Limpide : chapitre 8

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12 Décembre.

Et toujours aucun coup de téléphone de la police. Ma mère est encore à l'hôpital, car elle a développé des symptômes de démence. Sofia se bat tout les jours pour me pousser à manger, aller à la fac, sortir. Je lui suis infiniment reconnaissant. Emma ne renonce pas à m'approcher, à grands coups de "Salut" le matin, et "A demain" le soir.

Je suis fatigué. Tellement.

Épuisé de mes souvenirs, épuisé de mes regrets qui drainent toute mon énergie. Je ferai n'importe quoi pour oublier.

Le 23 décembre a fini par arriver. Lorsque je me suis levé, Sofia décorait un petit sapin, au pied duquel quelques cadeaux colorés trônaient.

-Papa nous rejoindra ce soir, lança ma sœur, toujours de dos. Et demain, on ira voir Maman.

Je réalisai que je n'avais rien acheté. Je me précipitais dans ma chambre pour m'habiller.

"Où est ce que tu vas ? "

-Je reviens très vite ! m'écriais-je.

Il faisait froid.

Je déambulais au hasard. Qu'est ce qui pourrait faire plaisir à ma sœur ? Et à ma mère ?

Qu'est ce que Sofia aimait ces jours ci ? Je me rends compte que je n'en sais rien. J'ai laissé filer tous ces mois dans un brouillard total, sans penser à qui que ce soit d'autres que des fantômes.

Dans un vague effort de mémorisation, il me semble qu'elle appréciait la musique classique. J'en achetai un disque, piochant au hasard. Pour ma mère... elle adorait courir, mais le pourrait-elle encore ? Les médecins n'étaient même pas à même de déterminer si elle sera capable, un jour, de s'occuper d'elle même.

Je choisis un collier orné d'une petite pierre verte, bon marché. Quand à mon père, ce sera une carte cadeau. J'ai du mal à communiquer avec lui, depuis qu'il est parti.

Je ne peux m'empêcher de soupirer, le cœur serré, devant mon sac. L'année passée, j'avais envoyé à Anaïs une peinture qu'elle avait adorée, durant l'une de ses visites. Elle m'avait immédiatement répondu après la réception du colis, une vidéo de remerciement où elle pleurait de joie.

Il commençait à pleuvoir, alors, je suis rentré en courant. Quand j'ai passé la porte d'entrée, Sofia a observé mon sac en disant :

"Oh..."

Puis elle a souri. Elle portait sa belle robe verte qui la faisait ressembler à une actrice, et ses bijoux des grandes occasions.

"Papa sera là dans une heure. J'ai mis au four un poulet, avec des pommes de terre et des haricots."

J'ai hoché la tête. Le salon avait complètement changé d'allure. Les décorations pendaient, guirlandes multicolores, et flocons aux poignées. Des pochoirs aux vitres, et des lumières colorés. Dans ma chambre, j'ai passé ma chemise blanche, mon pantalon noir et ma cravate. Sofia pense que j'ai l'air d'une autre personne, habillé ainsi. Avant de la rejoindre, j'ai jeté un coup d'œil à mon téléphone. Dix neuf messages non lus.

Le premier venait d'Emma.

"Joyeux Noël Axel, j'ai hâte de te revoir :)"

Ce qui me surprit le plus demeurait la profusion de messages venant de tous mes amis du lycée. Ils me souhaitaient de joyeuses fêtes, eux que j'aie ignorés.

"Joyeux Noël mec !"

"Faut qu'on se calle une date, bonnes fêtes !"

"En ce jour de Noël, je t'envoie mes meilleurs vœux."

La plupart joignaient des photos à leurs messages, et les souvenirs ont surgis en masse.

Des fêtes endiablées, selfie pris dans un parc, délires en cours, conversations par SMS...

Les larmes me sont montées aux yeux, que j'ai essuyés d'un revers de manche, même si je n'ai pu empêcher la chute de quelques une. J'ai souri, saisissant mes cadeaux, pour rejoindre Sofia dans le salon.


Purgation (Putride, Limpide)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant