Je sortis de mon état comateux avec difficulté.
Je sentis une douleur diffuse dans tout mon corps. J'avais énormément de mal à me lever et je dus prendre appui sur le rebord de mon lit puis, plusieurs minutes après, je fus enfin debout.
J'essayai de faire quelques pas dans ma chambre et après plusieurs essais j'arrivais à paraître à peu près en bonne forme. Je me décidai à aller dans la salle de bain examiner mon corps. Je pris une lenteur infinie à parcourir les quelques mètres qui me séparaient de ma porte à celle de la salle de bain.
Je mis autant de temps de temps ensuite pour me déshabiller, le moindre mouvement m'était pénible et me faisait terriblement souffrir. Quand je me vis enfin dans la glace, j'étouffai un cri, toute ma peau était parsemée de taches bleuâtres , partout. Tout mon corps en était rempli. Les seuls endroits intacts étaient mon visage, mon cou et mes mains.
Les seules parties apparentes. Il y avait des hématomes encore et encore. J'en avais un énorme sur les côtes, un autre sur le bras, deux sur la jambe droite.
Je me retourni et fondis en larmes quand je vis que dans mon dos, sur ma colonne vertébrale, il y en avait un énorme : bleu, violet et vert. Et tous ceux-là n'étaient que les plus gros.
Je devais au total en avoir plus d'une vingtaine. J'étais assise par terre sur le carrelage dur et froid, ce qui me faisais encore plus souffrir.
Je me souviens de ce carrelage. C'est maman et moi qui l'avions choisi quand j'étais petite. Nous refaisions la salle de bain et nous étions allées ensemble au magasin de bricolage choisir un nouveau carrelage car l'ancien était passé et trop sale.
J'avais tout de suite aimé ce carrelage. Il était bleu turquoise et rayé blanc, les couleurs préférées de maman. Je lui avais montré du bout du doigt et elle n'avait pas hésité, elle l'avait pris.Je m'arrachai à mon souvenir pour me ramener à la réalité puis je retournai dans ma chambre et m'assis sur le rebord de mon lit.
Je tentai de me remémorer avec difficulté ce qui s'était passé. J'avais été tirée du sommeil, appelée puis...
battue. Penser cela me paraissait impossible, horrible.
Mais pourtant si.Tout était de sa faute.
Je me souvenais de ces dernières paroles qu'il avait prononcées, "elle est partie". Était-elle réellement partie ? M'avait-elle vraiment abandonnée ? Et pourquoi ne m'avait-elle pas emmenée avec elle ?
Elle m'avait laissée au gouffre de l'enfer. Avec le diable en personne.
Je voulais aller vérifier ses affaires pour être sûre, peut-être s'était-elle juste perdue, peut-être allait elle revenir plus tard.
Je commençai à me lever mais je pensai qu'il fallait d'abord que je sois sûre qu'il n'était toujours pas là. Je tendis l'oreille, attentive au moindre craquement, au moindre raclement, au moindre bruit.
Au bout de quelques minutes, je n'entendais toujours rien. Je conclus donc qu'il n'y avait personne d'autre que moi ici. Je me dirigeai vers leur chambre, ouvris la porte. Ce que je vis me pétrifia.Tout était sens dessus dessous, il y avait plein de vêtements froissés par terre, une lampe cassée, les meubles ouverts, les draps défaits, rien n'allait.
Qui avait pu faire ça ? Ma mère en partant ? Il ne pouvait y avoir qu'elle, je l'aurai entendu si ça avait été lui. Je me demandais pourquoi avait-elle fait ça.
Je décidai de ranger, sinon, il me le ferait payer. Je me baissai avec beaucoup de mal. C'était à moi de m'occuper de tout maintenant, je n'avais pas le choix.
Je me sentais faible, mal, mais je me mis néanmoins à ranger. Chaque chose après une autre.
Au bout d'une demi-heure j'avais fini et je m'écroulai sur le lit que je venais tout juste de faire. En tombant sur l'oreiller de ma mère, j'entendis un bruit de papier, un bruit de papier qui se froisse.
Je me relevai, interrogée.
Je passai ma main sous l'oreiller et récupérai un papier.
C'était un simple bout de papier, déchiré rapidement sur une feuille blanche. Je le dépliai et reconnu son écriture, petite, fine ronde et penchée. Elle avait inscrit au stylo bleu seulement le mot "désolée", c'était tout.
Désolée ? Elle était....désolée ? Je ressentais une telle rage, une telle haine, que je voulais tout casser. Et puis, c'était quoi leurs problèmes aux gens avec les bouts de papier ? Ils ne pouvaient pas plutôt venir directement, parler, s'excuser ? J'observai un instant le papier sans vraiment le voir et d'un coup, sans que je l'aie voulu, je déchirai le papier en tout petits morceaux.
Pour finir, il y avait une multitude de petits confettis blancs par terre. Je me penchai pour les ramasser et avant que je n'atteigne le sol, je fu prise d'un vertige, tout était flou, tout tournait. Je dus rester immobile plusieurs minutes avant de pouvoir enfin me relever.
Ça faisait longtemps que je n'avais pas mangé, je mourrais de faim. Je descendis dans la cuisine et ne pris pas la peine d'ouvrir le frigidaire, je me jetai sur les pommes qui étaient un fruit à calories négatives, comme ça, pas besoin de s'inquièter de mon poids.
Bon d'accord, et un peu de pain aussi. Et un verre de lait.Je remontai dans ma chambre, j'avais décidé de préparer un sac avec des vêtements, de l'argent, des affaires de toilette et tout un nécessaire de vie au cas où ça deviendrait trop dur ici et que je devais m'enfuir rapidement. Je le cachai sous mon lit. Même me plier en deux me faisait vraiment mal. Mais peu importe, ça allait partir.
Je daigne enfin regarder l'heure, 22h03.
Je mis mon cerveau en marche un instant pour penser au cours que j'avais à mettre dans mon sac pour demain. Une fois l'opération terminée, je poussai un long soupir, me mit en pyjama et allait m'allonger sur mon lit pour enfin dormir. M'allonger me semblait une bénédiction et je sus que je ne tarderais pas à m'enfoncer dans le sommeil.
J'aperçus mon cellulaire, posé sur à côté de moi sur ma table de nuit.
Je fermai les yeux un instant.
Pour réfléchir. Quelques secondes après je les rouvris.
J'avais pris ma décision.
Je pris ma respiration et: "Louison c'est moi. Il faut que je te parle."
