Il était une fois... un prince charmant ?

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Une semaine était passée depuis la dispute avec Laurine et elle continuait de me bouder. Ces ados, alors ! Si seulement ils pouvaient être aussi persévérants dans leur travail scolaire que dans leur immaturité...

Ce mardi-là, j'avais pris une après-midi de congé car j'avais rendez-vous chez le gynécologue pour une visite de routine. J'avais 41 ans, plus aucune vie sexuelle et la ménopause qui arriverait bientôt, donc ce genre de formalités me gonflaient plus qu'autre chose. De plus, c'était cher payé pour m'entendre dire à chaque fois : « Tout va bien, madame, à bientôt ! »
Mais bon, comme on dit, la santé avant tout !

J'avais rendez-vous tôt et je fus de nouveau vite dehors ; il me restait donc la moitié de l'après-midi de libre. J'avais fait le ménage ce week-end, je n'étais pas trop en retard dans la lessive et le repassage, et pour le repas de ce soir, j'avais juste prévu de réchauffer des restes. Je ne savais donc pas comment occuper mon temps libre, pour une fois que j'en avais.

Comme j'étais déjà au centre-ville, je décidai de marcher un peu à travers les boutiques. Soudain, je passai à côté d'un petit magasin de chaussures et mon regard se posa sur ma paire de baskets sales et usées. Bon, j'avais trouvé une occupation !

***

Cela faisait plus d'une heure que j'étais dans le magasin et ça devait faire un bon quart d'heure que j'hésitais entre deux paires de chaussures. Ça pouvait paraître idiot et complètement inutile d'y mettre tant d'attention, mais pour une fois que je pouvais me permettre de jouer les fines bouches, d'hésiter et de prendre mon temps pour décider, j'en profitais. Cela m'amusait un peu, en fait ! Mais bon, après vingt minutes à tourner en rond dans le magasin, une fois avec une paire, une fois avec l'autre, je commençais quand même à me lasser. D'ailleurs, le staff aussi semblait m'avoir repérée, car un jeune homme vint vers moi et me demanda s'il pouvait peut-être me conseiller. Je lui montrai les deux paires et il me demanda de les réessayer devant lui.

Mais alors que je me baissais pour enlever la première paire pour essayer la deuxième, mon dos se bloqua soudainement. Je poussai un petit cri en résonance avec la douleur fulgurante qui me mitraillait tout le long de ma colonne vertébrale. Voyant mon trouble, le jeune homme demanda :

« Madame, que se passe-t-il ?

- R-rien, c'est juste... mon dos vient de se bloquer, et... et ça me fait très mal.

- Oh, mince, venez vous asseoir ! »

Il me ramena un siège du rayon voisin et m'aida à m'asseoir. J'étais obligée de me tenir droite comme un piquet. Bon sang de bonsoir de pétard de zut, il avait fallu qu'un truc pareil me tombe dessus maintenant !

« Est-ce que vous avez besoin de quelque-chose, madame ? Il faut que j'appelle le médecin, le samu, quelqu'un d'autre ?

- Calmez-vous, jeune homme, ça va passer. Si vous pouviez juste me passer mon sac à main, ça serait très gentil. J'ai des cachets contre la douleur dedans.

- Bien sûr ! Est-ce que vous aimeriez un verre d'eau ? Attendez... JEANNE ! TU POURRAIS M'APPORTER UN VERRE D'EAU, S'IL TE PLAÎT ? »

Celle-ci répondit positivement et le jeune vendeur s'empressa de me chercher mon sac. Puis il resta debout devant moi, sautillant d'un pied sur l'autre nerveusement. Après dix secondes à sentir son regard inquiet sur moi, j'essayai de lui sourire et m'exclamai :

« Arrêtez de me regarder comme ça, j'ai pas prévu de m'étaler raide morte sur vos boîtes à chaussures, vous pouvez être tranquille ! »

Il rit nerveusement et détourna le regard. Je le détaillai un peu ; pas très grand, un peu maigre, mais de beaux cheveux châtains et bouclés. Son visage était déjà assez mature et ses yeux étaient clairs. Je lui donnais dans les 25 ans et objectivement, c'était un beau jeune homme. Malheureusement bien trop jeune pour moi... La dénommée Jeanne arriva avec mon verre d'eau et demanda ce qu'il se passait. Son collègue lui expliqua la situation pendant que je prenais mes anti-douleurs. Elle aussi se mit à me regarder avec de grands yeux. C'était une femme un peu plus âgée, environ la trentaine, selon moi. Elle avait des lunette, des cheveux blonds et je la trouvais jolie aussi.

Une fois que j'eus pris mes cachets, elle emmena le verre d'eau et retourna à la caisse. J'attendis quelques minutes mais la douleur descendait à peine et mon dos était encore bloqué. Je croyais que finalement, j'allais repartir sans nouvelles chaussures et vite m'allonger sur mon lit à la maison. Sauf que dans mon état, impossible de conduire... Je n'allais quand-même pas demander au jeune homme de me conduire à la maison ! Qui sait ce qu'il ferait ? Et puis, il était au travail, comme sa collègue, et je ne pouvais pas leur demander ça. Mais en même temps, quel autre choix est-ce que j'avais ?

« Hum... dites, jeune homme, est-ce que je pourrais vous demander une faveur ?

- Bien sûr, madame, que puis-je pour vous ?

- Eh bien... je ne crois pas que mon dos se débloquera avant une heure au moins, et je pense que je serais bien mieux allongée à la maison. Seulement voilà, je ne peux pas vraiment conduire dans cet état, alors je me demandais si... enfin, peut-être si...

- Vous voudriez que j'appelle quelqu'un pour vous reconduire chez vous ?

- Le problème, c'est qu'aucun de mes deux enfants n'a encore le permis et que de toute façon, ils sont à l'école à cette heure-ci.

- Et votre mari ? Il est au travail  ?

- Je suis mère célibataire.

- Ah, pardonnez-moi, je ne voulais pas... »

Je lui fis signe qu'il n'y avait pas de problème. Ça me gênait énormément de lui demander de me conduire à la maison, si seulement il pouvait venir lui-même à cette idée, ça m'arrangerait. Soudain, il m'interrogea du regard en se triturant les mains, un peu gêné, et je compris que mon souhait était exaucé.

« Du coup, il ne reste que moi, n'est-ce pas ?

- Comment ça ?

- Ben... pour vous reconduire chez vous ?

- Ça ne vous dérangerait pas trop ?

- Non, non, pas de soucis ! C'est une urgence, après tout !

- Merci, vous me sauvez la vie !

- Oh, il n'y a pas de quoi ! »

Quel jeune homme gentil et poli ! Si seulement ma fille pouvait en ramener un comme ça à la maison...
J'essayai de me lever, mais voyant le mal que j'avais, rien qu'à faire ce geste, le vendeur me fit rasseoir et me proposa de chercher la voiture et de la stationner devant la porte du magasin. J'acceptai de bonne grâce, lui prêtai mes clés, lui décrivis ma voiture et où elle était garée. Puis il partit.

C'est seulement après quelques minutes que je réalisai qu'il pourrait tranquillement me voler ma voiture, que je lui avais donné toutes les clés pour le faire, sans mauvais jeu de mots, et que je devais juste encore espérer qu'il ne soit pas malhonnête sous ses airs de prince charmant...

Il était une fois une mamanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant