Limpide : chapitre 9

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Le visage de ma sœur s'est illuminé, plus encore quand j'ai déposé mes propres cadeaux au pied du sapin.

Sans mot dire, elle m'a pris dans ses bras. Je crois qu'elle avait envie de pleurer, elle aussi. Nous avons mis la table ensemble, en attendant mon père.

Il est arrivé une demi-heure plus tard, bien habillé, une bouteille dans la main, et un sac dans l'autre. Il a largement souri en nous voyant. Sofia l'a enlacé, folle de joie. Je n'ai pas bougé, partagé entre la gêne et des résidus de rancœur. Il ne savait trop que faire non plus. Alors, lentement, mon père que je n'avais vu depuis si longtemps leva son bras pour tapoter paternellement mon crâne.

Je mentirai si je disais que ma sœur ne fut pas le pilier central de la conversation, mais l'ambiance s'est considérablement détendue. J'ai surpris mon père me lancer des regards appuyés, et quand nos yeux se croisaient, son expression s'adoucissait.

Nous avons mangé, puis, nous sommes offerts les cadeaux. J'ai reçu un casque audio, et un bonnet. Sofia m'a chaleureusement remercié. Quand à mon père, malgré l'impersonnalité du cadeau, il m'a dit que c'était parfait.

La soirée s'est poursuivie, au son des chants de Noël, et tant pis si ça peut paraître cliché, car, je ne me suis jamais senti aussi bien qu'à ce moment là, comme débarrassé de tout ce qui me nuit.

Nous avions tellement de choses à partager, et qui n'avait rien à voir avec ce qui s'est passé.

Il nous a confié son désir de s'installer ici, jusqu'à ce que ma mère soit apte à revenir.

Néanmoins, je ne lui ai pas totalement pardonné sa conduite. Il le sait. Mais une part de moi désire tout de même retrouver un semblant de cette relation père-fils, que nous partagions autrefois. M'appuyer sur lui, et soulager un peu Sofia.

Une fois la soirée terminée, j'ai répondu un à un à tout ceux qui avaient pensés à moi. J'ai longuement hésité avant de souhaiter de bonnes fêtes à Emma. J'imagine que je me sentais coupable, parce que me rapprocher un peu d'elle pouvait impliquer beaucoup de choses dans le futur. Et cette possibilité, quoi qu'hypothétique, ne m'empêchait pas de culpabiliser, en pensant à Anaïs. Je l'ai tout de même fait.

Puis, j'ai éteins mon téléphone, et me suis endormi, sans peur, sans inquiétude.

Tranquille.

Tôt, le lendemain matin, Sofia nous a tirés du sommeil. Mon père était resté dormir sur le canapé. Nous nous sommes mis en route pour l'hôpital, emportant avec nous cadeaux, et parts de gâteaux.

A l'entrée, une infirmière nous a prévenus que ma mère était réveillée. Lorsque nous sommes entrés dans sa chambre, elle a pleuré, un peu hystérique, un peu tendue. Mais, je retrouvais malgré tout ma chère maman. Elle a même souri à mon père, alors que je les croyais terriblement fâchés.

Elle avait des cernes, et des os bien plus saillants que d'habitude. Pourtant, ses yeux brillaient d'excitation. Elle a mangé sa part de bûche, en ouvrant ses cadeaux. Elle s'est excusée de ne pas en avoir.

Nous avons parlé de choses et d'autres, un peu comme la famille dont j'ai gardé souvenir, petit.

Mon père a demandé à ma mère l'autorisation d'emménager, qu'elle a acceptée.

En rentrant à la maison, j'ai ouvert le tiroir qui contenait les photocopies du journal de Maelle. Je les aie brûlées. Pas par vengeance ou rancœur, non. Pendant que le papier se consumait, j'ai souhaité qu'elle connaisse bonheur et paix, où qu'elle soit. Il était l'heure de tirer un trait sur ce qui nous avait blessé tout deux.

Par la suite, je n'entendis plus de bruits de pas inexistants dans mon dos.

J'ai commencé à ne plus craindre la foule.

Et quand un souvenir, qu'il soit de Maelle, ou d'Anaïs, envahissait mon esprit, je l'accueillais avec bienveillance.

Bien évidemment, il m'est arrivé de me réveiller en pleine nuit, secoué par un cauchemar, ou de pleurer, en proie au passé qui mordait, de temps à autre.

Je ne suis pas non plus devenu ami avec toute ma promo, mais je m'entends plutôt bien avec Emma, et ai revu d'anciens amis.

J'ai travaillé pour être au niveau, lorsque j'intégrerai la prépa littéraire, l'an prochain.

Ma mère devrait revenir chez nous d'ici l'été, soit dans quelques mois.

J'ai aussi visité la tombe d'Anaïs, et cela m'a beaucoup aidé.

En somme, tout allait bien, et ce renouveau de vie me donnait l'impression d'être une nouvelle personne.

Jusqu'au coup de téléphone de la police.

Purgation (Putride, Limpide)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant