Il est à peine six heures lorsque Louis se réveille le lendemain matin; il a à peine fermé l'œil de la nuit, ses paupières sont lourdes, il a mal partout et a l'impression d'avoir passé la nuit sur le quai d'une gare. Ce qui est presque vrai, en fait. Gwen ne lui a pas encore répondu et le cœur du jeune homme se serre : il a besoin de Malory. C'était idiot de la laisser à Gwen, c'était idiot d'aller à Londres, c'était idiot de proposer un rendez-vous à Harry.
La cuisine est exactement la même qu'hier matin lorsqu'il parvient à sortir du lit en constatant que ses jambes semblent le soutenir, la même que celle dans laquelle il a mangé un bol de céréales sans lait en quatrième vitesse la veille pourtant, tout a changé. La neige ne tombe plus d'ailleurs. La neige s'est tue. Elle est morte. La couverture de mousse blanche qui recouvre les rares toits que Louis peut voir depuis sa fenêtre est encore là quoique moins épaisse, et elle est simplement éclairée par les rayons jaunâtres des lampadaires de la rue. Le ciel est noir.
Il n'a pas faim même s'il n'a toujours rien avalé ; les paquets sont presque tous vides de toute façon et il n'est pas sûr qu'il lui reste du jus de fruit. Alors à la place, il allume la douche et attend sous le jet d'eau pour le moment glacé qu'elle chauffe. Il n'a même pas frissonné ; il n'est même pas sûr d'avoir senti la morsure de la température. Les gouttes coulent le long de sa peau sans qu'il n'en prenne conscience. Ses paupières sont de nouveau closes, son esprit est à la fois vide et emplit de pensées qui s'embrouillent et s'emmêlent comme des fils de soie impossibles à séparer. Il ne veut même plus essayer de réfléchir au pourquoi du comment. Il ne veut plus penser à rien.
Et tandis qu'il reste là, sans bouger, à attendre que l'eau devenue chaude redevienne froide lorsqu'il aura vidé le ballon, le jour se lève lentement. Une heure passe sans que le jeune homme ne se rende compte de rien et lorsque finalement, il tire son rideau de douche et jette un œil à l'horloge de la salle de bain, les aiguilles affichent déjà sept heures cinq.
Louis se hâte donc de s'habiller et descend aux Mots en prenant l'ascenseur ; attrapant au passage le gros sweat bordeaux qu'il avait laissé traîner sur le dossier du canapé quelques jours plus tôt. Il parvient à appuyer sur le bouton avec un bras à l'intérieur et le visage caché par le tissu et les portes de l'ascenseur s'ouvrent sur la librairie tandis qu'il en finit d'enfiler son sweat correctement.
Seulement lorsque sa tête émerge, ses lunettes de travers, ses mouvements se stoppent. Gwen est déjà là, il semblerait qu'elle ait ouvert la boutique avant lui avec sa clef utilisable uniquement « en cas d'urgence ». Et la cause en est simple : dans la boutique, des dizaines de bouquets de roses rouges ont été déposés sur chaque surface possible. Un regard dénué d'innocence flotte d'ailleurs sur le visage de la jeune fille lorsque Louis croise son regard mais avant qu'il n'ai pu ouvrir la bouche pour protester ou demander des explications, le livreur arrive avec deux nouvelles compositions qu'il dépose sur le sol faute de place, et fait demi tour sans rien dire.
_Dois-je m'attendre à voir arriver un Tristan en caleçon derrière toi ?
La plaisanterie n'en est pas totalement une d'après les intonations sérieuses que l'on peut entendre dans la voix de Gwen. Et ses insinuations ramènent immédiatement Louis sur terre avec un coup de poing dans l'estomac qui l'oblige à s'appuyer sur l'accoudoir du canapé avant de se laisser tomber à l'intérieur. Aussitôt, Malory, qui était posée un peu plus loin, lui saute sur les genoux et vient se frotter à son papa en ronronnant et Gwen se raidit.
L'élan d'amour du petit chaton brûle les yeux du jeune homme qui se penche en avant pour la câliner. C'est exactement de ça qu'il aurait eu besoin hier soir.
_Louis ? appelle alors Gwen, cette fois inquiète. Qu'est-ce qu'il y a ?
Le livreur rentre à nouveau dans la pièce, attirant l'attention de tout le monde. Il pose deux nouveaux bouquets et jette un œil admiratif à Louis.
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Poisson chat
FanficPropriétaire d'une librairie à Disley, Cheshire, Louis n'a jamais rien connu d'autre que son petit village natal. Obligé d'utiliser un fauteuil roulant lors de ses « mauvais jours » à cause des séquelles d'un accident qui paralysent temporairement s...