HOT CHILI - saison 5

S05 - EP 02 ● part IV

ÉPISODE 122 - (partie 4/11)

Nuit du réveillon, 25 décembre – Balmer.
2 h 18.

— Bonsoir, Vince.

Vince ne reconnut pas la voix au téléphone. Son écran affichait pourtant le nom de son petit-fils. La joie de recevoir un appel de Rudy, la nuit de Noël, s'émoussa.

— Qui êtes-vous ? Pourquoi m'appelez-vous du téléphone de Rudy ?

Son inquiétude soudaine lui crispa l'estomac. Il songea à Natasha, censé partager la compagnie du garçon. L'inconnu déclara.

— J'ai le portable de votre petit-fils, et je m'en débarrasserai après cet appel.

— Qu'est-ce que ça veut dire ? Si c'est une plaisanterie, elle est de mauvais goût !

— Je sais que vous n'êtes pas homme à plaisanter. Et je vous informe avec le plus grand sérieux que votre petit-fils a été enlevé.

— Vous vous moquez de moi ?!

— Loin de moi une telle idée. Je relaie une information, qui, à mon sens, vous sera utile.

L'éclat de voix de Vince interrompit toute activité dans le grand séjour. Les discussions animées cessèrent. Les plus jeunes, rassemblés sous les deux gros sapins flanquant la cheminée, mirent une pause au massacre du papier cadeau. Tous savaient reconnaître le ton coléreux de Vince et nul n'appréciait le contrarier davantage. Du moins, à partir d'un certain âge.

Dans les bras de sa mère, Eliel gazouillait avec un de ses cadeaux. Il boudait le sommeil à cause de la frénésie festive du manoir. Son grand-père, James, sonda son frère du regard. La question flottait dans la pièce. Qu'est-ce qui ou qui osait contrarier Vince en ce jour de fête ?

— Natasha s'est-elle enfin décidée à rentrer ? tenta-t-il.

C'était un comble de manquer le réveillon, tradition familiale depuis des lustres. Les enfants, qui nourrissaient l'espoir d'être gâtés en cadeaux de leur grand-tante, avaient appris avec déception sa disparition dans la matinée. Quelques heures plus tard, un appel de Jonathan leur annonçait que Madame promenait carrosse à Nior. De toute évidence, Madame vivait sa vie.

— Mes petits-neveux ne pleureront pas mon absence un Noël, alors que mon petit-fils ne m'a pas eu pendant dix Noël, avait-elle rétorqué.

De huit à dix-sept ans, Rudy avait passé ses réveillons loin du manoir. Il était hors de question que le Noël de ses dix-huit ans renfloue ce désolant palmarès. De toute manière, en son absence, Humfrey, le maitre d'hôtel, chapeauterait les festivités avec expertise. Les uns n'avaient pas accueilli la nouvelle de bon cœur. Les autres lui avaient demandé de rentrer avec Rudy. Madame avait refusé.

— Je m'amuse comme une folle. Ne m'attendez pas pour la buche de Noël, je ne rentre pas de sitôt. J'ai une parade et un concert de rock à honorer !

Laissant les siens tantôt choqués, tantôt envieux, Natasha n'avait plus fait signe de vie. Même Jonathan, pourtant surbooké, avait eu facetime avec le reste de la famille, à l'heure du dîner et du partage des cadeaux. Mais vu le teint livide de Vince, James ne parierait pas sur Natasha, à l'autre bout.

— Que voulez-vous ? gronda Vince. Si c'est une contrepartie financière, vous en aurez autant que vous désirez. Il vous suffira d'aligner autant de zéro qu'il vous plaira derrière un autre chiffre.

La tension gagna soudain l'audience. Mais Vince n'était pas enclin à soulager leur trouble. L'inconnu renifla :

— Tant de suffisance... Ne vous donnez pas ce mal. Voyez, je ne demande aucune rançon. Il est des choses en ce monde qui sont inestimables. Elles n'ont pas de prix. Comme la vie d'un être humain, par exemple. Je m'assurai simplement de vous dire de ne pas l'attendre ; Rudy ne rentrera pas à la maison. Joyeux Noël !