(11) Extérioriser

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AMBRÉLINA

Le jour fatidique était arrivé, celui tant redouté : la compétition. Cela faisant des mois que cet évènement avait été programmé, mais avec tout ce qu'il s'était passé ces derniers temps, j'avais complètement oublié. Maman le tyran avait ouvert la porte de ma chambre, en criant de sa voix haut perchée :

— Bon sang, tu n'es toujours pas apprêté ! Et Arian, vient d'arriver !

J'avais enfouis ma tête dans l'oreiller en ronchonnant tandis qu'elle me suppliait de me préparer, se lamentant d'avoir eu pareil progéniture.

Voilà comment en cet instant, je me retrouve dans un car, écouteurs enfoncés dans les oreilles pour ne plus penser. Toujours aussi énervée contre mon ex-meilleur-ami. Nous ne nous étions pas entrainé sur la chorégraphie depuis ce qui me semblait une éternité.

En arrivant dans les vestiaires, je comprends que cette compétition serait filmé, retransmise à la télévision, avec un jury plus exigeant qu'indulgent. Mon sac de sport balancé sur l'épaule, je me tourne vers Arian, et lui souffle :

— On va devoir improviser, parce que je veux un chorégraphie où je puisses m'énerver, me défouler.

Il le savait, je n'avais pas besoin de préciser. Une heure avant notre passage, nous abandonnons donc notre ancienne démonstration, pour... l'improvisation.

Une heure plus tard, vêtu de rouge et de noir nous nous tenons devant le juges qui nous jaugent. J'ignore les caméras, les regards sur moi, je ne vois même pas s'il y a Sacha. Les projecteurs m'éblouissent.

Lorsque les enceintes crachent la musique, Arian me soulève de terre par les pieds, me propulsant au devant en un poirier, pour de nouveau me jeter à terre. Nous sommes deux boxeurs sur le ring, s'affrontant. Il exécute des gestes rapides, puis lent, je le laisse me contrôler un moment. Sa main empoignant mon visage, me tournant avec force vers lui, je me courbe, pour épouser la forme de son corps. Puis, ses puissantes paumes calées au creux de ma taille, me soulevant. Je ne sais pas par avance quel sera le prochain mouvement.

Il me porte à bout de bras, et je lève en l'air l'une de mes jambes. Arian me repose sur le sol de manière assez sec et brutal, je me réceptionne en m'accroupissant presque, pour finir par m'allonger de tout mon long. Des doigts, j'accroche son pied et me redresse grâce à la pression que j'émets mais il tourne sa jambe avec fluidité, me faisant ainsi rouler. Faisant mine de m'écraser, il m'aide ensuite à me relever.

Son bras contre mes reins, il me plaque fermement à lui m'empêchant ainsi de bouger. Je me cambre en arrière, pour me libérer. De sa main, il soulève ma jambe avant de me repousser. Je m'enfuis loin de lui, pour tournoyer et m'envoler. Faisant des cabrioles pour extérioriser cette fureur que j'ai pour lui. La musique pulse dans mes veines, éclatant ma bulle de haine.

Nous interprétons les sauts parfaitement en même temps. Souffles coupés, nous nous retrouvons face à face, nous jetant l'un sur l'autre pour s'étriper. Je m'arrête à quelques centimètres de lui, d'un pied assuré, il bondit par dessus mon corps tandis que je me plie pour faciliter son mouvement.

Nous continuons ainsi, à tressauter en tous sens en suivant la cadence et en effectuer des gestes compliqués tout en restant en rythme avec l'autre. Nous nous battons sans jamais nous toucher. Mon visage se tort de rage et de douleur, je me laisse emporter.

À quelques minutes de la fin de la musique, je le vois ramper, faisant mine d'être blessé. Alors que c'est celui de nous deux qui a donné le premier coup. Il bascule sur la tête, se remettant debout avec facilité et agilité. Dos à moi, lorsqu'il ne me regarde pas, genoux pliés, je cours vers lui avec férocité. Appuyant tout mon poids sur ma jambe gauche, je passe ma jambe droite par dessus son épaule, lui grimpant à moitié dessus. Il me balance d'avant en arrière, pour me décoller. Ballotter, mes mains glissent sur son corps tandis que sa poigne de fer m'accompagne dans ma roulade arrière. Le jury parait sincèrement apprécier.

Je continue donc à m'acharner sur lui, et lui sur moi. Il m'effleure les pieds, me faisant comprendre que je dois me projetter sur lui. Sans hésiter, je le fais, et, il me rattrape par les mollets. Me retrouvant à l'envers, ma poitrine contre les muscles saillants de son dos.

Nous continuons cette danse mortelle et sensuelle, en extériorisant nos sentiments. Lorsque, enfin, les dernières notes retentissent je le fais rouler sur mon dos pour le mettre au tapis. Alors que je pense que notre chorégraphie est finie, ses doigts se plantent dans ma cheville, m'intimant silencieusement de chuter avec lui. Son geste m'arrête net dans mon élan, et je décide de lui pardonner ou d'au moins essayer. Je me propulse d'un pied, tournoyant dans les airs, pour également finir à terre.

⭐️⭐️⭐️

Ce que j'étais avant toi... (TERMINÉ)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant