XIX

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Le lendemain, le soleil en se levant, le trouva éveillé. Il se souleva sur son oreiller, et appuyant son front sur sa main, il parcourut d'un long regard sa chère chambre et écouta. La maison était silencieuse, mais ces mille bruits inconnus qui, à la campagne surtout, annoncent le réveil de la nature, s'entendaient dehors.

Ce fut d'abord la cloche du bourg, qui, sonnant cinq heures de sa grosse voix enrouée, fit battre son cœur. Il se rappelait si bien le son de cette cloche, annonçant par des vibrations répétées la venue d'un chrétien en ce monde, ou par des vibrations lentes et prolongées le retour vers Dieu d'une âme qui a accompli son voyage sur la terre.

Enfin le jeune homme pouvait entendre le murmure de la brise de la mer soufflant doucement entre les arbres, et apportant ces senteurs salines si vivifiantes. Comme tout cela épanouissait son cœur !

Il se leva, fit sa toilette, et, ouvrant sa fenêtre, il aspira avec délices les suaves parfums du jasmin et de la clématite, qui encadraient son visage radieux lorsqu'il se pencha pour jeter un long regard dehors. Après avoir contemplé quelques instants dans un muet ravissement ce cher jardin, il se retira de la fenêtre et sortit de la chambre.

Il descendit sans bruit l'escalier et entra dans la cuisine. Catherine n'y était pas encore, la pauvre femme vieillissait et ne pouvait plus être aussi matinale. Baekhyun ouvrit doucement la porte de la maison conduisant au jardin, il en fit deux fois le tour, s'arrêtant devant chaque arbre, admirant l'éclat des prunes vermeilles, les belles poires dorées et les pêches veloutées. Il s'assit sous le figuier et, baissant la tête, se plongea dans une si profonde rêverie, qu'il n'entendit pas les pas de quelqu'un qui s'approchait ; une main se posa sur sa tête, il tressaillit, et, levant la tête, il sourit à Chanyeol.

« Tu m'as fait peur, lui dit-il en lui tendant la main, je vivais tellement dans le passé que j'avais presque oublié le présent. »

Il se leva.

« Quelle heure est-il ? »

Chanyeol consulta son téléphone.

« Six heures et demie, je suis crevé, je dormirai bien huit ou neuf heures de plus... C'est pas trop tôt pour nous mettre en route ?

- Oh ! non, ma tante compte sur nous de très bonne heure, et moi je suis si impatient de la voir ! Tu as vu Sehun, ce matin ? continua-t-il en prenant le bras que lui offrait Chanyeol.

- Ouaip, il dormait comme un ogre, j'ai pas voulu l'réveiller ; il nous rejoindra après.

- Eh bien ! donc, en route, marchons un peu. »

Chanyeol ne se le fit pas répéter, il semblait entièrement remis de ses pénibles émotions de la veille ; jamais Baekhyun ne l'avait vu plus causant et plus gai. Il faisait mille projets, et raconta à son fiancé des traits de son enfance, passée au milieu d'une troupe de délinquants, dont il voulait, disait-il, oublier jusqu'aux noms.

« Il y en a un pourtant que j'veux me souvenir toujours, c'est celui de la femme qui après m'avoir rabâché les leçons de morale chrétienne qu'une mère pieuse avait déjà cherché à me faire avaler, m'a encore aidé, presque jusqu'à en crever, en m'aidant à m'échapper. Elle s'appelait Wendy. Elle-même n'était pas vraiment croyante, comme moi, mais pourtant elle voulait que je prenne un chemin différent. Sans elle, j'n'aurais jamais pu te rencontrer, t'imagines ! Chanyeol sans Baekhyun, horrible. »

Les causeries de Chanyeol avaient ralenti leur marche et ils n'étaient pas près d'arriver. Baekhyun fit part de ses impressions à Chanyeol, qui, oubliant toute pensée personnelle, ne songea bientôt plus qu'au bonheur de son fiancé.

Quand les deux jeunes gens furent arrivés au pied d'un grand rocher, Baekhyun s'arrêta.

« Nous avons encore dix minutes à marcher, mais vois-tu, Chan', il m'est impossible de passer devant ce beau rocher sans gravir son sommet ; quand tu auras admiré le panorama qui va se dérouler à nos pieds lorsque nous serons là-haut, tu me diras si j'ai tort d'être enthousiaste. »

En disant ces mots, il entraînait Chanyeol par la main ; quelques minutes après, appuyés tous deux contre un des fragments de l'immense roche, ils contemplaient, muets d'admiration, le splendide spectacle qui s'offrait à eux.

  En disant ces mots, il entraînait Chanyeol par la main ; quelques minutes après, appuyés tous deux contre un des fragments de l'immense roche, ils contemplaient, muets d'admiration, le splendide spectacle qui s'offrait à eux

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C'était une belle matinée, la journée promettait d'être chaude ; mais à ce moment une petite brise du large ridait en certains endroits la surface de la mer, qui restait unie et transparente.

Près d'eux, sur le sommet de la roche, très découpée du reste, s'épanouissent des lierres splendides, des ronces à larges feuilles, de l'herbe bien verte, et des plantes de toutes sortes, qui garnissent les anfractuosités des rochers.

Toute l'étendue de la côte que le regard admirateur de Chanyeol pouvait embrasser était verte et présentait l'aspect d'une nature riche et fertile, au milieu de laquelle les immenses rochers aux teintes gris rose semblaient les gardiens géants de cette belle végétation.

« Tu comprends maintenant ? » dit Baekhyun, les yeux animés par une admiration que son compagnon semblait partager entièrement.

Chanyeol avait un âme d'artiste et était trop admirateur de nature pour ne pas partager son enthousiasme ; ils seraient restés longtemps sur le rocher, si Baekhyun, s'arrachant comme par force à ce beau spectacle, ne s'était écrié :

« Nous oublions ma tante ! »

L'Orphelin Où les histoires vivent. Découvrez maintenant