Acte IV, scène 1.

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Shira, Jaesa et Gina.


Le lendemain du banquet, la Lady, la Princesse et la servante sont toutes trois dans les jardins du Palais Royal, se promenant. Les oiseaux chantent autour d'elles. Le petit matin vient de se lever.

GINA, intéressée — Comment s'est passée la soirée ? J'aurais tellement aimé y participer avec vous.

JAESA, flegmatique — D'un point de vue général, vous n'avez rien manqué, Gina de Rasperborry. C'était un banquet, rien de plus ordinaire. Toutefois, si nous nous concentrons sur notre jeune Lady, ce devient amusant.

GINA, déçue — J'aurais vraiment voulu voir cela ! Mais qu'y a-t-il eu exactement ? Racontez-moi, je vous prie.

SHIRA, la tête baissée — Allez-y, Jaesa. Je n'en ai pas le courage pour l'instant.

JAESA, pouffe de rire — C'était tout bonnement divertissant ! J'ai eu la chance d'être aux premières loges du début à la fin. Tout d'abord, les invités. Ils étaient fixés sur elle et j'ai bien cru qu'ils allaient l'assaillir de questions et de réflexions sur sa beauté. Ces nobles étaient comme attirés inlassablement vers Shira. Et puis, quand elle a parlé, plus aucun bruit ne parcourait la salle.

GINA, bouche bée — Avez-vous réellement réussi à les faire taire, Lady Shira ? Cela relève du miracle !

JAESA Effectivement. Ensuite,... Qu'y a-t-il eu déjà ?

SHIRA, du bout des lèvres — Diril.

JAESA Ah oui ! Mon quatrième frère a encore fait ses simagrées, mais ce n'est pas essentiel de le mentionner. Il agit toujours comme un rustre. Non, ce qu'il ne faut oublier, c'est votre danse endiablée avec le Lord.

GINA Lequel ?

JAESA Je ne l'ai pas reconnu. A dire vrai, je connais très peu de nobles. Cependant, lui, semblait complètement épris de Shira. J'ai presque cru qu'il allait la demander en mariage.

GINA, ahurie — A ce point ?!

JAESA Oui, je vous assure ! Cet homme était fou ! Fou d'elle ou simplement fou, mais fou dans tous les cas.

SHIRA Je ne savais pas qu'en Ethrian il existait de tels phénomènes. Entre le quatrième Prince et ce Lord, j'ignore qui est le plus dérangé !

JAESA Je conçois qu'ils sont... Comment dire ?...Étranges, pour des non-habitués.

GINA, acquiesce A force de temps, on s'y accoutume !

SHIRA, sceptique — Je ne sais si j'y parviendrai. Ou si j'ai envie de m'y accoutumer. A des moments, je ne voudrais être nulle part ailleurs et à d'autres, j'ai le mal du pays. Ma famille me manque à m'en déchirer les entrailles.

JAESA Cela également, on s'y habitue. Au début, vous vous sentirez seule, désespérée de vous enfuir de cette Capitale pour rejoindre Zishao. Puis, lorsque vous comprendrez que votre vie est désormais ici et non là-bas, rien ne vous rattachera plus à vos lointains proches. Ils ne seront plus que d'anciens souvenirs dont vous vous remémorerez à l'occasion. Et au mot "famille", vous penserez à votre époux, à ses frères, à moi, au Roi. A "maison", vous penserez soit au Palais Royal, soit au domaine de votre mari. Au "passé", vous répondrez "futur", "enfants". Quand on vous appellera maladroitement "Lady", vous rétorquerez froidement "Princesse". Un jour, on vous demandera si vous êtes bien ici, vous direz machinalement que oui, vide. Que vous y croyez ou non, cela importe peu. Tant que vous vous pliez aux convenances, vous serez libre. Est-ce un tableau sombre pour vous, Lady Shira ?

SHIRA, bouleversée — Eh bien, oui ! Cela me semble cruel !

JAESA Non, vous vous trompez encore. A partir de maintenant, vous devez réfléchir autrement. Les pensées négatives ne vous serviront à rien, ne gardez que les positives. La famille, la maison, le passé et le futur, vos enfants, Lady ou Princesse, quelle est la différence ? Tant que vous faites votre possible pour être heureuse, alors ce devrait être suffisant.

SHIRA, déroutée — J'ai du mal à saisir votre cheminement, votre Altesse.

JAESA C'est simple pourtant. Ce qui vous apportera le bonheur ou le malheur, c'est uniquement votre vision des faits.

Ethrian II - ShiraOù les histoires vivent. Découvrez maintenant