numéro cinq

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-J'ai besoin d'aller fumer, je déclare en me levant.

On est devant ma maison, moi une clope à la main, lui m'observant.

-T'as dit que tu avais besoin, dit Oscar en insistant sur le dernier mot.

J'hoche simplement la tête ne sachant pas quoi dire.

-Et si t'arrêtais de fumer pendant une semaine, me défie-t-il.

Je tourne vivement la tête vers lui en rigolant.

-Et qu'est-ce que j'y gagne ?

-Le droit de m'imposer un autre truc en échange.

Je réfléchis, je pèse les pours et les contres.

-D'accord, ça va être amusant.

Je réfléchis à la chose que je dois lui imposer. Il faut que je trouve un moyen de lui faire regretter ma semaine d'abstinence. J'en conclus que la meilleure solution est de voir les dégâts et de me supporter le plus de temps possible. Je vais être exécrable durant toute la semaine.

-Ta punition est de passer cette même semaine avec moi.

Il fronce les sourcils, ne comprenant pas où est le piège.

-Je vais être insupportable donc le fait que je ne fume pas va être encore plus chiant pour toi que pour moi.

Il me regarde en secouant la tête, une sourire aux lèvres.

-On verra bien ça, Cass.

Je n'avais pas pris en compte un petit détail : il va dormir chez moi pendant toute une semaine.

Il a l'air de penser à la même chose que moi puisqu'il se met à rire aux éclats en me disant que je n'ai rien à dire puisque c'est ma faute.

-Ducoup... Je dois passer chez moi chercher des affaires.

-Tes parents vont être d'accord, demandé-je, étonnée.

-Je suis majeur, je fais ce que je veux, dit-il le plus simplement du monde.

Le dîner dure depuis déjà 10 minutes sans que personne n'ait dit un seul mot. C'est assez embarrassant.

-Et... Vous êtes ensemble depuis combien de temps, se lance ma mère.

Je manque de m'étouffer avec mon riz alors qu'Oscar prend un malin plaisir à profiter de la situation.

-Quelques se...

-On n'est pas ensemble, Maman.

Je l'ai coupé avant qu'il n'ait eu le temps de dire des conneries.

Arrivés dans ma chambre, ce petit con à l'audace de me confisquer mon paquet de tabac.

-Je vais vraiment pas tenir.

-Je vais m'assurer que si.

J'ignore pour quelle raison mais je trouve que ce qu'il vient de dire mignon.

On passe la soirée à rire, à se taquiner et il arrive à me faire oublier mon envie de fumer.

J'ai passé une semaine incroyable. Je commence à ressentir un sentiment qui n'est pas amical pour Oscar. Ça m'inquiète, je ne veux pas souffrir de l'amour.

De Oscar :

Ça me fait bizarre d'être sans toi :(

Je souris bêtement et pars prendre ma douche pour le faire mariner un peu.

Il m'a renvoyé un message.

De Oscar :

Tu ne peux plus me la faire à moi, je sais qu'à cette heure là t'es dans ton lit entrain d'écouter de la musique donc tu as très bien vu mon message. Je sais aussi que tu es partie faire autre chose pour t'empêcher de me répondre.

J'hallucine. Maintenant qu'on a vécu une semaine ensemble il me connait beaucoup trop.

À Oscar :

Et pourquoi je ne te répondrais pas, Monsieur le génie ?

2 minutes. 7 minutes. 14 minutes.

Vibration. Bonheur.

De Oscar :

Pour exactement la même raison que moi à l'instant : me faire croire que tu es indifférente à moi

À Oscar :

Prends pas trop tes rêves pour des réalités, bébé ❤

De Oscar :

Arrête de faire genre, t'es folle amoureuse de moi, chérie ;)

Je prends un malin plaisir à ignorer son message pour toujours.

J'attends d'être au lycée avec mes amis pour fumer ma première cigarette depuis une semaine.

Je la roule, l'apporte à mes lèvres et l'allume.

La nicotine me pique la gorge, la fumée envahit mes poumons dans lesquels je la laisse un long moment, profitant de cette sensation au maximum.

Tous mes amis sont tournés vers moi, en souriant.

-Alors, tu kiffes ?

-Je kiffe ma race, ouais !

Rire général.

Un pied exerce une pression à l'arrière de mon genou, me faisant perdre l'équilibre. Heureusement que ce débile d'Oscar me retient car sans ça, je me serais probablement éclatée au sol comme une merde.

-Tu m'avais pas manqué, gros lourdingue.

Il me vole un baiser sur la joue.

-Je t'aime aussi, rit-il.

En rentrant chez moi, je me mets derrière le piano à queue que mon père avait hérité de sa mère et Oli s'assied sur la chaise qu'il vient d'amener à mes côtés.

Je me mets à jouer la mélodie de Riptide par Van Joyce et on commence tous les deux à chanter en se souriant comme des amoureux très niais.

Mon meilleur ami a eu l'excellente idée de passer chez lui pour récupérer la guitare dont il gratte à présent les cordes dans les accords de Wonderwall d'Oasis. Ce morceau signifie tellement pour notre amitié. Il nous relie d'une manière inexplicable.

C'est en voyant Oli, qui est comme mon frère, chanter à gorge déployée et gratter avec force ses cordes que je me dis que cet homme est littéralement toute ma vie entière.

Sans lui, je suis réduite à l'état de poussière.

-Si dans dix ans y'a aucune connasse qui t'a épousé, c'est moi qui le fait.

Il me sourit de toutes ses dents en se laissant tomber en arrière, sur mon lit.

-Alors j'espère qu'une connasse m'épousera parce que je veux pas passer le reste de ma vie à devoir te supporter.

Je lui lève mon majeur bien haut avec un immense sourire.

La fille qui crééait les nuagesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant