13 Dragon Riders (1.05) : Le Complot

Chapitre IV : La Salle des Décisions

Beurn, suivi par son mystérieux « jumeau » et son invité apparemment peu enclin à le suivre docilement, pénétra dans un profond couloir, juste assez large pour permettre le passage de trois personnes de front. Les murs étaient garnis de gravures indéchiffrables et les plafonds de chandeliers dont les flammes dansantes se consumaient faiblement. Ce chemin semblait serpenter jusqu'au cœur du volcan et, progressivement, la sensation de pression sous le poids démesuré de la montagne s'accroissait. Les virages et les courbures s'enchaînant à l'infini provoquaient une inquiétante impression de perte de l'orientation et déstabilisaient par leur longueur et leur sinuosité. Les trois hommes traversèrent également plusieurs carrefours, en empruntant à chaque fois le couloir le plus étroit et le plus sombre.

Lors de ce lent cheminement, Kogona eut le temps d'apercevoir la salle du trône par une large porte bien éclairée et mise en valeur. Le fauteuil d'or du monarque dominait au sommet d'une haute estrade encerclée de lave grondante et bouillonnante. Un escalier de pierre tortueux joignait la plateforme à l'entrée illuminée et majestueuse, et toute cette structure gisait au milieu d'une immense cavité naturelle, probablement creusée par une remontée de magma.

Cependant, après avoir vu cette architecture exceptionnelle, un sentiment de claustrophobie commençait à germer chez le seigneur sans qu'il puisse le contrôler, sa mine paraissant de plus en plus nerveuse et irritée. Il lui semblait que les tonnes de roches au-dessus de sa tête écrasaient son cerveau déjà accablé par le stress et le tourment et, à cause de cet engourdissement de l'esprit, il en oublia définitivement sa réserve et ne put s'abstenir de lancer au maître des lieux :

« Pourquoi votre fils a-t-il le droit de nous accompagner, alors que vous avez ordonné à mes soldats de rester dans le Grand Hall ?!

— J'ai une confiance totale en Matoa, cela dit... Ce n'est pas mon fils, déclara-t-il, quelque peu amusé. Il est mon neveu, même s'il n'en demeurera pas moins l'héritier de mon trône après mon décès, vu que je n'ai pas engendré d'enfant pour me succéder. Mais il est vrai que, depuis la mort tragique de sa famille, je le considère comme mon propre fils. »

Le dénommé Matoa acquiesça d'un signe de tête, alors que Kogona se tut tout en l'observant intimement. Visiblement, cette nouvelle avait une fois de plus intrigué le Darcroftien, et il commençait à se demander à quel jeu jouait Beurn : toutes ces énigmes obscures avec lesquelles il avait piqué sa curiosité et éveillé sa stupeur en seulement quelques heures dissimulaient certainement un secret encore mieux gardé, que le seigneur s'engageait à présent à découvrir avant la toute fin de cette entrevue.

Il parut réfléchir encore quelques secondes, avant de revenir à la charge :

« Ça ne répond pas à ma question...

— Si cela peut te rassurer, il ne fera que nous accompagner jusqu'à la Salle des Décisions et s'en ira directement après... Eh bien d'ailleurs, nous y sommes... »

Le trio arriva à proximité d'une voûte légèrement plus basse que le reste du tunnel, marquant l'entrée d'une grotte bien plus spacieuse. Comme l'avait indiqué le roi, Matoa laissa entrer les deux autres hommes en premier, avant de rebrousser chemin.

Mais son visage se raidit tout-à-coup à l'idée de laisser seul son oncle avec son invité. Il jeta un dernier regard par-dessus son épaule, avant de se contraindre lui-même à obéir aux ordres.

Il n'avait aucune confiance en ce Kogona qui se prétendait « Seigneur de Darcroft », alors qu'il n'avait pas la moindre goutte de sang noble, à la différence de son oncle. C'était une manœuvre dangereuse que de convier un ennemi potentiel pour le mettre à l'épreuve, et Matoa s'en voulut d'avoir laissé le roi prendre une telle décision. Il aurait dû insister pour le faire changer d'avis, et s'il arrivait quelque chose, il ne se le pardonnerait jamais...