Limpide : chapitre 2

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"Tu ne comprends pas à quel point je t'aime !"

Je me réveille en sursaut. Les cauchemars d'elle me hurlant ses sentiments sont devenus communs. Mais toujours aussi terrifiants. Deux mois après, la vie continue pour tout le monde, sauf moi. La police me convoque régulièrement, car dépassée. Elle est introuvable.

"Pourtant, une petite jeune fille comme ça ne pourrait pas aller bien loin, non ?"

Pour les citer.

J'aimerai y être indifférent, lui souhaiter de disparaître pour toujours, mais ce serait me fourvoyer.

Hier, le psychologue a donné le feu vert, je me rendrais au commissariat pour lire son journal. Sofia n'est pas vraiment d'accord, elle pense qu'il me suffirait de reprendre mon existence. Aller à l'école, voir des gens, recommencer le karaté. Mais elle ne sort pas de ma tête. Ma culpabilité, son souvenir, mes questions.

Un coup d'œil au réveil m'informe qu'il est cinq heures du matin. Inutile de se rendormir. Je me lève, et m'habille en soupirant. Une lourdeur comprime ma poitrine. Je ne suis toujours pas à l'aise dans ma chambre.

Deux heures plus tard, je marche dans la rue. L'absence de foule me rassure. Arrivé au commissariat, je me présente, Axel Adil, victime.

Un officier me conduit dans une petite pièce, loin du stéréotype de l'immense salle d'archive poussiéreuse. Il fouille un carton, pour en sortir un cahier de cours, banal.

Avec appréhension, je le tourne dans tous les sens. Les coins sont usés, et quelques feuilles s'échappent. Est ce que je dois le lire ?

Avalant une profonde goulée d'air, je me lance.

Le 6 Mars 2015, 10 heures.

Il tousse beaucoup. J'aime sa nouvelle veste. Comme d'habitude, il discute avec son voisin au lieu d'écouter le professeur. Est ce que je devrai lui acheter du sirop ? Il rit, puis il tousse. Courage !

Je n'ai rien reçu, elle n'a peut être pas eu l'occasion. J'ai l'impression de lire quelqu'un d'autre. Ce n'était pas une nouvelle veste, mais je ne l'avais jamais mise auparavant.

11 heures.

Il est en allemand, dans la salle d'à côté, il reste à peu près dix minutes avant le prochain cours où nous serons ensemble. J'ai hâte !

Elle semble avoir tenu un journal notant des informations sur moi toutes les heures. C'est simplement de la description, et des compliments. Fatigué, je quitte le poste pour prendre un café. Ils me réprimanderont, mais j'ai besoin de me poser loin de cette ambiance constamment tendue.

Le 7 mars 2015

Il est là, avec un joli tee-shirt blanc. Il a répondu aux questions des professeurs en géographie, philo et lettre. Il est tellement intelligent, brillant, je suis impressionnée ! Il n'a plus son écharpe, mais tousse encore un peu ! Le prof vient de le réprimander, car il discute trop. Il parait ennuyé. Il connait pleins de choses... je suis amoureuse.

J'ai cette immuable impression que ce ne sont pas nous. Que Maelle n'a rien écrit de tout ça, qu'elle ne parlait pas de moi.

Le 8 mars 2015, huit heures

Il est arrivé ! Avec un pull gris qui lui va divinement bien. Il n'a pas de voisin de table. J'aurai voulu y aller, mais je suis déjà à côté de quelqu'un, et puis, ça paraîtrait bizarre. J'espère que cette conne derrière lui ne va pas se déplacer, ou je la tue. Sa toux a l'air d'avoir diminué, mais sa gorge semble fragile. Il est attentif, et a un si beau sourire. Je veux le voir toujours.

Ces mots m'ont fait l'effet d'une douche froide. A cet instant là, était-elle sérieuse ?

Je ferme le cahier, incapable d'en lire plus. Je ne me sens pas bien, il faut que je m'en aille. Les autres clients du café me dévisagent. Je ne m'étais pas rendu compte que je pleurais.

Purgation (Putride, Limpide)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant