Chapitre seize.

240 18 0
                                    

Harry vivait au ralentit. Ou pire encore, il avait cessé de vivre. Ne supportant plus de vivre dans son appartement, il avait emménagé temporairement chez Niall. Il n'avait qu'une chambre pour lui et une étagère dans le placard de la salle de bains mais il ne se plaignait pas. Au contraire, cette situation l'arrangeait. Moins longtemps il était seul, mieux c'était. Il ne pouvait se confronter aux pensées qui hantaient son esprit, c'était encore trop douloureux. Le sang venait à peine de coaguler et il restait la cicatrisation. Longue et douloureuse. Et comme si cela ne suffisait pas, des flashs lui revenaient à l'esprit. Comme ça, sans prévenir. Au travail, pendant son sommeil, quand il était sous la douche. Où qu'il aille, il ne pouvait échapper au fantôme de Maeve. Comme si son cerveau venait jeter du sel sur sa blessure, lui rappelant ses erreurs et le faisant regretter l'amour qu'il portait à la jolie blonde.

Harry soupira en voyant le cadran de sa montre affichant seize heures. Il regarda la file devant lui avancer et il fit de même, Zayn à ses côtés. Quand Niall avait parlé du concert d'Ed Sheeran, le bouclé n'avait pas pu s'empêcher de dire qu'il avait des places. Niall aurait voulu l'accompagner mais il n'avait pas pu se libérer et puis, Zayn s'était porté volontaire. Il aimait bien quelques chansons du rouquin et l'énergie qu'il dégageait sur scène. « Toi aussi, tu serais capable de faire tout ça », avait lancé l'anglo-pakistanais à son ami, un sourire aux lèvres. Harry avait pris sa remarque comme une plaisanterie alors que Zayn était sincère. Il croyait en son ami, même s'il ne l'avait entendu chanter qu'une fois, au collège, entouré d'une dizaine d'autres garçons. Harry s'était détaché des autres sans même en avoir conscience. Souvent, c'était Niall qui l'encourageait à tenter sa chance, à envoyer une démonstration aux maisons de disques ou plus simplement, à participer aux festivals dans lequel il se rendait déjà entant que simple spectateur. Son métier de magasinier lui offrait certains avantages mais jamais le chanteur n'avait voulu en profiter. Il préférait se dire qu'il n'avait pas assez de talent plutôt qu'on le lui dise de vive-voix. Parce qu'il en était persuadé, c'est ce que lui diraient les producteurs.

- Ramène-toi, Haz !

Harry pressa le pas et pénétra avec Zayn dans la salle de concerts. Minuscule. Ou peut-être avait-il le sentiment qu'elle l'était à cause de la foule qui l'entourait, le forçant à se rapprocher de son ami qui comptait le nombre de rangs qui les tenait éloignés de la scène.

- Huitième rang, c'est pas si mal, commenta le brun. Surtout qu'il n'y a que des nanas donc on peut bien voir.

Harry lui sourit en guise de réponse. Il y aurait aussi dû avoir une « nana » à la place de Zayn, à l'heure qu'il était. Ces places, il les avait achetés uniquement pour Maeve. Parce que bien avant d'avoir écouté les chansons du rouquin, elle avait été intriguée par les pochettes colorées de ses albums et la simplicité qui se lisait sur son visage. Il était jeune mais possédait déjà le talent des plus grands. C'était un grand. Et Harry était sûr qu'en achetant ces places, elle serait la plus heureuse des femmes. Mais il lui avait dit la vérité et l'écho de la porte d'entrée qui claque raisonnait encore dans son crâne.

- J'espère qu'il va chanter ses anciennes chansons, j'adore quand il rappe.

« Moi aussi », s'entendit lui répondre le châtain alors que les lumières s'éteignaient et que bientôt, le chanteur apparut sur scène. Et Harry put découvrir un gamin, un homme de trois ans son aîné qui portait un pull à capuches, les manches légèrement retroussées, laissant apparaître des tatouages colorés, à l'image de l'artiste. Il se positionna derrière son micro, sa guitare devant lui, et attendit que la foule se calme pour commencer les premiers accords de son morceau. D'abord, les notes étaient douces, harmonieuses, inondant les parois de la salle pour que tous se taisent et soient envoûtés par le chanteur. Ensuite, il arrêta. Soudainement. Et les accords de « Don't » se démarquèrent de sa précédente introduction. La foule hurla alors que les mains se levaient et que le regard d'Ed glissait sur chaque personne bordant le premier rang.

*

Harry suffoquait. Littéralement. Zayn saisit son ami par les épaules et le guida hors de la foule avant que le bouclé décide de prendre l'air, longeant les murs, s'y accrochant comme s'il lui était impossible d'avancer sans ce soutient. Il avait l'impression de défaillir, que ses jambes n'étaient plus capables de supporter son poids et son cerveau était hors d'état. Les paroles de « Thinking out loud » continuaient de raisonner dans sa tête alors que l'air frais inondait ses poumons. Il s'effondra sur le sol et garda sa tête dans ses mains alors que les larmes coulaient d'elles-mêmes le long de ses joues. Tout sauf cette chanson. Harry avait cru pouvoir faire face, oublier Maeve, oublier son départ et ses mensonges mais ils revenaient. En même temps que la chanson symbolisant son départ. En même temps que cette foutue chanson qui raisonnait dans son appartement lorsque Maeve avait pris la porte. Et il se détestait de trouver que les paroles leur ressemblaient autant alors que leur histoire n'avait existé que dans un univers alternatif. Depuis que la vie avait repris son cours normal, Harry était laissé sur le bas-côté de la route, le pouce en l'air, en attendant que quelqu'un le relève.

- Ca va, mec ?

Zayn posa une main sur son épaule et serra sa prise avant de souffler, d'un ton las :

- Mais cette fille t'a complètement retourné le cerveau...

Et il n'avait pas idée de combien ses mots étaient justes et de l'état actuel de son cœur...

Ripping out the pages.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant