— Candy, tu es sûre que tu ne veux pas y aller ? me demande Gwen, l'air soucieux.
— Nan !
— Allez, on va bien s'amuser ! renchérit Ashley. Pour une fois que je peux sortir ! Ma mère s'occupe du petit j'ai toute la nuit !
Ça me fait toujours bizarre de me dire qu'Ashley est maman. Je n'arrive toujours pas à réaliser alors que le petit Jason a déjà dix mois !
— Candy ! S'il te plaît ! Ça fait tellement longtemps ! On peut aller fêter ton anniversaire au restaurant, non ? Tu ne penses qu'à ton boulot, il faut profiter de la vie aussi ! Tu n'es pas une nonne !
Je crois que je préfèrerais. Au moins, la foi serait une excellente motivation à l'abstinence. Et en solo j'arriverais quand même à me faire plaisir.
Alors que là, rien. Le désert.
Depuis trois ans, je ne ressens plus rien. Les choses n'ont pas changé. Je suis désespérément frigide.
Alors je me suis plongée à cœur perdu dans mon boulot où j'excelle, heureusement. Mais j'ai tiré un trait sur les hommes et le sexe. Je n'ose même plus fantasmer sur mon voisin, ça me rend trop malheureuse.
— Pour me faire plaisir ! insiste Ash.
Devant son air de chien battu, je n'ose pas refuser une énième fois.
— Pffff, O.K., si vous voulez. Mais on ne rentre pas tard, d'accord ?
Les filles sautent de joie et s'empressent de fouiller dans mes placards pour me trouver une tenue. Une demie heure plus tard, je suis enfin prête et nous partons dîner dans un restaurant, en bord de mer.
Mes amies sont surexcitées et parlent sans arrêt durant tout le trajet. Au moins, ça ne m'oblige pas à entretenir la conversation. Je ne suis pas vraiment d'humeur. Je viens d'avoir vingt-cinq ans aujourd'hui, et à quoi se résume ma vie ? Le boulot et la solitude. Adossée à la portière de la voiture, je regarde le coucher de soleil sur les dunes. J'ai vraiment tout raté, tout gâché.
Aurais-je mal interpréter les consignes de mes marraines les bonnes fées ? Je n'y comprends plus rien. Voilà trois ans déjà que je cherche des signes, de l'aide, une quelconque indication sur la marche à suivre pour comprendre mon erreur et je ne trouve que le vide et le silence.
— Eh oh, Candy ! On y est !
La voix de Gwen me sort de ma torpeur. Je sors de la voiture et suis mes amies jusqu'à la terrasse du restaurant. Quelle n'est pas ma surprise en découvrant tous mes proches réunis. Alex, mon frère, et sa petite amie, Jérôme, mon cousin, Cameron, le mari d'Ahsley, Gino, le copain de Gwen. J'ouvre des yeux ronds en constatant que mon voisin sexy est aussi présent.
— Joyeux anniversaire ! s'exclament-ils en chœur.
Gaspard me sourit et m'indique la chaise vide à côté de lui.
Mon dieu, la soirée va être longue !
— Alors, jolie Candy, heureuse de ta surprise ? me demande-t-il de sa voix chaude et terriblement sexy.
— Oui. Très. Je ne m'attendais pas à ça, dis-je en regardant la carte des consommations, mal à l'aise.
Nos relations se sont bornées depuis des années à quelques conversations sur le palier, un apéro avec les voisins de temps en temps et une longue discussion nocturne, il y a un an, alors que j'étais complètement bourrée et avais perdu mes clés. Je ne me souviens pas exactement ce que je lui ai dit, d'ailleurs. Je me rappelle de quelques bribes, de mes pleurs lamentables, de ses bras rassurants qui me consolaient. Rien de plus. Et rien d'autre ne s'est passé depuis. De toute façon, je me suis forcée à l'éviter le plus possible, il représente tout ce que je ne peux plus avoir.
La serveuse vient prendre nos commandes et les conversations vont bon train. Peu à peu je me détends et je parviens à profiter de la soirée et de mes proches.
— Allez, ouvre tes cadeaux, frangine !
Comme à son habitude, mon frère fait preuve de maturité et de tact en m'offrant l'intégrale d'After, et un énorme gode.
— Depuis que tu as renoncé aux hommes, tu fais peine. Je me suis dit que ça t'aiderait à te détendre.
Tout le monde s'esclaffe, habitué à l'humour lourdingue d'Alex. Près de moi, Gaspard sourit, un peu gêné.
— Alors comme ça, tu es le genre de fille qui aime les connards arrogants qui font jouir sur commande ? me lance-t-il en me faisant un clin d'œil.
Je ris à sa blague mais mon cœur se brise.
S'il savait...
Les autres cadeaux sont plus conventionnels et je suis émue de toutes ces attentions. Ça fait du bien d'être avec eux, finalement. Je ris, je parle, je ne pense ni à ma solitude, ni à aucun jeu de séduction. Je suis moi, tout simplement. Gaspard est passionnant, il connaît tellement de choses ! Des années que nous vivons à côté et je ne savais même pas qu'il était bénévole au Secours Populaire ! Chaque fois que mes yeux se posent sur lui, je sens mon cœur s'emballer. Il m'a toujours plu mais ce soir, je le découvre sous un jour nouveau et je l'apprécie encore plus. Je m'attarde sur ses lèvres fines, je me perds dans le glacier de ses yeux et je me maudis d'être telle que je suis.
Dans une autre vie, peut-être, nous aurions pu nous entendre ? Je sais qu'il n'est pas gay, finalement. J'ai croisé nombre de ses conquêtes au fil des ans. Mais si même avec mes pouvoirs, il ne s'intéressait pas à moi, ce n'est pas aujourd'hui que ça va commencer.
J'avale la fin de mon deuxième mojito d'une traite pour essayer de ne plus penser à tout ça. J'ai eu trois ans pour me faire à cette situation. Je finirai seule. Peut-être avec des chats.
Qui finiront par bouffer mon cadavre.
— Hey, Candy ! Ça va ?
Je dois vraiment avoir une sale tête car Ash semble bien soucieuse.
— Tu n'as même pas fini ton dessert !
— Je crois que j'ai trop mangé. Je vais aller me promener un peu au bord de l'eau, ça va m'aider à digérer...
— Et à décuver ! s'esclaffe mon charmant frangin.
Je le foudroie du regard et quitte la table quand je sens une main saisir la mienne. Je me retourne, lève les yeux et découvre Gaspard qui me sourit gentiment. Je dois avoir l'air soit complètement soule, soit complètement déprimée pour qu'il me manifeste autant de sollicitude.
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Trois petits mots... [TERMINÉE]
HumorLorsque les fées se sont penchées sur le berceau de Candy, elles lui ont fait don d'un étrange pouvoir. Vivant dans l'ignorance de cette capacité hors norme, Candy mène une enfance et une adolescence normales, de petits signes faisant néanmoins peu...