Huitième Brouillon

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David était déjà couché et ma mère n'avait même pas prit la peine de manger. Elle s'était directement installée sur la chaise en face de la mienne et avait joint ses mains sur la table. Elle me regardait droit dans les yeux, la mâchoire serrée et le visage impassible. Je triturais mes doigts sous la table en mordillant ma lèvre inférieure sous la pression qui pesait dans la pièce. Elle portait encore ses talons que j'entendais taper près de mes pieds et son sac était posé négligemment près nous, seul son manteau avait été soigneusement rangé. Cet échange de regards m'avait paru durer une éternité et je cherchais encore la raison de tout cela. Je n'avais rien fait d'autre que de parler à mon frère. Mes parents avaient cette fâcheuse habitude de faire une montagne de tout.

-Où est l'enveloppe ?
-Dans mon sac.
-Donne la moi.
-Non.

La main de ma mère frappa violent la table m'arrachant un bond de stupeur. La paume de sa main était rouge me laissant deviner la douleur qu'elle pouvait ressentir.

-Pourquoi je ne peux pas parler à Simon ?
-J'ai pas à me justifier, je suis ta mère tu m'obéis, c'est tout !
-Simon est mon frère !
-Ton DEMI frère ! Cria-t-elle.
-Alors dans ce cas j'arrête de m'occuper de David puisqu'il est...
-Tais-toi !

Une fois encore sa main frappa la table mais cette fois ma mère se leva de sa chaise.

-Je veux cette enveloppe Sibylle. Tu vas aller me la chercher et j'appellerai ton père pour lui dire que tu as parler avec Simon.
-C'est ridicule. Vous êtes ridicules ! Si je suivais vos règles Simon n'aurait même pas pu te transmettre cette foutue enveloppe ! M'énervai-je en la sortant de mon sac.
-Tu ne te rends pas compte de ce qu'il a fait !
-Moi je sais pourquoi il l'a fait.

Son regard se planta droit dans le mien puis elle se saisit de l'enveloppe et reprit place face à moi.

-À l'avenir, si Simon veut te contacter je veux être mise au courant.
-Ouais compte la dessus. Je jouerai pas les intermédiaires. Si tu veux parler à Simon, appelle-le.
-Demain j'appelle ton père, il viendra te chercher et vous aurez sûrement une discussion. Ne viens pas chez moi si c'est pour agir comme tu le fais.
-Attends c'est une blague ?

Elle ne prit même pas le temps de me répondre, elle prit son sac et l'enveloppe, me tourna le dos et partit dans sa chambre sans rien rajouter de plus. Cette histoire était beaucoup trop ridicule à mon goût mais puisqu'elle le prenait comme ça, je ferai en sorte de voir Simon autant que possible.

À dix heures le lendemain mon père m'attendait en bas de l'immeuble, ma mère avait dû l'appeler dans la nuit pour le prévenir mais je ne savais pas qu'elle voulait que je m'en aille aussi vite, ce qui, d'un côté, me brisa le cœur. J'avais prit mes affaires sans lui dire au revoir et étais partie avec mon père qui garda le silence tout le trajet faisant monter en vitesse grand V mon anxiété. Je me demandai ce qu'elle avait raconté car ma mère avait l'extrême fâcheuse habitude d'en rajouter et mon père était très naïf. Il sortit mon sac de la voiture et je le suivis au pas ne sachant si je devais engager la conversation la première ou bien attendre mon sort bien sagement. Jusqu'à ce qu'il retire ses chaussures et son manteau, mon père n'avait toujours pas ouvert la bouche et je restai prostrée devant la porte d'entrée, en le regardant.

-J'ai jamais aimé faire la leçon une deuxième fois. Fit-il d'une voix calme. T'es mon unique enfant et je ne veux pas que tu tombes dans les magouilles de Simon. Mais t'as un esprit de contradiction et tu l'aimes. T'interdir de le voir a été une erreur. Ta mère ne veut rien savoir mais tu as le droit de le voir. Je veux juste être au courant.
-C'est tout ? M'étonnai-je.
-Il a le droit de venir ici mais seulement quand je ne suis pas là.
-Papa, sérieusement ?
-Ton sens de la famille va bien au-delà des liens du sang. Tu aimes David et Simon c'est incontestable. On a pas le droit de t'empêcher de le voir.
-Je m'attendais réellement à ce que tu me hurles dessus.
-Ta mère m'a appelé hier soir et j'ai réalisé pas mal de choses. Elle n'avait peut-être par raison sur tout. Avoir mit Simon à la porte est la plus grosse erreur qu'on ait faite mais la sienne est vraiment trop important pour une sanction banale, seulement, il reste son fils... Notre fils.
-Tu serais près à reprendre contact ?
-Il faudra qu'il montre qu'il a changé. Et là, sûrement je ferais un pas vers lui.

Ça me faisait déjà énormément de bien qu'il réagisse de la sorte vis-à-vis de Simon et faisait grandir l'espoir en moi de pouvoir voir mon frère ici plus souvent.

Linked - Tom HollandOù les histoires vivent. Découvrez maintenant