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Sa mère l'a accompagné à chaque rendez-vous possible. Après différentes visites, Anatole s'est ouvert à une dame dont la voix lui rappelait celle de la femme qui lui avait demandé d'aller au bord par appel. Sa psychothérapeute veut qu'il l'appelle Hélène.

— Je suis dépressif, se marmonne-t-il en sortant de son troisième rendez-vous.

Le diagnostic l'a confirmé et Anatole a appris de nouvelles informations précieuses sur son état. Il a un adjectif pour le caractériser. Et même si c'est un adjectif qui le repousse, celui-ci arrive à être plus lucide sur sa situation.

Anatole a avoué à Hélène qu'il pense mériter cette maladie mentale. Et Hélène, très étonnée par sa remarque, lui a vite répondu que personne ne mérite d'être malade. Que personne ne mérite de souffrir autant. Que personne ne devrait penser mériter la dépression.

Il lui a raconté pour Lilia, légèrement pour Isidore, et, aujourd'hui, pour l'autre nuit.

« C'est humain d'avoir des remords, des regrets aussi profonds face à tes anciennes actions. Et ça prouve encore plus que tu es humain, parce que tu as de la compassion. Mais tu dois bien comprendre que ce que tu traverses, ça ne peut être mérité par quiconque. Et que la mort, les pensées suicidaires ne font pas partie d'un comportement sain, Anatole. »

Bullshit, pensait-il d'abord sur certaines parties. Mais Anatole s'efforce de penser comme Hélène, même s'il n'arrive jamais à être convaincu totalement. Elle lui offre souvent des pensées trop positives et le brun a tendance aujourd'hui à croire tout ce qui est seulement négatif.

Quant à ces années de harceleur, Hélène est très tranchée sur la question. Elle veut qu'Anatole comprenne que la culpabilité est nécessaire, mais qu'il faut prendre du recul pour mieux analyser son passé et donner une impulsion au présent. Ce qu'essaye déjà de faire le brun. Et ce qu'encourage donc son médecin.

Toutefois, dans tout le progrès qu'il parvient à faire, il ne se sent pas forcément mieux ou moins vide. Juste plus suivi et mieux entouré. Mais à la limite de la solitude, encore pour l'instant. C'est long et périlleux, mais il veut se faire confiance. Il a plus espoir qu'avant.

Sauf pour un sujet qu'il n'arrive pas aborder avec Hélène. Un sujet qu'il n'arrive pas à aborder avec lui-même :

Angèle.

Anatole n'a plus envie de revoir Angèle. Il n'est pas amoureux d'elle, mais le brun était déjà en train de tomber quand elle est partie.

Elle l'a blessée, profondément.

Le brun sait qu'il n'était qu'un pansement, « a rebound » comme on dirait en anglais, mais avec elle, pendant une courte période, il s'était senti compris et moins seul au monde. Elle lui a redonné de l'espoir sans s'en rendre compte, et lui a offert un peu de répit. C'est ce dont il avait besoin et ce qu'il espérait garder pour aller mieux petit à petit. De cette connexion. De leurs sourires. Et de cette envie de se réveiller accompagnée de la vie.

Isidore et Coline ont pensé du mal de leur relation. Anatole savait très bien que c'était mauvais de la voir autant. Mais en prenant du recul, il se rend compte aujourd'hui qu'il était presque bien quand il passait son temps avec la jeune fille.

Mais le message reçu, ce soir-là, c'était comme une trahison prématurée, un deuil à faire pour aucune raison compréhensible.

Parce qu'elle a fait battre son cœur. Vraiment, pendant de courts instants.

Le brun ne comprend pas pourquoi elle s'attache encore à ce point à Selim. Il sait qu'elle est courageuse et lucide. Mais toujours revenir vers celui qui ne veut plus rien, ça lui étranglera le cœur. Et ce Selim perdu qui joue des sentiments, ça l'achève.

Anatole est triste parce que la brune n'a pas eu le courage de le choisir. Parce qu'il était prêt à traverser la peine avec elle. Parce qu'avec Angèle, il avait eu directement l'ambition naïve de se reconstruire.

ZutOù les histoires vivent. Découvrez maintenant