Les âmes flottantes

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J'arpentais, seul, et ce depuis quelques années maintenant, les vents à peine contré par la barrière en bois qui longeait l'immense baie. La parka fermée jusqu'en haut, la fermeture de metal qui frôle le cou et picote froidement ma vielle peau de retraité. Tout les matins à huit-heure trente précise, j'entamais ma marche. Tel une machine programmé que rien n'arrête, je continue, haletant, dans ce froid polaire, ma traversée de l'enfer. Je m'en vais face au vent, tandis que tous les passants me tournent le dos, se réfugiant vers un soleil incertain. Ici il y'avais toujours les mêmes promeneurs. Les bourgeois du dimanche aux vêtements immaculés, se retrouvant trempés comme des oies. Les bonnes femmes et leur gros toutou plein de poils, la langue pendante, la truffe tiède et mouillée, avec une odeur âcre. Et ces même bonnes femmes qui se retournent pour vous sourire, du rouge à lèvre plein les dents avec leur sacs  imitation croco qui brille comme du plastoc. Ah ma Gisèle, ensemble de ces gens là on en riait, mais aujourd'hui sans toi j'en pleurerais. Il n'y' a pas une seule seconde sans que ma pensée se tourne vers toi, on peux bien me parler, je peux acquiescer et rétorquer mais c'est à toi que je penserai toujours. C'est ton image qui est implantée dans mon crâne, ton visage que je vois dans celui des passants, dans le type au nez rougis par l'alcool qui promène son vieux berger allemand, dans le sourire ce cette sudiste longiligne qui à l'air jamais malheureuse, dans ces deux enfants libres comme l'air aux pantacourts ivoires, à leur père aux airs sévères et aux épaules tendues. Je retrouve un peu de toi dans chacun d'eux. Je vois des petits morceaux de toi, un peu partout à travers leurs visages, leurs attitudes, leurs mimiques. Quoi que je fasse, tu es partout, je ne peux me défaire de ton emprise.

Les âmes flottantes Où les histoires vivent. Découvrez maintenant