1- Le reveil

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~ Près de Bayeux, Calvados ~

- Rappelez-moi pourquoi nous devons sortir de ce roncier cet individus sans âge, râle un vieil homme grisonnant à la longue barbe soignée.

- Pour pister la sorcière pardi, répond un autre plus jeune et brun.

- Mieux, à l'heure qu'il est, elle ne dois plus être loin de nous, continu un cinquantenaire dont les cheveux et la barbe naissante gardent encore des traces rousses.

- Mais on ne sais même pas où elle se trouve actuellement, reprend le vieillard de sa grosse voix rauque.

- Trêve de bavardage et mettez vos capuches, coupa une femme aux visage fin mais dont l'expression ne donne pas envie de la contredire.

Ils s'exécutent sans sourciller et suivent la dangereuse demoiselle aux étranges pupilles blanches. Un corps fin, des cheveux rasés, elle se déhanche avec élégance en emportant dans son passage le reste du groupe pour terminer son chemin près d'un roncier aussi haut que large et dont certaines ramifications peuvent mesurer plus d'un mètre de diamètre.
Il trône au milieu d'une grotte, dans une salle où les stalactites et les stalagmites sont si anciennes, qu'elles forment des arches et des colonnes aussi fines que si elles avaient été sculptées par les meilleurs artistes qui n'aient jamais existé. La pièce, illuminée par de simples torches, brille de milles feux et seul cet amas d'épines pointues contraste par sa noirceur immaculée.

- Mais comment défaire cet... chose, demande le plus jeune de la bande.

Un homme, l'un de ceux qui dirigent cette expédition dangereuse, tourne son visage plein de balafres vers le jeunot avant de lui répondre:

- Par la magie.

Puis il s'avance vers le roncier et ordonne que chacun reprenne sa place.

- Je ne vous rappel pas que l'homme qui va sortir de ce tas de branches est très dangereux, dit la femme aux yeux blancs.

Les huit personnes vêtues de longues toges blanches les couvrants intégralement, prennent place à intervalles réguliers en encerclant l'amas d'épines. Il n'y a pas un bruit dans la caverne froide et humide, hormis celui de l'eau qui goutte ici et là en résonnant dans l'immensité du lieu.
Tandis que chacun se tient droit comme un i, prêt à attaquer si besoin, le chef du groupe s'avance encore un peu et saisit la plante devenue dure comme la pierre. Il prend son temps, fait en sorte de se couper avec une épine et d'y laisser une perle de sang rouler le long de la branche, puis prononce à voix haute et claire « aspera more es ».
Une lumière jaillit de sa main, inonde le lieu à en éblouir ces camarades et laisse place à un roncier complètement pétrifié.
Évidemment cela surprend dans un premier temps les acolytes du balafré qui se demandent où est le résultat. Pas de roncier disparut, ou même en état de destruction, pas d'homme dangereux à perte de vue, rien.

- Restez bien sûr vos gardes, crie la femme sans cheveux, c'est maintenant que cela risque de devenir compliqué.

En effet, à bien y regarder, la pierre qui ronge le roncier commence à s'effriter par le haut. D'abord lentement, puis cela s'accélère jusqu'à libérer le corps d'un homme nu, entouré de vêtements, d'armes et de reliques en tous genres. Tous sans exception observe ce corps affaibli au milieu des décombres et relâchent leur attention petit à petit, malgré l'avertissement de la femme aux pupilles translucides. Hélas, il est trop tard, une tête tombe sur le sol et le sang gicle sur les parois scintillantes et parfaites de la caverne, puis une poitrine se déchire et un cœur palpitant ressort de celle-ci pour finir empalé sur un stalagmite. Un rire lugubre résonne dans ce lieu, mais pas de visage à mettre sur la créature mortelle. La panique saisit certains des hommes, qui tentent de s'échapper, mais la mort les rattrapes.

Cœur de ronces Où les histoires vivent. Découvrez maintenant