13 Dragon Riders (1.05) : Le Complot

Chapitre V : Le Successeur

Kogona projeta un jet de glace qui percuta de plein fouet Beurn. Le roi glissa sur la table jusqu'à passer de l'autre côté, puis il se releva d'un bond, épée en main, afin d'arrêter la prochaine attaque. Le seigneur de Darcroft avait lui aussi dégainé son arme et se préparait à assener de nouveaux coups à son adversaire.

Mais Beurn tendit son bras en avant pour signifier qu'il ne désirait pas combattre. Il reprit rapidement son souffle et, dans un cri affolé, usa d'ultimes paroles afin de tenter de raisonner Kogona :

« Attends ! Ne fais pas ça ! Je pourrai t'aider à t'en sortir, tu verras ! Fais-moi confiance pour une fois !

— Comment le pourrais-je ?! Tu as découvert l'existence du complot, mais tu n'imagines pas quelle est son ampleur ! Tu n'imagines pas à quel point la société Darklidane est corrompue ! Et tu n'imagines pas la puissance de mon maître ! Au moins un tiers de notre armée lui a déjà prêté allégeance en secret, et un autre tiers serait prêt à le rejoindre ! Il m'a promis une place de choix une fois qu'il aurait pris le pouvoir et contrôlerait tout le système d'Orlaïli, mais si je faillis à ma tâche et que je te laisse la vie sauve, il ne me le pardonnera jamais ! Et ni toi, ni moi ne pourraient me faire éviter l'horrible sort qui m'attendrait dans ce cas. Donc, dis-le-moi, pourquoi devrais-je t'épargner ?!

— Qui est ton maître, Kogona ? se contenta de lâcher Beurn, d'un sang-froid à nouveau incroyable. »

Le Seigneur de Darcroft ne lui laissa aucun répit. Des stalactites s'échappèrent de ses mains et assaillirent le roi qui se défendit de son mieux à l'aide de blocs de pierre incandescente. Puis, dès que Kogona commença à faiblir en puissance, trois geysers de lave fracturèrent le sol sous la table et soulevèrent cette dernière en direction de l'adversaire de Beurn. Celui-ci, surpris, la brisa d'un puissant coup d'épée embaumé de magie, mais la violence du choc l'entraîna plusieurs mètres en arrière vers le bassin bouillonnant. Des vagues de magma apparurent alors à la surface et bondirent dans sa direction. À peine eut-il le temps de se retourner qu'il les vit fondre sur lui, et il dut les esquiver par des sauts souples et agiles.

Beurn continua de le harceler ainsi tout en lui projetant des fragments de braise brûlants, jusqu'à ce que Kogona, trop exténué de parer les coups, tomba genoux à terre. Il s'enveloppa d'un cocon de glace compact, tandis que le roi déversait sur lui les entrailles du volcan en un tsunami ravageur. En quelques secondes, la lave se solidifia au contact du froid qui émanait de sa proie, et une épaisse fumée blafarde envahit toute la pièce.

Plus rien ne bougeait. Le brouillard se dissipait peu à peu, tandis que la silhouette du roi s'entrevoyait s'approchant de la boule de basalte renfermant son ennemi. Il s'accroupit à proximité de ce monticule noir et dit doucement :

« Tu ne peux pas me vaincre ici. C'est ma planète, et elle regorge de l'élément que je contrôle. Tu ne peux pas gagner, alors dis-le-moi : qui est ton maître ? »

Soudain, des fissures se formèrent tout le long de la geôle de pierre du seigneur, et des bruits de craquement provenant de l'intérieur se firent entendre. Beurn eut simplement le temps d'apercevoir entre les failles des flocons voleter au-dehors, avant que la roche ne cède sous l'assaut de son prisonnier. L'explosion provoqua un fracas énorme. Les débris volèrent dans tous les sens et Beurn se retrouva plaqué contre la paroi de la grotte, à plusieurs mètres de Kogona qui se relevait sereinement, drapé d'un blizzard tourbillonnant. La tornade blanche se dissipa et, profitant de l'étourdissement de son rival, Kogona façonna un javelot de glace dans sa main avec lequel il s'apprêtait à donner le coup fatal.

Mais, alors que son angle de tir était parfait et que son bras était tendu pour le lancer, il retint son geste au dernier moment. Un éclair d'humanité et d'espoir venait de jaillir en lui. Il ne pouvait se résoudre à achever le roi qui, malgré les apparences et ce qu'il voulait faire croire à tout le monde, y compris lui-même, comptait parmi ses proches les plus intimes. Il laissa choir à ses pieds son projectile, se racla la gorge et avoua d'une voix tremblante :