Chapitre 9 : Epiloguons

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Devant la grande entrée de la Japan Expo, Laeti hésitait. Elle était contente d'y être, bien entendu. Ce grand rassemblement autour de la culture nippone avait de quoi l'enthousiasmer, comme chaque année depuis cinq ans. Et pourtant, il manquait quelque chose, ou plutôt quelqu'un. 

    Les semaines avaient passé depuis les événements. Après son arrestation, Zaé l'avait accusée de l'avoir trahi, et à travers elle la science. Laeti n'avait pas réagi, cela faisait plusieurs années qu'elle lui passait ses extravagances amorales, les élans de son coeur ne comptaient plus désormais, au point de progressivement s'éteindre. Mais tout de même, franchir ce portail sans elle, ça faisait bizarre. 

    Celle qui l'accompagnait dût lire dans ses pensées, puisque l'instant d'après, des lèvres se plantaient sur les siennes. Surprise, Laeti se décolla aussi vite : 

-Eh ! J'étais pas prête ! se plaint-elle avec un demi-sourire. 

-Tu pensais à elle, hein ? se plaint gentiment la délaissée.

-Oui, Alise… Je suis désolée...

-T’inquiète ! But de la journée : te faire penser à autre chose ! Et pour cela, ajouta-t-elle mystérieusement, j’ai une surprise pour toi… 

    Laeti tenta bien d’en savoir plus mais sa petite amie était déjà partie devant, attendant qu’elle la poursuive. 

    Quelle métamorphose ! Oh oui, moi aussi je m’interroge. Au début de l’intrigue, nous avions une Alise dépressive, souffrant de son entourage, portant en elle l’horrible impression de gêner. Au fur et à mesure des chapitres, tout ce joyeux bordel émotionnel s’était intensifié, jusqu’à lui donner envie d’en finir ! Et là, on la retrouve, toute guillerette. Il s’est forcément passé quelque chose. Pour avoir été là quand la police l’a sorti du laboratoire de Zaé, je dois vous dire que je n’en sais pas plus. Elle a eu une longue discussion avec la savante folle une fois au commissariat, mais l’auteur me la cache, le fourbe ! Ensuite, elle est retournée à l’école et ça allait un peu mieux. Elle s’est fait des amies, et des amis. Et, un beau jour, elle a revu Laeti pour rattraper le temps perdu. Bon, je l’admets, je m’en suis allé à ce moment-là. Trop d’amour m’écœure, que voulez-vous ! 

    Et aujourd’hui, c’est un peu elle qui porte Laeti. Comme si leurs rôles s’étaient inversés. 

    Une fois le portail franchi, Alise conduisit son amie à travers les rayons et les allées, passant devant mille et uns stands aux couleurs éclatantes, se glissant sous le nez des groupes et des exposants, traversant sans peine les foules hétéroclites. Le coin manga derrière eux, elles ne jetèrent pas un regard vers la zone jeux-vidéos pour s’engouffrer dans le quartier des indépendants : des artistes en quête d’amour et de gloire. Rien que ça ! Certains avaient du talent, les autres… il n’y avait pas d’autres. Mais là encore, Alise ne ralentissait pas, jouant des coudes et des genoux à la manière d’un footballer américain qui aurait le ballon au creux de son bras, Laeti dans le rôle du corner-back qui tente de ne pas se faire distancer. 

    Ce ne fut que quand elles entendirent une voix résonner que leurs foulées diminuèrent. Sur une immense estrade, un jeune homme haut comme trois pastèques de cinq cents livres tenait le micro et le public en émoi. Laeti ne reconnut pas la chanson, une composition originale ? Les écrans d’informations étaient éteints, impossible de le savoir. Son regard revint au chanteur, une immense couronne ceignait son front et une cape trop grande pour lui ses épaules. On aurait pu le croire encore au collège par sa taille et ses cheveux frisés comme le blé, mais sa voix et sa barbe naissante trahissait un âge plus avancé, situé dans la vingtaine. Un géant s’avança cependant sur la scène, mettant fin à l’envolée vocale du jeune homme. De ce que comprit Laeti, il n’avait pas réservé l’emplacement et se permettait de chanter entre deux spectacles, ce qui était totalement interdit. Il tenta bien de négocier, mais quand votre interlocuteur fait deux fois votre taille, vous filez vite la queue entre les jambes. Et c’est ce qu’il finit par faire. 

    Il manqua par deux fois de se prendre les pieds dans sa cape, et ce fut finalement le petit escalier pour redescendre sur le sol qui eut raison de son équilibre. Une marche, deux marches, trois marches et bam ! Le choc ! Alise se précipita pour le relever, et sa voix quand il la remercia le démasqua : 

-Artuhr ? s’étonna Laeti. 

-Le Roi qui Chante, je te prie, corrigea-t-il en se relevant, avant de reconnaître la voix. Oh Laeti ! Pardon ! Je…

-Je vois que les présentations sont faites, sourit Alise. Donc, Laeti, comme je te le disais : SURPRISE ! désigna-t-elle Artuhr théâtralement. 

-Comment le connais-tu ? regarda-t-elle son amie. Je ne t’ai jamais parlé de lui !

-Je vais faire comme si je n’en étais pas outré, rit Artuhr. 

-C’est un secret, fit Alise, malicieuse. 

    Un secret, hein ? Plus pour longtemps… Plaçons nous du point de vue de l’ex-suicidaire par le pouvoir de la narration, et voyons à quoi elle pense, voyons ce qu’il se passe dans son petit cerveau : 

Alise : Vous êtes sûrs de rien vouloir dire ? 

Olivia : Elle paniquerait si on le disait. 

Lady Hammer : Moi, les grandes révélations, j’ai donné. 

Le Roi qui Chante : Elle le devinera, je lui fais entièrement confiance là-dessus. 

Lemi : Et puis si elle fouille les données de sa nouvelle boîte, elle verra qu’on a pas été supprimé. A elle de le découvrir !

Alise : Bon, bon, c’est vous qui voyez, chers colocataires ! 

    Attendez… A quel moment ils ont… ?

FIN 

    Je parlais ! Ce n’est pas vrai ! Ne me coupe pas comme ça ! 

J’AI DIT FIN

    T’es lourd parfois, tu le sais ?

JE T’AI DEMANDE TON AVIS ?

    Bien sûr que non ! Tu ne me le demandes jamais ! 

ALORS FIN 

    Lourd, et relou. Les deux. Fais au moins ça de manière sympathique. Regarde, je te donne un exemple : 

    "A la prochaine la compagnie ! Au plaisir de vous revoir ! "

    A ton tour. Et ensuite, ça sera la fin. 

AU REVOIR LECTEURS !

    Tu vois quand tu veux ! Je suis fier de toi ! Tu vois : c’est possible de sortir des clichés. 

FIN DEFINITIVE

    Irrécupérable… 

    

    

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