Bip bip bip. Je vous en pris, faites taire ce bruit insupportable ! Ma tête va exploser ! Où suis-je ?
- Ashley, tu m'entends ?
Oh non ... Je ne connais que trop bien cette voix. Ma mère... Mon exact opposé. Elle est mariée à Robert, alias Rob, son cinquième mari. Et oui, cinq maris et presque autant de divorces. Comme quoi, les chiens peuvent faire des chats.J’ouvre difficilement les yeux pour apercevoir le visage marqué mais parfaitement maquillé de ma mère. Elle est reconnaissable entre mille avec son rouge à lèvre rouge sang et son carré blond.
- Maman ? Qu’est ce que…
- Je t’avais dit que ton mode de vie finirait par t’envoyer à l'hôpital. Je t’avais prévenu mais comme d’habitude, tu n’écoutes rien. Me coupe t-elle.
Ma mère n’a jamais compris pourquoi je m'investissais autant dans mon boulot. Pour elle, travailler, c’est se marier et se faire entretenir par la victime. Les pauvres se laissent berner par son image de veuve éplorée, pleine de bonnes intentions, et ne se rendent compte de la supercherie qu’une fois l’alliance à l’annulaire et le contrat de divorce bien salé sur la table. N’ayant pas envie d’argumenter avec elle, je suis sauvée par la sonnerie de son téléphone, ce qui l'oblige à quitter la chambre. Elle est comme ça ma mère : froide à la limite de l'insensible mais extrêmement bonne actrice. Notre relation n'a jamais éte au beau fixe, ça c'est le moins que l'on puisse dire.
Quelques minutes plus tard, on toque à la porte qui s’entrouvre laissant apparaître un médecin aux cheveux grisonnants. Il m’explique qu’une trop grande consommation de café avait fait rapidement augmenter ma tension artérielle, ce qui avait conduit à une perte de connaissance.
- Vous êtes en train de me dire que j’ai perdu connaissance pendant… un coup d’oeil à l’horloge répondit à ma question silencieuse ...plus d'une demie-heure, à cause de deux cafés supplémentaires ?
- Non. Il répond, catégorique. Cette surdose de caféine a déclenché une crise d’hypertension. C’est un symptôme facilement traitable mais souvent révélateur d’une maladie. Il faudrait faire des tests pour en être sûr.
- Vous êtes en train de me dire que je suis malade ? Je dis déboussolée.
- Ecoutez. Me dit calmement le médecin, en s’asseyant au bord de mon lit. L’hypertension et quelque chose de relativement courant, mais elle touche en particulier les personnes âgées, les personnes en surpoids ou qui subissent un traitement. Vous, vous êtes une jeune femme de 29 ans, active et sans antécédents médicaux lourds alors, je préfère être prudent et envisager les autres possibilités.
Je déglutit difficilement.
- Vous avez dit que prendre…. des médicaments pouvait entraîner ces … crises. Quels genres de médicaments ?
- Des médicaments anti-cancéreux, des immunosuppresseurs, des antidépresseurs voire même de simples anti-inflammatoires si il y a prise sur une longue période. Mais, à la vue de votre dossier, cette possibilité ne vous concerne pas. Je vous incite vivement à passer quelques tests pour trouver l’origine de cette crise. Conclut-il avec son regard sympathique, presque rassurant. J’ai toujours eu plus de mal à haïr les vieux docteurs. Allez chercher pourquoi.
Quelques heures de repos plus tard, je peux enfin sortir et rentrer chez moi, avec en prime un arrêt maladie que je m'empresse de jeter. Une semaine sans travailler ?! Tuez moi tout de suite.
Je n’ai pas revu ma mère depuis son coup de fil. Je ne m’en inquiète pas vraiment. Elle a sûrement dû flairer un autre pigeon à arnaquer.Je me rends donc au travail dès le lendemain. Tous les regards sont tournés dans ma direction. J'ai bien évidemment le droit aux fameux “ Comment va tu ?” , “Rien de trop grave ?” de la part de ces hypocrites de collègues. La matinée se passe normalement même si je soupçonne M. Conrad d'avoir ordonné aux autres de me ménager.
Ce midi, je mange avec Lucie. C’est à vrai dire la seule personne avec qui je m'entends bien ici. La seule personne franche qu’il m’est été arrivé de croiser ici. Elle m’a tout de suite plu. Lors de mon premier jour, je l’ai surprise en train de remballer vivement M. Bennet, le directeur adjoint de l’époque, parce qu’il avait osé lui suggérer d’aller faire des cafés. Résultat : trois jours plus tard, il était dehors. Elle est bien évidemment au courant de l'incident d'hier mais ne dit rien. C'est une sorte de règle qui s'est tout de suite mise en place entre nous, bien qu'elle n'est jamais été citée à haute voix : on ne s'attarde pas sur nos faiblesses respectives.
Quand bien même je me sentais en parfaite santé, je préférais partir plus tôt que d'ordinaire. Mon sac sur l’épaule, mon parapluie à la main... je suis prête ! Je referme la porte et la verrouille quand...
- Ashley ?
Pitié !
- M. Gates. Je réponds en me retournant.
Il a troqué son costume anthracite pour une simple chemise blanche rentrée dans un pantalon noir à la coupe parfaite. Il n’affiche pas non plus son sourire goguenard voire un brin idiot habituel, mais plutôt une mine sérieuse et concernée.
Il s’apprête à parler mais je prends la parole dans l’optique de garder un certain contrôle de la situation, contrôle qui a d'ailleurs souvent tendance à m'échapper en sa présence.- Je tenais à m’excuser pour la situation plus que délicate dans laquelle je vous ai mis hier. Cela ne se reproduira pas. Je veillerais à subvenir à mes besoins en sucre pour éviter toute nouvelle crise d’hypoglycémie.
Par cette phrase qu’à moitié vraie, je m’assure d’éviter toute question sur l’épisode de d'hier.Il reste stoique et me regarde comme si il tentait de lire mes pensées. Son regard me gène et à la fois me captive. Son visage reprend presque instantanément son masque de joueur bené. Il s’approche de moi me forçant à coller mon dos à la porte. Il s’arrête à une cinquantaine de centimètres de moi, toujours en me regardant, une lueur malicieuse au fond de l’oeil.
- Une crise d’hypoglycémie hein ? Me demande t-il suspicieusement. Je hoche la tête pour seule réponse. Ne me mentez pas Ashley, je sais exactement ce qui s’est passé.
À ce moment, je me décompose. Il sait que je lui ai menti. les questions que je me suis évertuée à éviter vont arriver. Le stress s’empare de moi, formant un noeud dans mon estomac. Ethan s’approche encore plus de moi, jusqu’à pouvoir murmurer à mon oreille :
- Ce n’est pas une découverte pour moi, je fais de l’effet aux femmes en général, mais de là à provoquer des malaise ... ça c’est inédit et c’est très, très ...très intéressant.
Il part tout de suite me laissant adossé contre la porte, le souffle court. Je me surprends même à sourire. Mais qu’est-ce qu’il m’arrive ? Pourquoi a t-il cet effet sur moi ? Les colombes ne côtoient pas les pigeons. Et pourtant, une partie de moi ne pouvait s'empêcher de s'intéresser à lui.
VOUS LISEZ
La Rencontre
HumorAshley a tout ce qu'elle a toujours voulu : elle habite à New York, dans un appartement luxueux, et elle a décroché le job de ses rêves. Un seul petit détail vient perturber ce cadre idyllique : elle déteste les hommes. Tous, sans exception. Jusqu'a...