Quelqu'un poussa la porte de la salle de lecture et je rabattis la couverture du livre. Je ne tenais pas à me faire surprendre en pleine lecture de Contes et Légendes Éteintes. Bonjour la réputation.
J'enfuis précipitamment l'ouvrage au fond de mon sac et l'y dissimulai sous mon écharpe. Je me dirigeai d'un pas calme mais assuré vers la sortie. Du moins c'est ce que je croyais jusqu'à ce qu'une violente décharge m'irradie dans toute l'épaule. Grimaçant de douleur, je tentai de progresser vers le couloir, en vain.
"Ton sac est pris dans la poignée."
Je me figeai. Un silence. La voix masculine répéta encore une fois la remarque, mais je ne bougeai pas. J'étais mortifiée. Je n'osais lever le nez. Je sentis un déplacement d'air sur ma gauche. Il venait de me dépasser pour sortir.
Je risquai un coup d'œil vers la salle de lecture. Elle était déserte. Rassurée, je portai mon regard sur l'objet du délit : la bandoulière de mon sac avait eu la bonne idée de rester accrochée à la poignée de la porte. Et dire que j'y étais presque, pensai-je tout bas.
Je soupirai de honte en me dirigeant vers le terrain de football. Je repérai vite Sarah, plongée dans la contemplation attentive des joueurs de 3e année. Elle passait la majorité de ses pauses déjeuner dans les gradins avec quelques autres filles. Quand elles me virent approcher, elles firent la moue: "Tiens Sarah, ta petite protégée est là". Cette dernière ne broncha pas et garda les yeux rivés sur les muscles bien dessinés du gardien alors qu'il retirait son tee-shirt. Le coach siffla la fin du match.
"Si on pouvait l'avoir en ralenti comme dans les films, je repasserais ce moment en boucle, s'extasia Sarah.
- Qui a gagné? m'enquis-je.
- Aucune idée. Ce n'est pas ce qui nous intéresse, tu te souviens ?"Elle rit de bon cœur en se tournant vers ses amies. J'aquiescai silencieusement. Je ne saisissais pas bien comment on pouvait passer des heures à observer un match sans en connaître le vainceur. Mais si Sarah le disait, alors ça ne devait pas tant compter finalement.
Le ciel s'éclaircit légèrement et mon amie offrit son visage aux rayons du soleil.
"Est-ce qu'on pourrait retourner à l'intérieur maintenant ? demandai-je.
- Ma puce, ce n'est que le soleil, s'amusa Sarah."Ce n'est que le soleil.
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Ayeur
FantasyOn dit souvent que la Lune est une femme. Ce n'est pas exacte. Laissez-moi vous raconter son histoire.