J'avançais à pas lents dans la rue aux abords du lycée, balayant des yeux le trottoir. J'avais perdu la trace d'Henri à l'orée du bois, mais à dire vrai l'idée de m'aventurer dans un milieu humide surplombé d'arbres aux ombres menaçantes ne m'inspirait aucunement confiance. Franchissant à nouveau la grille, j'entrai discrètement dans le hall du lycée. Tout était calme, il n'y avait pas un bruit. Je décidai de profiter de l'accalmie pour monter à l'étage supérieur. Mes jambes me conduisirent jusqu'au bout du couloir, puis je bifurquai brusquement sur la gauche, stoppant abruptement ma trajectoire devant le un casier aux bordures vertes et bleues. En tous points, il était semblable aux autres. Aucun graffiti ni autre décoration n'attirait pas l'attention. Je scrutai les chiffres inscrits en lettres fines : 317. D'un commun accord, mes mains agrippèrent le petit cadenas rond qui condamnait l'ouverture. Un cadenas à code. Je tentai plusieurs combinaisons, mais le cadenas demeura résolument fermé. Je tapai du pied dans un casier plus bas.
"Je suis plutôt doué pour ça ". Je fis volte-face en pensant découvrir un Henri très énervé, mais quelle ne fut pas ma surprise quand je tombai né à né avec Jay. Il fixait le cadenas d'un air indéchiffrable. Je rougis instantanément en réalisant que je venais d'être prise sur le fait. Je cherchais un argument pour me justifier quand Jay prit la parole, penaud : " Celui-là ne m'a pas l'air bien compliqué, je devrais en venir à bout en une minute tout au plus ". Interloquée, je le suivis des yeux tandis qu'il s'approchait du casier 317. En quelques déclics, le panneau s'ouvrit.
Oubliant ma gêne, je m'avançai vivement vers lui avec l'intention de découvrir ce qui se cachait à l'intérieur, mais Jay me retint d'un geste nonchalant :
" Ce n'est pas très honnête de regarder dans le casier d'un autre élève, dit-il, visiblement amusé.
-Ce n'est pas très honnête d'ouvrir des cadenas qui ne nous appartiennent pas, répliquai-je. "
Il sourit faiblement, puis détourna le regard un instant avant de reposer ses yeux sur moi, l'air plus grave : " Qu'est-ce que tu fais là, Gwyn ? ". Mon cœur manqua un battement et je bégayai : " Et toi, qu'est-ce que tu fais là ? Tu ne devrais pas être en classe, ou chez toi, ou... ailleurs ? ".
Il me regarda intensément, comme s'il cherchait à déchiffrer quelque chose en moi. Puis il me gratifia d'un rire franc qui me surprit. Souriant de toutes ses dents, il dit : " Je voulais te rendre ton livre, tu l'as oublié en biologie tout à l'heure. ". Mon regard s'arrêta sur l'objet qu'il tenait depuis tout à l'heure entre les mains : je ne distinguais à peine qu'une partie de la couverture bleue nuit, mais je devinai qu'il s'agissait de Contes et Légendes Eteintes. Je l'emmenais partout avec moi depuis des mois, mais je devais avouer que j'avais la tête ailleurs ces temps-ci.
"Tu devrais y faire plus attention, dit-il sévèrement. Certaines choses sont importantes. " J'attrapai le livre de justesse tandis qu'il tournait les talons, disparaissant déjà de mon champ de vision.
"Mais ce n'est qu'une..." Histoire, finis-je intérieurement.
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Ayeur
FantasyOn dit souvent que la Lune est une femme. Ce n'est pas exacte. Laissez-moi vous raconter son histoire.