I. 2013 - Masturbation intellectuelle

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— Candy ! Lâche un peu ce torchon et vient nous aider à mettre la table ! crie ma mère en bas des escaliers.

— Deux minutes et j'arrive, promis !

Je referme la porte de ma chambre, m'installe sur mon grand lit aux draps roses et reprends ma lecture. Je connais ce livre par cœur, mais je crois que je ne m'en lasserai jamais.

« — Donc vous allez me faire l'amour ce soir, Christian?

Merde, j'ai vraiment dit ça ? Sa bouche s'entrouvre, mais il se ressaisit aussitôt.

— Non, Anastasia. Premièrement, je ne fais pas l'amour. Je baise... brutalement. » (1)

Je déglutis et passe une main sur ma gorge. Mes doigts descendent lentement et effleurent ma poitrine. Jamais un homme ne m'a parlée comme ça. Ni même touchée comme ça. Faudrait déjà qu'il y en est eu un qui essaie de m'approcher... Demain j'aurai vingt ans et je suis aussi vierge que l'on puisse l'être !

Vingt ans, toutes mes dents et un hymen comme neuf ! Même pas une tentative d'approche, rien ! Le seul baiser que j'ai jamais échangé, c'était avec Pierrot Martinet, à l'école maternelle. Enfin, échanger est peut-être un bien grand mot... Je l'ai coincé entre le toboggan et le bac à sable et j'ai collé mes lèvres sur les siennes. Il m'a poussée tellement fort qu'en tombant, je me suis cogné la tête sur la balançoire.

Depuis, plus rien.

Nada.

Walou.

Je me laisse tomber sur mon oreiller en plumes d'oie et mes cheveux s'étalent autour de mon visage, comme un soleil d'été. Je soupire longuement.

Quand je lis l'histoire d'Anastasia Steele, je me dis qu'il y a de l'espoir. Moi aussi, je vais peut-être rencontrer mon milliardaire arrogant, monomaniaque et dominateur ! Gwen, ma meilleure amie, me dit qu'il n'y a aucune honte à être vierge et que je finirai par trouver l'homme qui me fera sentir femme entre ses bras. « Pas un connard sexy, aussi riche puisse-t-il être », me rabâche-t-elle sans cesse. Mouais... À vrai dire, ça commence à me démanger sévère et je désespère de ne plaire à personne. Je me contenterais volontiers d'un connard sexy. Tant qu'il est habile de ses mains et du reste. Je ne lui demande pas de me faire la conversation, après tout.

Enfin, il aurait quand même le droit de me dire des mots cochons. Je trouve ça super excitant. Quand Christian demande à Ana de jouir pour lui, par exemple. Peut-être que ça décoincerait quelque chose chez moi parce que je dois avouer que même si j'ai des doigts de fée, j'atteins rarement le septième ciel. Bon, soyons honnête, je trouve ça un peu ridicule quand même. Si je dois jouir un jour ça sera pour moi et pour personne d'autre. Mais si un homme peut m'apprendre et me montrer qu'il peut me faire jouir sur commande, après tout, pourquoi pas ?

Je suis sûre que c'est possible lorsqu'on est entre de bonnes mains... Y a qu'à voir l'état dans lequel me mettent les yeux de Gabriel ! Un seul de ses regards enflamme ma culotte, je n'ose même pas imaginer ce qu'il adviendrait de moi s'il me touchait. Ce charmant capitaine de l'équipe de hand de la fac ne me regarde pourtant qu'avec un air dégouté, la plupart du temps. Dans mes rêves les plus fous, je nous vois sur une plage déserte, enlacés, au coucher du soleil. Ses doigts, parcourant mon corps, sa bouche honorant chaque parcelle de ma peau... Mais bon, ça ne risque pas d'arriver, il n'a d'yeux que pour Kelly, sa petite amie officielle. Aucune chance qu'il s'intéresse à moi.

Je ne suis pourtant pas repoussante. Gwen dit même que je suis canon. Ma mère me compare à Claudia Schiffer. Je ne sais pas trop qui c'est. Un vieux mannequin, je crois. Mais paraît qu'elle était belle. Faut croire que le look top model des années quatre-vingt-dix ne fait pas des ravages à notre époque.

Trois petits mots... [TERMINÉE] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant