Chapitre 12

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On marchait dans le parc depuis déjà deux minutes. On regardait chacun nos pieds, sans oser se parler.

Je décidai de rompre le silence pour enfin discuter. J'étais très intriguée.

- Du coup... ?

- Promets-moi que tu ne feras, et diras rien. C'est quelque chose de très grave, et je ne veux en rien que tu agisses.

Je m'arrêtai brusquement, inquiet. Pourquoi tous ces compromis ? Était-ce aussi grave ?

- Je te le promets... En espérant que ça ne soit pas quelque chose qui doit être impérativement stopper et dénoncer... soufflai-je.

- Le soir même où j'ai commencé à travailler avec toi, je suis allée au supermarché du coin... J'ai entendu un homme crier, en tirant partout, et c'est d'ailleurs pour cela que je t'ai demandé si tu n'avais pas entendu de balles perdues... Et un homme m'a protégée, et il m'a ensuite donné son prénom, Leach. C'était l'homme qui était recherché par celui qui tirait n'importe comment... Et ce même soir, il s'est pointé chez Leach, et il a été tué. Depuis, Leach vient presque tous les soirs me voir, il sait pas mal de choses sur moi, comme mon travail, mon nom et prénom, ou mon adresse, énuméra-t-elle.

Je fronçai les sourcils, confus.

- Pourquoi venir chez toi ?

- Pour passer du temps, dit-il. Mais aussi pour s'assurer que je ne dirai rien, probablement.

- Et pourquoi ne l'as-tu pas dénoncé ?

- Parce qu'au début, j'avais peur qu'il me tue, et à présent, il est trop tard. Je l'ai vu tuer un homme, puis d'autres hommes dans son enseigne. Il est chef de je-ne-sais-quoi, il ne veut rien me dire...

- Oui, il se préserve, pour éviter qu'on en sache trop sur lui. Puisqu'il a sûrement prévu que tu en parles à d'autres personnes, comme moi... réfléchis-je. Et t'as peur de quoi en le dénonçant ?

- C'est assez égoïste... Mais j'ai peur d'être interdite de faire ce travail, puisque c'est quelque chose de grave. Et j'ai peur d'avoir des années de prison, parce que je n'ai rien dit à temps...

- Il faut que tu le fasses, Maria. Il faut aller le dénoncer... Tu ne peux pas vivre avec ce fardeau toute ta vie... Et il finira bien par te tuer.

- Non, il ne le fera pas parce que...

Elle hésita, plongeant dans ses pensées.

- Parce que... ? la rappelai-je à l'ordre.

- Parce qu'il m'aime... Je crois...

Je ris nerveusement et ironiquement, trouvant ses paroles invraisemblables.

- Un homme qui tue de sang froid ne peut pas réellement aimer quelqu'un, dis-je d'un ton évident.

- C'est étrange, il est très gentil et drôle d'un autre côté... fit-elle en pleine réflexion.

- Oui, je comprends, t'en fais pas. Tu ne veux pas être avec moi parce que t'es tombée raide dingue amoureuse de ce psychopathe sans cœur.

Je partis furax. Oui, j'étais jaloux, et ça se comprenait. Elle devait le dénoncer, mais elle n'agissait pas, parce qu'elle l'aimait... Et je ne pouvais rien dire, puisque j'avais promis de garder silence.

Elle me rattrapa en se positionnant devant moi et posa ses deux mains sur mon torse, les larmes aux yeux.

- Attends... Je ne l'aime pas, je veux juste savoir ce qu'est son travail... Et une fois que je saurai, je pourrai le dénoncer. Pas avant.

- Très bien, et si tu finis pas ne pas le faire, je le ferai pour te protéger. N'oublie pas que c'est un tueur, il n'a pas de cœur, pas assez pour passer ses sentiments avant son business.

Elle hocha la tête.

- Comment sais-tu qu'il t'aime ?

Je regrettais déjà ma question quand elle détourna ses yeux de moi.

- Il m'a... e-embrassée... Deux fois.

Mon cœur s'arrêta un instant, mais je ne montrai rien... Du moins, j'essayais.

- Et il ne veut pas me donner son travail parce qu'il a peur que je le rejette.

Je n'y croyais pas une seule seconde à son excuse. Je pensais plutôt qu'il ne lui disait pas parce qu'il avait peur qu'elle le dénonce. C'était plus probable.

- M'ouais... Fais comme tu veux alors... Mais plus tu tarderas, plus t'auras de risque de te retrouver en prison.

Je la contournai pour continuer ma route. Je ne voulais pas qu'elle me voit avec des larmes aux yeux, ou qu'elle sache que j'étais peiné et touché, voire jaloux. Je ne voulais pas qu'elle me voit faible.

- Michael... m'appela-t-elle en se repositionnant face à moi. Ne m'en veux pas... S'il te plait.

Sa voix s'éteignit, laissant place aux larmes. C'était la première fois que je la voyais pleurer. Je voulais la prendre dans mes bras pour la rassurer, mais ma fierté me l'interdisait.

- Attends, j'ai une idée. Tu as son nom de famille ?

Elle acquiesça en reniflant, à présent curieuse. Alors, sans plus attendre, je me précipitai vers l'établissement, et pris rapidement l'ascenseur avec Maria à mes côtés.

Je toquai à la porte de mon ami Jordan, priant pour qu'il soit encore là. Mon cœur cessait de battre quand je l'entendis dire "entrer."

- Est-ce que je peux utiliser ton ordinateur avec ton logiciel ?

Seuls les agents avaient droit d'avoir ce logiciel dans leur ordinateur pour retrouver des gens de la région. Jordan accepta sans se poser de questions, puisqu'il ne se méfiait pas de moi.

- Je reviens, je vais me chercher un verre d'eau, nous avertit-il.

J'ouvris le logiciel sous les yeux attentifs de ma collègue, ignorant presque mon ami qui avait à présent quitter les environs.

- Son nom ?

- Mackjosin, fit-elle sûre d'elle.

Je tapai rapidement son nom à l'aide du clavier.

- Il n'existe pas. Il t'a donné un faux nom. Il t'aime ? Apparemment pas assez pour te donner son vrai nom.

6h57 [TERMINÉE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant