18 - Intimité

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- Donc tu es en train de me dire que si je te laisse entrer dans ma chambre c'est comme si je te laissais entrer dans ma tête ? dit Mathéo lorsqu'il m'ouvre la porte d'entrer de chez lui.

- Non, je dis juste qu'une chambre est l'endroit le plus intime qu'on ait et que tu dois vachement me faire confiance pour me laisser y aller.

- Ou je n'ai jamais pensé à ça ?

- Donc j'en déduis que tu ramènes dans ta chambre toutes les personnes que tu rencontres ?

Mathéo s'arrête après avoir allumé la lumière dans la cuisine ouverte sur le salon. Dos à moi, il lève la tête et la tourne pour me regarder par dessus son épaule sans se tourner complètement. Il fronce des sourcils, une main posée sur le plan de travail, toujours les clés de voiture dans sa paume et finit par se tourner entièrement vers moi.

- Non. Mais j'hésite particulièrement à te laisser entrer dans ma chambre maintenant que tu m'as dit tout ça.

- Et bien..., je me déplace dans la pièce en essayant de paraître légère comme une plume. Nous pouvons très bien rester là jusqu'à ce que tu me ramène chez Rachel.

- Sauf si j'ai quand même envie de te dévoiler mon intimité.

Je m'immobilise directement dans ma démarche légère et fluide pour analyser ce qu'il vient de me dire. Soit j'ai un esprit très mal placé, soit j'ai un esprit très mal placé. Dans tous les cas je ris comme une baleine depuis qu'il a sortit cette réplique. Je reprends mon calme quand je croise son regard qui me demande pourquoi je rigole. Je prends une grande inspiration et tente de parler sans croiser une nouvelle fois son regard pour ne pas me remettre à rire comme une perdue.

- Faisons comme si je n'avais rien entendu et restons dans cette jolie cuisine, dis-je en passant la main le long du meuble de cuisine. 

- Pourquoi tu ris comme ça ? 

- Bah, pour quelqu'un qui affirme vouloir y aller doucement, tu es très explicite dans tes paroles.

Il fronce une nouvelle fois des sourcils et éclate de rire jusqu'à se plier en deux en se tenant au bord du plan de travail. Il comprend enfin ce qui m'a traversé l'esprit.

- Oh Iris ! Je voulais dire que j'étais prêt à t'ouvrir la porte de ma chambre et que je n'avais pas peur de te dévoiler mon intimité dans ce sens pas dans celui auquel tu pense ! il rit encore.

Voilà, maintenant je passe pour une fille avec des idées tordues. Génial. Est-ce que je me sens bien ? Oh là non. J'étais pas prête à lui dévoilé cette partie là de moi encore. Il va me prendre pour une perverse et je ne pourrais clairement pas nier. En plus, il se fout de ma gueule maintenant. Ah non mais c'est gé-nial. Je baisse mon regard vers ma jupe et la lisse dans des gestes longs et lent. N'importe qu'elle distraction est bonne à ce moment précis. J'entends les pas de Mathéo se rapprocher et ses deux mains attraper les miennes, crispées et limite moites. Il serre mes doigts dans les siens puis les relâche pour relever mon menton comme dans ces films à l'eau de rose. Ses yeux ambres sérieux se plongent dans les miens, fuyants.

- Hey !, dit-il en rigolant. Excuse moi de rire j'aurai compris la même chose que toi si tu m'avais dit ça !

Il me lâche totalement et s'éloigne dans la cuisine en ouvrant les placards tout en inspirant et expirant profondément pour arrêter de rire.

- Tu as faim ? Parce que moi je meurs de faim.

- Je n'ai pas tant faim que ça mais...

- Tu veux quoi ? On a des chips, des gâteaux apéros, des gâteaux sucrés...

- Le royaume de la mal bouffe..., je marmonne.

- Ma mère s'occupe des légumes, moi je m'occupe du sucre, du sel et du gras.

- Et tu ne prends pas un gramme, ça me sidère.

- Je me défoule en contrepartie, dit-il en haussant les épaules. On a du pop corn sucré aussi.

- Vas pour le pop-corn. 

- Comme ça on pourra le manger en regardant un film, dit-il.

- Oui.

Il s'affaire à sortir un sachet de maïs à pop-corn de sa boîte et le met dans le micro-onde. Il met le temps à cinq minutes et lance l'appareil qui s'allume et tourne dans un bruit de fond. Adossé au placard, il me regarde de ses yeux malins et doux.

- Je t'ai dit que j'étais content tu aies décidé de venir à ce bal ?

- Hum..., je pince les lèvres en faisant mine de réfléchir, oui je crois, je finis par lui répondre.

Il sourit et ses yeux disparaissent sous ses paupières presque fermées. Je souris moi aussi et je me demande encore comme un gars si gentil, si beau et si doux s'est un jour dit "je vais aller lui parler à elle". Autant je ne croyais pas à la bonne étoile avant autant là, j'ai envie d'y croire. J'ai peut-être enfin le droit d'avoir quelque chose et d'être avec quelqu'un de bien. On se regarde en souriant comme une belle paire de niais et la sonnerie du micro-ondes nous fait tous les deux sursauter. Il rit, passablement gêné de se faire surprendre comme ça et se tourne vers le micro-onde d'où il sort le sachet de pop-corn éclatés. Il l'ouvre mais fait un bond en arrière en poussant un gémissement. Cette andouille a laissé le nez au dessus du paquet alors que toute la chaleur en sortait. Je rirai volontiers mais mon cerveau préfère m'inquiéter et entrer dans le cuisine pour voir si Mathéo va bien.

- Quel con ! il marmonne en se tenant le nez.

- Brûlé au deuxième degré par des pop-corn faut le faire, je me moque un peu de lui.

Il plisse le nez tandis qu'il fait genre qu'il rigole à ma blague et je prends sa main pour la retirer de son nez et inspecter moi-même son nez rouge mais intact. Je prends une feuille d'essuie-tout que je laisse mouiller dans de l'eau froide et le lui pose sur le nez.

- Ça devrait passer en deux minutes. Ne fais pas ta chochotte.

- Ça fait mal !

- Temps que ta peau ne se décolle pas, tout va bien.

- Ma peau peut se décoller ? il me demande, ahurit.

- Mais non ! je ris amusée de sa naïveté.

Il ronchonne pendant que je verse les pop-corn dans le saladier qu'il a sortit pour ça et me tourne vers lui en en mettant deux dans ma bouche.

- J'ai beaucoup trop faim pour ne manger que des pop-corn je me fais un sandwich t'en veux un ?

- Si tu mets de la tomate dedans ça me va.

- Même de la salade si tu veux.

Je ris et lui tape dans la main.

- Ça me va. 

Il semble heureux de ma réponse et retire sa veste avant de se laver les mains. Un mec concerné par son hygiène ? Ça me va aussi. A 100% même. Il ne me laisse rien faire du tout donc je suis posée sur une chaise à le regarder faire des sandwich comme si c'était des plats gastronomique. Il coupe avec précision tomate et étale avec tendresse du fromage frais. Soit je me faisais une image carrément déformée des hommes en général en me basant sur mon père, mes grands-pères ou les mecs dans les films mais je ne pensais pas qu'un homme puisse être si attentionné et doux envers un sandwich. Ou alors c'est juste parce que je suis là, ou qu'il y en a un qui est pour moi. Il mettrait tout le soin dont il est capable pour me faire un sandwich.

Rien que d'y penser, mon cœur fond comme glace au soleil. Il peut être possible qu'il veuille juste faire les choses bien: pour moi. 

B.I.G (Belle Intelligente et Gracieuse) [En Pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant