! Et il faut encore préparer la salle ! Où avez-vous la tête, bon sang ?

Comment ça, le sceau est à l'envers ? Je n'ose pas répliquer, mais quand même. Comment me suis-je débrouillée pour avoir fait une énormité pareille ? J'essaye de rassembler mes souvenirs de la veille, mais ils sont flous. Je n'arrive pas à repasser la scène correctement dans mon esprit.

Il balance d'un mouvement brusque les diplômes dans la corbeille qui traîne à côté de son bureau et me tourne le dos, signe que je peux disposer. Toute tremblante, je fais le trajet presque à reculons et je heurte quelque chose. Enfin, plus exactement, quelqu'un. Qui, vraisemblablement, ne m'avait pas aperçue et qui n'a pas eu le temps d'éloigner son café de mon corps, étant donné la chaleur et l'humidité que je sens se répandre dans mon dos.

_ Hé merde, décidément ! m'exclamé-je en me tournant.

Mais à ma surprise, ce n'est pas les yeux de Pénélope que je rencontre mais ceux de Megan. Je me raidis automatiquement, me disant immédiatement que c'est la pire journée de ma vie et que j'aurais mieux fait de me faire écraser en traversant la rue ce matin.

Pourtant c'est bien la première fois que ses yeux ne me réduisent pas en cendres dans la seconde qui suivent le contact visuel. A vrai dire, elle a l'air un peu gêné. Comme si elle était désolée pour moi.

Nous nous rendons, sans même nous consulter, aux toilettes du bâtiment qui se trouvent au bout du couloir. Remarquez, je vois difficilement où on pourrait aller d'autre étant donné que ma chemise est imbibée de café et que sa main semble avoir moulu les grains elle-même. Elle jette le gobelet dans la poubelle, actionne le robinet.

_ Tu... as un vêtement de rechange ? demande-t-elle en me regardant par le miroir.

Elle me tutoie maintenant ? Bizarre. Elle doit vraiment s'en vouloir. 

_ Bien sûr ! J'ai toujours des vêtements de rechange avec moi, répliqué-je avec amertume. Non, je n'en ai pas. Et je dois donner ces putains de diplômes au chef dans dix minutes sinon je vais me faire allumer !

Megan a l'air de réfléchir un instant puis soupire et me dit :

_ Déshabille-toi.

_ Pardon ?

Elle défait sa chemise, bouton par bouton, sans m'accorder un regard.

_ Bouge ! me presse-t-elle.

Comme je reste interdite, clairement pas d'humeur à faire un échange de vêtements comme au collège, elle se tourne vers moi et ses mains se posent sur mon haut. Et, assez haut justement, si vous voyez ce que je veux dire. Je suis tétanisée, mon souffle se coupe et mes yeux se déposent sur les lèvres entrouvertes de Megan qui ne fait plus un mouvement.

Je déglutis avec peine, tellement tendue que j'ai l'impression que je vais tomber dans les pommes. J'ai à peine le temps de comprendre ce qu'il se passe que je me retrouve collée contre la porte, Megan contre moi et ses lèvres mêlées aux miennes. Merde, quelle journée ! Mon cœur explose dans ma poitrine et mes mains trouvent leur place sur le corps de la formatrice, la parcourant doucement avant de s'arrêter dans le bas de son dos et de la plaquer plus fermement contre moi.

My ParisianOù les histoires vivent. Découvrez maintenant