Maria

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Maria

Je suis bourrée et quand je le suis, c'est comme si mon cerveau s'éteignait. Je ne comprends rien et j'ouvre mon cœur à tout le monde. Je l'ouvre tellement qu'il y a parfois des choses que je dis en étant ivre que je regrette des années plus tard.

-          José ! Oh putain José ! Qu'est-ce qui s'est passé ?

La voix de Laura me sort de mes pensées. Quand j'essaye de voir ce qu'il s'est passé, je m'aperçois que José est à terre. Je me lève rapidement et je contourne les chaises des autres, tirées en arrière, pour m'approcher de lui. Tout le monde parle au même temps, on n'arrive pas à se comprendre. Heureusement, Abdel a eu le réflexe d'appeler les secours, pas comme nous autres.

-          Putain !

Laura n'arrete pas de jurer. Elle a toujours juré plus que les autres. Je me souviens que mes parents ne l'aimaient pas pour ça. Il y a vraiment des choses qui ne changent pas avec le temps... Elle, c'est vraiment celle avec laquelle je me suis toujours le mieux entendu. On se disait tout.

-          Qu'est-ce qui s'est passé ? Demandai-je sans lâcher mon verre de vin. Je n'ai rien vu.

De là, elle m'explique qu'il s'est levé d'un coup et que tel un fou est tombé en arrière. Mais l'ironie de la situation est qu'il est tombé avec le verre de vin vide de Laura.

-          Il a bu dans mon verre. Pourtant, je pensais contrôler la situation ! Je m'étais promise de l'aider à ne pas boire ce soir !

Je la console en lui disant que ce n'est pas de sa faute.

José toujours par terre, a réussi à ouvrir un œil mais l'a presque immédiatement fermé. Ça se voit qu'il n'a plus de forces. Il tremble de tous ses membres et il semble avoir très froid. Bizarrement, quand je m'abaisse pour lui toucher le front, je me rends compte qu'il transpire.

Je me sens super mal pour lui et le fait d'être bourrée multiplie mes émotions.

Marie qui ne s'était pas encore levée de table, arrive en hâte et s'agenouille également auprès de lui.

-          Tout est de ma faute ! Dit-elle en sanglotant.

Je regarde Laura, Laura me regarde. Je regarde Abdel, il me regarde en retour. On se regarde tous les uns et les autres et il n'y a plus aucun doute sur le fait que cette soirée est un fiasco. Rien ne s'est passé comme on l'imaginait. On avait tous des plans et je pense bien que le plan commun qu'on avait tous étaient de faire semblant d'apprécier d'être là et ensuite de partir le plus vite possible.

-          Qu'est-ce que tu racontes Marie ?

On a hâte de savoir ce qu'elle nous cache mais elle sanglote au lieu de nous répondre.

-          Les secours ne vont pas tarder à arriver, lâche un des serveurs du restaurant.

Les gens assis dans les tables à côté parlent tout bas entre-eux pour qu'on ne puisse pas les entendre. J'essaye de deviner ce qu'ils se disent mais la seule chose qui me vient en tête ce sont des éventuelles critiques.

-          Oh mon Dieu ! Le pauvre ! Crache Yamina.

Elle aussi sanglote et je la comprends car je n'ai jamais vu quelqu'un mal à ce point. Il tremble comme je n'ai jamais vu quelqu'un trembler. Cette scène est digne d'un épisode de Game Of Thrones.

-          Quel sale drogué dit !

Je suis choquée par le ton qu'à employé Maxime mais surtout par ses propos. D'ailleurs, je ne réalise pas tout de suite ce qu'il est en train de dire.

-          Il a toujours tout gâché avec ses addictions de merde ! Des gens comme ça, je vais en rencontrer pleins tout au long de ma carrière.

Mon sang ne circule plus. Le rouge me monte aux joues et je dois faire un effort incroyable pour ne pas lui sauter dessus. J'ai envie de lui arracher les yeux avec mes faux ongles et de lui faire bouffer ses paroles.

-          Tu sais prendre des pincettes toi ? Ca ne fait pas de mal de temps en temps.

Je sens que Laura est toute aussi enervé que moi. Ce n'est pas pour rien qu'on a toujours été copines.

-          Sale con !  

Marie semble peter un câble à son tour. Elle culpabilise mais je ne comprends pas très bien pour quoi.

-          Mais dit-nous ce qu'il s'est passé !

Elle refuse de nous répondre et essaye de nous dire qu'elle le racontera aux ambulanciers. Elle a visiblement honte.

-          J'en ai marre, finit par dire Fanny au moment où une ambulance se gare devant le restaurant. Je suis fatiguée de cette soirée, je suis fatiguée de ma vie. Je suis fatiguée de tout!

-          Moi aussi je pars, réponds Maxime.

Il ne va pas me manquer celui-là ! Il n'a fait que casser le délire de tout le monde ce soir. Surtout le mien. Il m'a fait comprendre que je le saoulais avec mon entreprise. Ce n'est pas de ma faute si j'ai réussi à faire ce dont je rêvais et pas lui.

            Fanny par contre, va un peu me manquer. Enfin je crois. Elle est attachante même si nous n'avons jamais été très proches.

-          Moi je pars avec lui à l'hôpital. C'est à cause de moi qu'il est dans cet état. Je vous expliquerai par message quand on sera arrivés à l'hôpital.

Quatre hypocrites de moins, pensai-je intérieurement.

-          Ne partez pas sans payer, dis-je ironiquement.

Visiblement ma blague ne fait rire personne. Je ne suis même pas sûre que ce soit une blague. J'espère qu'ils ne partiront pas sans payer ! Je n'ai pas envie de payer pour mes personnes qui ont joué un rôle tout au long de la soirée. J'en ai joué un moi aussi, mais ce n'est qu'un détail.

-          Manuel et moi, on mange un dessert et on va finir la soirée dans la boite juste à côté, dit Abdel.  Qui viens ?

Je lève la main pour manifester mon envie de les accompagner.

-          Je viens, lâche Yamina.

-          Moi aussi, continue Laura.

-          Yep ! Finit Lucas.

Joana est la seule qui reste assise sans parler, je pense qu'elle a compris qu'elle joue très mal la comédie. On la fixe et elle finit par accepter de venir.

-          Mais je ne reste pas longtemps !

Ça sera l'occasion idéale pour mettre les points sur les « i » avec elle. Et avec le reste du groupe aussi d'ailleurs. Autant moi, je n'ai rien inventé, autant j'ai l'impression que tous les autres ont menti sur quelque chose.

Les gens de ce groupe ont toujours été comme ça. Ils se sont toujours sentis obligés de mentir pour se donner un genre. Il n'y a rien de compliqué dans le fait de ne pas s'inventer une vie.

Les Douze (NOUVELLE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant