Matinée Chaude

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— Alors, maîtresse, qu'est-ce que je vous sers ?

Un soupir faussement exaspéré m'échappe. J'ai beau dire à Cylia que c'est « Maître » même pour une avocate, elle n'arrête pas de me faire ce coup.

— Quelles sont donc ces manières, esclave ? Ne sais-tu pas ce que ta vénérée maîtresse prend chaque matin ? dis-je d'un air hautain.

Cylia écarquille les yeux pendant quelques instants, puis éclate de rire. Je ris avec elle, fière de mon coup. Toujours souriante, elle s'éloigne du comptoir et va vers la machine à café. Elle en revient avec ma boisson entre les mains.

— Bon alors, Casanova, quoi de neuf ? me demande-t-elle en posant ses coudes sur le comptoir.

— Nous sommes lundi, Cylia...dis-je d'un air las.

— Et alors ? Ce n'est pas à moi que tu vas la faire celle-là !

Oui, ce n'est vraiment pas à elle que je vais la faire.

Je connais cette fille depuis plus de six ans. Quand elle m'a rencontrée à la cafétéria de notre université, Cylia m'a directement proposé de venir, je cite : au Royaume du café.

Face à ma réticence, elle m'a simplement expliqué qu'elle me voyait défiler tous les jours à la cafétéria. Elle a ajouté qu'elle adorait se moquer chaque fois qu'elle voyait ma mine écœurée que j'avalais le café infect de la fac. Cylia a terminé son argumentaire en me disant qu'elle allait changer la vie de mes papilles gustatives si je la suivais. Ce que j'ai finalement fait, mais ça c'était principalement parce que j'ai été charmée par le côté franc de cette brune !

Quoiqu'il en soit, depuis ce jour, nous sommes inséparables. Cylia connaît tout de moi, y compris le nombre exact de femmes avec lesquelles j'ai couché...

— Allez quoi, ça va faire deux semaines que tu ne racontes rien !

— J'ai trop de boulot en ce moment...me justifié-je en portant ma boisson à mes lèvres.

— Oh !

Les yeux de mon amie s'écarquillent soudainement.

Elle va me sortir une connerie...

— Tu t'es enfin casée, c'est ça ?

— Et toi qui disais me connaître !

Mes lèvres s'étirent dans un sourire narquois pendant que je fais un haussement de sourcil douteux. Cylia éclate d'un rire contagieux. J'adore ces moments avec elle. Cela me permet de me détendre avant mes longues journées de travail.

Nous discutons et rigolons depuis un petit moment quand mon amie change encore d'expression faciale.

Attention, elle va lâcher une bombe...

— Eh, Casanova, je crois que je t'ai trouvé une cible !

— La dernière fois que tu m'as dit ça, tu m'as présentée à un de tes clients qui croyait que les avocates aimaient être des maîtresses dans les jeux SM...

— C'était une vengeance et tu le sais...Là je suis sérieuse, toute à l'heure une jeune femme est entrée : grande, brune, regard perçant, visage fin...commence-t-elle à citer.

Intéressant...

Avec toute la discrétion du monde, je me tourne vers la belle que m'a décrite Cylia. Elle a une fière allure, ses longues jambes sont croisées dans un geste subtil. Les talons rouges qu'elle porte ainsi que son chignon strict me font imaginer de belles scènes torrides...

Je n'attends alors qu'une chose : qu'elle relève son visage de l'écran de son téléphone.

Quand enfin cela arrive, le sourire que j'affiche disparaît subitement. L'air a étrangement du mal à entrer dans mes poumons. Ma tête tourne, me donnant l'impression que je vais m'évanouir.

— Oh putain, c'est-elle ! dis-je estomaquée en me retournant vers Cylia.

Souvenirs TruquésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant