Prologue

48 10 10
                                    

   Tels des étoiles perçant l'immensité nocturne couvrant Archelaus, les douces lumières des Mondes de l'Arbre reflétaient sur les pavés humides.

   Arrivant à toute vitesse en frappant lourdement le sol de leurs bottes d'un acier sombre, une troupe d'archelans en armures escortaient un prisonnier dangereux dans les ruelles sombre de la petite ville d'Hanachi.

   Celui-ci, insultant les soldats qui le tenait fermement, n'avait pourtant pas l'air d'un criminel. Sa douce peau pâle définissant si bien les archelans était en contraste avec ses cheveux blonds frisés typiques des humains. C'était un sang-mêlé, mi-homme mi-archelan.

   « Bandes de racistes ! jura celui-ci. Vous faites ça parce que j'ai des origines de chevalier d'argent, hein ? Vous n'êtes pas mieux, vous, bandes de barbares archelans ! »

   Aucun ne lui répondit. Aucun ne serra sa prise. Aucun ne s'abaissait à ses insultes. Tous savaient qu'une personne aussi maligne pouvait perturber psychologiquement les archelans, déjà si sensibles.

   « Alors vous m'ignorez ? Je ne suis pas assez pur, c'est ça ? Je suis marié et j'ai trois beaux enfants ! Comment pourrais-je les nourrir en prison ? »

   Une archelanne ne put se contrôler plus longtemps. Elle claqua lourdement sa main sur l'épaule du prisonnier, rappelant à celui-ci la légendaire force archelanne.

   « Tu ne fais que mentir ! s'énerva l'archelanne sans recoiffer sa mèche orangée qui cachait son œil droit. Tais-toi un peu ! Avant qu'on ne fasse plus que t'emprisonner !

   - Vous voulez me tuer !

   - Les archelans ne condamnent jamais à mort leurs prisonniers ! », intervint le chef de la troupe.

   Celui-ci regardait le prisonnier avec un regard si perçant que ses yeux roses semblaient lire en lui. De plus, sa longue cape noire couverte par sa chevelure argentée rajoutait à sa prestance.

   Le prisonnier ne pouvait pas répondre. Mais il surpassa ses peurs, comme son sang archelan le lui dictait :

   « Et bien ils devraient ! Le royaume humain le faisait, lui ! Et il n'avait plus aucun criminel ! Dans tous Garin, aucune prison n'existait !

   - En effet, commenta le chef de troupe en lui tournant le dos. Mais c'était le cas car la plupart des criminels étaient dans le gouvernement lui-même, et Silfus en était un bel exemple.

   - Comment parles-tu du Roi immortel !? hurla le prisonnier, perçant à travers le silence nocturne. Aucun de vous ne l'égale ! Que ça soit vos empereurs, vos rois ou vos "présidents" !

   - Pourtant l'immortel est mort avec... »

   Le chef de la troupe fit arrêter celle-ci en relevant le poing, dégainant un espadon aussi grand que lui, qui n'était pas petit...

   Ses six unités firent de même, les reflets des Mondes de l'Arbre illuminant leurs lames longues dressées dans le ciel noir.

   Dans une ombre d'un toit un peu long, une silhouette humanoïde se dessina, le reflet d'une des épées archelannes illuminant le côté droit de son visage de sang-mêlé. Sa pupille rétrécit vivement dès lors que le chef de la troupe archelanne lui demanda de se nommer, mais il l'ignora, avançant lentement vers lui.

   « Si tu ne me dis pas qui tu es, je serai forcé de t'envoyer en prison ! », menaça le chef archelan en pointant son adversaire du long de son espadon.

   L'inconnu l'ignora encore, mais cette fois, il dégaina deux de ses nombreuses épées courtes à sa ceinture. Le chef archelan tenta de l'attaquer, sa longue épée faisant exploser un pavé sous sa force, mais, voyant que son adversaire avait esquivé, il attaqua de nouveau. Sa vitesse était surprenante, prouvant sa race et ses longs entraînements, mais l'inconnu était trop agile.

   Un filet de sang giclât sur le visage de l'archelanne aux cheveux orange, l'aveuglant temporairement. Mais lorsqu'elle passa sa main sur ses paupières, elle vit son chef à terre, mort, deux bras en moins et une épée restant dans son dos.

   Cette vitesse...

   L'inconnu était debout, en face du cadavre, toujours fermé dans un silence oppressant.

   Comme un éclair, celui-ci élimina uns par uns les archelans, évinçant certains à distance grâce à des armes de lancer tout en virevoltant au-dessus de leurs têtes. D'une agilité anormale et d'une efficacité remarquable, l'inconnu décima la troupe, sans aucune égratignure se dessinant sur lui. L'un fut transpercé, deux autres égorgés, une décapitée, et les deux derniers ne furent pas visibles aux yeux du prisonnier, qui se cachait en position fœtale au milieu du charnier.

   Il entendit quelques pas légers arriver vers lui, puis plus rien, le silence complet.

   Curieux, il releva sa tête. Il vit aussitôt la main de l'inconnu baissée vers lui, ouverte à son choix.

   Je suis fou, songea-t-il en saisissant la main accueillante.

   « Pourquoi m'avez-vous sauvé ? », demanda-t-il en finissant de se relever.

   L'inconnu resta muet quelques secondes, mais se décida à briser le silence :

   « Je suis Josshir Hashlek, pour vous servir, avoua-t-il avec un accent étrange. Je suis venu vous libérer car nous avons besoin d'effectif. Alors je vous laisse le choix : Si vous me suivez, vous aurez l'honneur de faire partie de nos ingénieurs architectes et archéologues, mais si ce n'est pas le cas, alors je vous élimine ici et maintenant.

   - Comment savez-vous que je suis un ingénieur ? s'enquit-t-il, étonné.

   - Nous sommes partout, sourit Josshir.

   - Alors je vous suivrez partout ! sourit à son tour le prisonnier, déterminé.

   - Müren Dolk, pouvez-vous me tenir ça quelques secondes ? »

   Josshir lui tendait l'une de ses épées courtes, le sourire aux lèvres. Müren s'exécuta, découvrant qu'elle possédait un reflet verdâtre.

   Josshir sortit quelque chose de sa poche, mais cela s'illuminait d'une lumière bleutée entre ses doigts.

_____________________

   De l'autre côté de la ville, en amont, un vieil archelan cueillait des fruits aux branches des arbres d'ébène.

   Mais il se retourna lorsqu'il vit, sous le ciel ténébreux, une demi-bulle bleue apparaissant en plein milieu de la ville d'Hanachi, d'une lumière azur en extrême contraste avec la nuit noire. La bulle bleue s'agrandit jusqu'à imploser brutalement dans un souffle si fort que le vieillard le ressentit de là où il était.

   Aveuglé et paniqué, l'archelan tentait de s'orienter, mais il ne le put qu'après quelques minutes. La peur au ventre, la frayeur au visage, le vieillard put enfin voir ce qu'il était advenu d'Hanachi, mais il tomba sur les genoux lorsqu'il comprit que l'essentiel de la ville était rasé. Sa femme, ses enfants, ses petits-enfants, et tous ses descendants venait de périr dans l'explosion, ne laissant derrière que des résidus bleus luminescents.

   Mais qui as bien pu faire ça ?

ΛRCHΛE {T.3}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant