Chapitre 13

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Assise devant le miroir au style baroque de la coiffeuse de Lison, j'attends depuis une heure maintenant qu'elle finisse de me boucler les cheveux. Malgré leurs ondulations naturelles, elle a insisté toute la matinée pour sublimer chacune de mes mèches. Face à son extrême bonne humeur matinale, j'ai été obligée de céder. Ainsi, je me retrouve avec la tête de Marie Antoinette – avant le coup de guillotine – costumée de boucles serrées et parfaitement définies. Dans le même temps, Eliott est allé faire le plein d'essence et me procurer un casse-croûte pour ce soir.

Une fois qu'ils m'auront déposée, Lison et lui iront diner chez des amis qui vivent a mi-chemin entre Québec et Montréal. Quant au concert, Adrian m'a donné les instructions pour entrer. Il faut que je me présente à 19h - en même temps que les premiers arrivants - devant l'entrée VIP. D'après lui, il me suffira de dire mon nom aux vigiles et de leur présenter un papier d'identité pour qu'on m'accorde le droit de rentrer. Comme je serai la première arrivant, je pourrais librement me placer au plus près de la scène, dans la fausse de personnes debout. Si mes calculs sont exacts, je devrais rester debout pendant quatre heures, au milieu d'une foule de fan hystériques et surexcités, qui s'entasseront tous les uns sur les autres pour être au plus près de la scène, qui se tiendront chaud et dégagerons des effluves d'odeurs nauséabondes. J'en ai la nausée.

- Si tu touches, je te coupe la main ! me menace Lison lorsque je tente de ramener une mèche de cheveux derrière mes oreilles.

J'obtempère et la laisse parfaire son chef d'œuvre. Elle tresse une partie de mes cheveux à l'avant de ma tête et fait tenir le tout à l'aide d'une énorme barrette en forme de nœud papillon. Quelle horreur, je ressemble maintenant à une petite parisienne bourgeoise qui fréquente les soirées mondaines.

- Alors, qu'est-ce que tu en penses ? Tu es magnifique.

Je ne veux pas la vexer, sa tentative de coiffure partait d'un bon sentiment, alors je lui glisse un sourire entendu à travers le miroir. Non pas que ce ne soit pas beau, mais ce style à la fois guindé et exubérant ne me correspond pas.

- Un sandwich poulet-crudité, une barre de céréales et une pomme, ça te va ? aboie Eliott en rentrant.

- Oui, merci.

Lison me libère enfin pour que je termine de me préparer. Je farfouille dans mes tenues étalées un peu partout par terre afin d'en trouver une appropriée. Si Lison voyait l'état de cette chambre, complètement sens dessus dessous depuis mon arrivée, je crois qu'elle m'étranglerait. Je choisis un jean et un pull, simple et confortable, et revêt mes bottines fourrées. Je parfais le tout d'une touche de mascara et applique une couche d'un rouge à lèvres mat d'une couleur naturelle sur mes lèvres. Eliott et Lison sont prêts et m'attendent à la porte d'entrée de l'appartement. Je me couvre de mon manteau, d'une écharpe, et attrape mon sac, prête à entamer cette soirée. Eliott démarre la voiture et allume la radio. Je manque m'étrangler lorsque I am more retentit. Lison pouffe de rire en voyant ma mine déconfite, mais Eliott se contente de nous dévisager, la situation étant hors de sa portée.

- Je n'ai même pas envie de savoir ce qu'il se passe, dit-il.

Nous circulons jusqu'à Montréal pendant un peu plus de trois et heures et demi. Après tant de temps passé assise dans la même position, j'ai les jambes engourdies et un mal de crâne naissant à cause de la tresse qui me tire douloureusement. La tresse commence à me tirer douloureusement la tête.

De grands immeubles dominent la ville dans laquelle nous pénétrons. Parmi eux se trouve le centre Bell, lieu où se situe l'amphithéâtre accueillant le concert d'Adrian. Le bâtiment est impressionnant par sa superficie, autant que l'est la foule démesurée présente devant l'entrée principale. Eliott avance le long de la façade, jusqu'à trouver un accès plus privé, à l'abris de la marée d'humains trépignant d'impatience. Cette fois, plus moyen de m'échapper, je vais devoir affronter ce concert et ses conséquences. Une fois que j'aurais franchi l'enceinte de la salle de concert, j'aurais la certitude que ce soir, je me retrouverai bel et bien confrontée à la personne avec laquelle je communique virtuellement depuis un mois. Toute sérénité évanouie, je me retrouve dorénavant avec des nœuds dans l'estomac, et un rythme cardiaque frôlant la tachycardie.

This Is Our SongWhere stories live. Discover now