Souvenir

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[OrelFeu, Neksan]


Le soleil s'était levé doucement, laissant sa pâle lueur se glisser au travers des rideaux de l'appartement. Le matin était déjà là, comme chaque jour, il arrivait trop vite. Mais ce matin, ils étaient éveillés. Confortablement installés dans le lit du parisien, les deux jeunes hommes profitaient d'un moment de calme pour s'autoriser un peu de tendresse. Leur carrière respective ne leur laissant que très peu de temps pour profiter l'un de l'autre, chaque petite matinée de dimanche était l'occasion parfaite pour s'octroyer une petite pause de douceur. L'un contre l'autre, les deux rappeurs se contentaient de discuter calmement en profitant de quelques caresses.

– Dis, tu te souviens de comment tout a commencé ?

Cette question venait de réveiller un certain intérêt ainsi que de vieux souvenirs. Désormais, tout paraissait si loin. Et pourtant. Cela ne faisait pas si longtemps que tout avait réellement commencé. Quelques années tout au plus. Mais en y réfléchissant encore peu réveillé, tout semblait brumeux et lointain. Cependant, il se souvenait tout de même de son sourire. Son rire. Son doux visage l'observant silencieusement, le regard encore timide. Ce souvenir lui arracha un léger rire. Les choses avaient bien changé depuis.

– Je me souviens. Tu paraissais si doux à l'époque, Orel.

Le dit Orel répondit par un coup de coude, visiblement peu d'accord avec ces propos. Et pourtant dieu sait qu'ils étaient véridiques. Au début, le jeune normand semblait intimidé. Il n'osait pas venir vers l'autre, l'observant de loin avec insistance. Le parisien s'était laissé apprivoiser par cette image si douce et vertueuse, qui très vite s'était déchiré entre ses doigts pour laisser place à un terrible démon du vice. Si certains auraient sans doute pris la fuite, le plus jeune devait avouer qu'il s'était laissé séduire à nouveau. La vicieuse attitude de son nouvel amant avait suffit à le conquérir ce soir là, si bien qu'il avait joué des pieds et des mains pour le revoir. Juste par curiosité.

– Vas-y, raconte pour voir si on a la même version.

– Orel, on l'a vécu ensemble, non ?

– Pas avec les mêmes yeux.

– Très bien.

Ken avait capitulé devant le sourire angélique de son désormais amant. Encore aujourd'hui, il réussissait toujours à l'amadouer avec ce genre de futilité niaise. Pourtant, le parisien luttait. Mais comment lutter face à une merveille pareille ? Plusieurs fois, il avait retourné la question dans tous les sens sans jamais parvenir à trouver une réponse suffisante. Il ne disposait pas des moyens suffisants pour ne plus se laisser attendrir.

– La première fois, c'était après notre concert. En toute amitié, je t'avais proposé d'aller boire un verre histoire de pouvoir passer un peu de temps avec un vieux pote. La soirée avait filé à une vitesse incroyable et on s'était retrouvé à errer dans les rues, complètement déchirés. Ce soir là, tu n'arrêtais pas de me regarder. Et moi, comme un con, j'ai trouvé ça mignon. Voilà. Magnifique, n'est-ce pas ?

Le normand se redressa doucement, un fin sourire accroché au visage. Il n'avait que peu de souvenirs de cette soirée à cause de l'alcool. Cependant, c'est ce soir là qu'il avait remarqué la grande beauté de son partenaire de scène. Du moins, ce soir là, il s'était senti particulièrement réceptif à cette étrange beauté. Un peu trop peut-être. Cette sensation mystique et inconnue lui paraissait alors dangereuse.

Il est vrai que le rappeur d'Alençon avait peiné à détacher son regard du jeune homme. Il n'avait cessé de se perdre dans son regard, essayant de capturer chacun de ses sourires. Les ravages de l'alcool lui semblaient démesurés et il se jura après ça qu'il arrêterait de boire en sa présence. C'était sans compter sur leur seconde entrevue, où sans une goutte d'alcool dans son sang, il se sentait à nouveau étrange. Comme si de ce corps si admirable émanait une terrible et incontrôlable attraction. Sobre, il avait osé poser le regard sur ses lèvres avec envie. De nouveau, le normand se sentait pris au piège, comme dépassé par une sensation bien plus intense que ce qu'il avait pu connaître. Ils étaient alors dans un studio pour enregistrer leur morceau et son corps entier le suppliait de se rapprocher. Juste un peu. Un tout petit peu.
Lorsqu'il se rendit compte que l'alcool n'était qu'une vaste excuse fumeuse, Aurélien avait d'abord eu peur. C'était si étrange, bizarre. Jamais il n'avait imaginé qu'un jour il sentirait son troisième bras se dresser à la pensée d'un corps masculin. Et pourtant. Fuyant dans un premier temps cette idée effrayante, il avait tout fait pour se rassurer quitte à se mentir cruellement.

One ShotOù les histoires vivent. Découvrez maintenant