Chapitre 13

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Après une bonne heure à parler de tout et de rien dans la petite Toyota de ma tante, Élodie et moi étions enfin arrivés à Bathurst, vironnant dans les rues du centre-ville.

- Maintenant que nous sommes arrivés, tu vas me dire ce qu'on est venu faire ? dit Élodie, regardant distraitement le décor par la fenêtre.

À chaque fois qu'elle avait posé la question, j'avais détourné le sujet. Maintenant, je n'avais plus le choix...

- Je vais chez moi.

Élodie se retourna vivement vers moi. Je gardai les yeux sur la route.

- Ce n'est plus chez toi, ici. Chez toi, c'est chez ta tante et ton oncle.

- Officiellement, oui... Écoute, je sais que c'est bizarre, mais faut que j'aille chez moi ! Je veux dire, ce qui était chez moi. Pas longtemps. Après, on fera ce que tu voudras.

Élodie hocha la tête dans un soupir, sans insister. J'empruntai une rue de droite, sortant du centre-ville pour entrer dans un petit coin de banlieue. Il ne me fallut pas longtemps pour retrouver la maison de mon enfance ; la sixième maison à droite, les murs en fausses pierres, le toit brun, le garage assorti. La pancarte « à vendre » planter à un mètre du trottoir.

Je garai la voiture sur le bord de la rue, sans entrer dans la cour.

- Je ferais vite, dis-je en détachant ma ceinture.

- Attends une seconde, dit Élodie, prenant mon téléphone qui était toujours dans le porte-gobelet. C'est qui, Carole ?

Elle retourna le téléphone pour me montrer l'écran. J'avais un appel entrant.

- Ma tante, pestai-je. Elle s'est rendu compte...

L'appel se termina et cinq secondes plus tard, l'icône d'un message vocale apparut au coin de l'écran. Je pris le téléphone des mains d'Élodie et déverrouillai l'écran pour vérifier le journal d'appel. Le fait qu'il était sur silencieux nous avait certainement empêchés de nous en rendre compte, mais j'avais douze appels manqués et autant de messages vocaux. Le premier datait depuis tout juste dix minutes après le départ.

- Sabrine à parler.

Je pris plusieurs grandes inspirations, essayant de calmer mon cœur qui s'affolait.

- Tout va bien ? s'inquiéta Élodie.

- Oui, mentis-je. C'est rien. Maintenant qu'on est ici, on ne reportera pas à un autre jour, hein ? T'as une pince ?

Élodie hocha la tête, puis se mit à fouiller à deux mains dans ses cheveux. Elle parvint enfin à trouver une pince qui retenait une mèche rebelle dans sa queue de cheval. Aussitôt retirée, la mèche fit un tour autour de son oreille de façon assez étrange. Je trouvais ça plutôt mignon.

Elle me tendit la pince.

- Fais-y attention, ça vaut au moins cinq cents, ce truc.

- Oui, dis-je en riant. Aussi précieux que toi.

- Heum...

- Je plaisante.

- Tu plaisantes tout le temps !

- C'est ce qui fait mon charme, dis-je avec un clin d'œil. Bon, j'y vais. Si y'a un problème, klaxonne.

- Quel genre de problème ?

- Bah, si y'a un problème, tu t'en rendras compte. Si la police se pointe, par exemple.

- Il faut craindre la police, maintenant ?!

La vie confuse de Jacob LaneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant