ALONEs

Chapitre 13

Le paysage des bâtisses détruites défile devant mes yeux, c'est assez étrange de ne rien voir d'autre que l'abominable destin qui a frappé les habitants de cette ville. Nous restons très silencieux durant notre voyage, parlant parfois du temps, du désastre que nous observons, d'autres choses comme ça.
Je souris lorsque je repense à Cassie et Rachel qui sont toutes les deux, probablement silencieuses ou bien entrain de se chamailler et de s'avouer leurs quatre vérités. J'aimerais être une petite souris pour voir ce qu'il s'y passe.

Actuellement, je vois bien que Matthew semble énervé par quelque chose, Sam aussi m'étonne par son comportement calme. Il faut dire qu'ils semblent très concentrés, les yeux rivés vers les boutiques. Nous nous sommes donnés comme objectif de trouver un office de tourisme, une mairie ou une librairie pour nous documenter sur la ville et sur Obeditz.
Je jette un regard vers Matthew pour essayer de déchiffrer ses pensées. Mauvaise idée. Car en effet il me regardait aussi, je tourne immédiatement les yeux, gênée par la situation. Sam a sans aucun doute tout vu car il se met à rire en nous regardant l'un après l'autre.

SAM :
- Tu as une copine Matthew ?

MATTHEW :
- Euh non pas vraiment.

SAM :
- Laisse moi deviner, tu en avais avant notre voyage à bord de la navette ?

MATTHEW :
- Ouais on peut dire ça comme ça.

SAM :
- Et toi Ally ?

MOI :
- Moi je ne me souviens de rien alors tu sais ! Et toi alors Sam tu parles beaucoup mais peu de toi !?

SAM :
- C'est que... Oui j'avais une copine qui s'appelait Barbara . Je me rappelle tellement bien d'elle, elle avait des cheveux bruns ondulés, la peau foncée et de grands yeux noirs. Tu sais le genre de fille des îles qui a tout pour elle. Elle était dans le même lycée que moi, je craquais pour elle depuis le début de l'année mais je n'osais pas l'approcher de peur qu'elle se barre en courant. Un jour, j'ai été la voir et je lui ai dit : "Salut Barbara, tu ne me connais sans doute pas ni même mon nom et c'est normal mais j'aimerais beaucoup apprendre à te connaître".

Je suis tellement absorbée par ce que dit Sam que j'en oublie ma peur, notre objectif et la direction que nous prenons. J'écoute c'est tout.

MOI :
- Qu'est ce qu'elle a répondu ? 

SAM :
- Elle m'a sourit et m'a dit de sa belle voix :"C'est d'accord, Sam." J'étais tellement surpris de voir qu'elle connaissais mon nom !  J'ai complètement paniqué et je suis parti en lui disant un truc du genre "euh.. Oui... Salut...".
Le jour d'après, elle est venue me voir après les cours devant le portail, elle m'a dit qu'elle connaissait un petit restaurant tout près de la forêt et qu'elle ne voulait pas y aller seule. Nous y sommes allés le samedi soir, elle avait une jolie robe bleu marine, très simple mais qui lui allait tellement bien. On a discuté toute la soirée et j'étais si bien avec elle. Je l'ai revu tous les jours depuis et après quelques jours je sortais avec elle. Je l'aimais comme un fou.
Ça faisait 10 mois que j'étais avec elle, c'était un jour d'été, elle n'est pas venue en cours ce jour là, ni le jour suivant. J'ai été chez elle, il y avait sa mère que je connaissais bien. Elle m'a ouvert la porte de sa maison et m'a dit de m'asseoir sur le fauteuil, elle m'a alors avoué que Barbara était partie. Elle ne me donnait pas plus de détails et je passais mon temps à poser des questions auxquelles elle ne répondait pas. Je me rappelerais toujours de ce qu'elle m'a dit à la fin :"Oublie la Sam, elle est partie dans un endroit meilleur, Obeditz la protège. Ne l'attends pas, elle ne reviendra pas."
Je n'ai pas compris ce que cela signifiait, jusqu'à que quelques jours plus tard, des officiers débarquèrent chez moi. Ils avaient tous des visages fermés et secs. Ils m'ont ordonnés de les suivre, ma soeur aussi. Ils ne cessaient pas de dire à mes parents que c'était pour nous protéger, Qu'Obeditz nous voulait du bien. Qu'ils nous emmenaient dans un endroit meilleur pour nous.

MATTHEW :
- Donc ils nous emmenaient vers la navette.

Je fronce les sourcils et ajoute :

MOI :
- Comment tu te rappelles de tout ça ?

SAM :
- Je sais pas. Barbara a été mon premier souvenir. Après tout s'est enchaîné et je me suis souvenu de notre départ. Je peux vous dire qu'il serait préférable de ne pas se rappeler de ce moment. Je me souviens surtout du sentiment étrange que j'avais, comme si on me kidnappais. On se regardait tous effrayés. Ma mère pleurait et mon père criait sur les officiers. Ils ont sortis des flingues et ont menacés de s'en servir si on ne les suivaient pas.

MATTHEW :
- Ils ont réquisitionnés toutes les maisons de la ville ?

SAM :
- Je ne sais pas, je ne sais pas comment ils choisissent les personnes qu'ils emmènent.

MOI :
- Par âge ? Il y a peut être une tranche d'âge ? 

MATTHEW :
- C'est possible, par quartier ?

SAM :
- Non, mon voisin avait disparu 2 semaines avant Barbara. A l'école, c'était vraiment étrange, chaque jour des élèves manquaient si bien que le jour précédent notre départ, nous n'étions plus que 12 dans ma classe initialement composée de 30 personnes.

MOI :
- Et personne ne réagissait ? 

SAM :
- Non, on s'inquiétait et on se demandait quand notre tour arrivera.

MATTHEW :
- Vous saviez que vous alliez être embarqués ? 

SAM :
- Oui, un matin, nous avions été convoqués par le maire. Dans la salle communale, il y avait des amis et des parents qui venaient simplement parce que on les avaient appelés. Ils nous avaient annoncé que c'était une réunion d'annonces et d'informations, rien de plus banale. Seulement cette fois ci, le maire semblait froid et apeuré. Il nous a dit que des nouveaux logements étaient construits dans un endroit meilleur. Que les jeunes de la ville y étaient conviés en premiers. Que nos parents nous suivraient et que nous n'avions rien à craindre, un monde meilleur nous attends disaient - ils.
Sauf qu'on s'inquiétait parce que l'être humain est comme ça : Il a peur de l'inconnu et redoute plus que tout d'être loin de ses proches, ses repères et sa vie.