Poisson chat

219ème jour

Gwen a tenu à ce qu'ils sortent aujourd'hui. Cela fait trois jours que l'incident à eu lieu et elle refuse que Louis reste une journée de plus enfermé à l'intérieur des Mots sans bouger. Alors elle est arrivée sur les coups de midi avec sa voiture, chose qu'elle ne fait pourtant jamais, et a traîné le fauteuil du jeune homme jusque dehors en faisant fi de ses protestations.

_Je ne peux même pas marcher !

_Tant mieux, tu ne t'enfuiras pas ! Il est temps de prendre l'air !

_Mais je vais bien ! se plaint-il à nouveau quoique le ton qu'il emploie a quelque peu faiblit car il sait pertinemment que c'est un combat perdu d'avance.

Gwen ne répond pas cependant, elle se contente d'ouvrir la portière et de croiser les bras sur sa poitrine avec un air déterminé, lui faisant clairement comprendre qu'il doit s'exécuter. Alors après avoir soufflé de désespoir pour la forme, il lève les yeux au ciel et se hisse hors de son fauteuil afin de s'asseoir sur le siège passager. L'effort a fait glisser ses lunettes sur le bout de son nez et il les remonte d'un mouvement rapide de la main.

_On va où ? il demande une fois qu'elle est installée derrière le volant, son fauteuil impeccablement plié et rangé dans le coffre.

_Quelque part.

_À Camelot ?

Ses mains se figent sur le pommeau de vitesse et elle relève des yeux à demi masqués par une boucle de cheveux qui tombe sur son visage, seulement cela n'empêche pas Louis de voir le regard noir qu'elle lui lance.

_C'est toi qui a commencé, il se défend aussitôt en levant les mains en l'air. Alors, on va où ?

_On va voir Mr. Darcy. Mr. Darcy a toujours les réponses.

Le jeune homme lève les yeux au ciel mais bizarrement, ne proteste plus. Le Park de Lyme se trouve à seulement une dizaine de minutes du centre-ville alors il est assuré d'être rentré pour quatorze heures, pour rouvrir la librairie, et cela lui suffit.

_Et qu'est-ce qu'on va poser comme question à Darcy ?

_On va lui demander si ton Harry en vaut vraiment le coup tiens, qu'est-ce que tu veux qu'on lui demande ? Comment va Elisabeth ?

_Gwen !

_De toute façon, t'es bloqué dans cette voiture Louis et c'est moi qui conduit.

Ils sont donc silencieux pendant la dizaine de minutes que dure le voyage, le jeune homme vexé et pris au piège de sa propre amie, et la jeune femme, décidée à le laisser ruminer et extérioriser son mécontentement autant que bon lui semble.

Lorsque le moteur s'arrête, Gwen sort de la voiture pour aller chercher le fauteuil du jeune homme et Louis se glisse à l'intérieur sans mot dire, le regard toujours fixé droit devant, faisant fi des étendues de pelouses vertes et fleuries autour de lui. Il n'a pas la tête à ça aujourd'hui. Il ne veut pas voir ce qui est joli, joli n'est pas le mot du jour. Gwen verrouille donc la voiture et se tourne vers lui, remarquant qu'il a désormais croisé les bras sur sa poitrine, alors sans se démonter de sa bonne humeur, la jeune femme hausse les épaules et décide d'attraper les poignées.

Le geste a d'ailleurs l'avantage de tirer le jeune homme de son silence et d'un mouvement brusque, il pose lui même ses mains sur les roues pour avancer, laissant les doigts de Gwen se refermer sur le vide.

_Bien, maintenant que tu as décidé de bouger, et si on allait directement au lac ? elle demande, ravie d'avoir obtenu une réaction.

Elle sait bien qu'il n'est pas réellement fâché contre elle et que c'est plutôt le stresse et l'accumulation des évènements précédents qui le mettent à cran. Alors elle se contente de marcher à côté de lui sans le regarder, se référant au léger bruit de roue sur le sentier sableux pour s'assurer de la présence de son ami. Le chemin n'est pas loin et au bout de quelques minutes, la silhouette de bronze de la statue apparaît un peu plus loin dans le lac, fendant l'eau de manière parfaite, exactement comme Colin Firth dans la série. Gwen s'assoit en tailleur sur la berge, juste en face de lui, et l'observe pendant un instant, ignorant l'idiot boudeur à côté d'elle qui n'a toujours pas pipé mot. Louis s'est arrêté à quelques mètres derrière elle mais refuse de relever les yeux de la surface du lac, ses pensées tourbillonnant dans sa tête. L'air frais de ce mois de mars lui fouette le visage mais il ne semble pas s'en rendre compte, trop occupé à réfléchir à des tas de choses et d'autres pour prendre réellement conscience du monde qui l'entoure.