et voici le sept

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Ses yeux profonds paraissent plus noirs que jamais lorsqu'il se relève du corps en sang de mon agresseur.

Il tourne vivement la tête dans toutes les directions, probablement à ma recherche.

Quand il trouve mon regard vide, il s'avance rapidement vers moi.

Il cherche ses mots, hésite.

-Je... Je suis désolé.

Mes yeux se lèvent vers les siens.

-Pourquoi tu es désolé, au juste ?

Il ne répond pas tout de suite, se passant la main dans les cheveux ébouriffés.

-Pour ne pas l'avoir tué.

Ses mots résonnent en moi, tournent dans ma tête encore et encore.

Je lis une réelle culpabilité dans son regard. Regrette-t-il vraiment de ne pas l'avoir blessé encore plus ou simplement de ne pas avoir intervenu plus tôt ?

-Ça aurait servi à quoi ? Il faut qu'il vive avec sa connerie.

Son regard sur moi est intense. Trop intense.

-Comment fais-tu pour être aussi forte ?

Encore une fois, les mots qui sortent de ses lèvres tremblantes d'adrénaline me font l'effet d'un coup de marteau dans le cœur.

Suis-je aussi forte que ce qu'il en dit ?

Je baisse les yeux et regarde mes chaussures.

Il prend mon menton entre son index et son pouce pour me forcer à planter mon regard dans le sien.

-Arrête de douter, Cass. Tu es la femme la plus forte que je connaisse.

A-t-il lu dans mes pensées ? J'ai l'impression qu'à présent mes doutes et mes douleurs lui appartiennent comme si il ressentait mon mal-être.

Oli arrive vers nous en courant. Oscar et lui parlent sans que je puisse entendre les mots qu'ils s'échangent. Mon meilleur ami tourne la tête vers moi et m'attire dans ses bras.

Il ne dit rien. Non, à la place il me communique tout l'amour qu'il est capable de donner dans cette étreinte forte en émotions.

-Comment ça s'est passé, me demande Oli dès que je sors du commissariat.

J'hausse les épaules en soupirant.

-Comme quand tu vas porter plainte pour agression sexuelle dans un commissariat rempli d'hommes machistes qui te font comprendre que t'exagères le truc.

Celui que je considère comme mon propre frère se met dans une colère noire et se dirige à l'intérieur de l'établissement, les poings tellement serrés qu'il en a les phalanges blanches, dépourvues de sang.

Je le retiens par le bras, l'empêchant de faire quelque chose qu'il pourrait amèrement regretter.

Je secoue simplement la tête et nous rentrons chez moi.

Nous sommes allongés sur mon lit, les yeux tournés vers le plafond rempli d'affiches et posters quelconques. Aucun de nous ne parle depuis plusieurs longues minutes jusqu'à ce qu'Oli se décide à prendre la parole.

-J'aurais du être là. Si j'avais...

-Oli, le coupé-je. Avec des "Si" on referait le monde, ok ? Ce qui est arrivé est arrivé donc ça ne sert strictement à rien de regretter parce que regretter c'est souffrir deux fois.

Il semble réfléchir à mes paroles. Il en tire je-ne-sais quelle conclusion puisqu'il me prend dans ses bras en m'embrassant partout, me valant un rire éclatant.

Même dans les pires moments, Oli sait toujours me remonter le moral, c'est pourquoi il est si important pour moi.

-Qu'est-ce que je ferais sans toi ?

Il rit avant de déclarer :

-Tu serais sûrement morte.

On rit tous les deux parce qu'on sait qu'il n'a pas forcément tord.

Mon portable vibre à mes côtés, me signalant que quelqu'un cherche à me joindre.

C'est le prénom d'Isaak qui s'affiche sur l'écran.

-Cass !! Devine qui passe en concert chez nous le 30 Novembre !

-Euh... J'en sais rien

-Naaman, meuf ! Faut absolument qu'on prenne nos places !

Je saute sur place tant je suis contente de ce que vient de m'apprendre le seul ami avec lequel je peux écouter du reggae sans relâche.

Oli insiste pour prendre lui aussi sa place et en parle à Alya, Martin et Oscar.

Mes amis sont excités à l'idée d'aller à un concert tous ensemble.

Conclusion : tout mon groupe d'amis et moi serons au concert d'un de mes artistes préférés dans moins d'un mois.

Je suis contente qu'ils aient voulu venir avec Isaak et moi même si ils n'écoutent pas forcément ce style de musique.

Je sais que ce genre de souvenirs partagés avec des personnes précieuses de s'oublie pas de si vite.

Je suis affalée sur ma table quand Isaak me bouscule à l'aide de son coude. Le cours de littérature ne semble pas le passionner non plus car je comprends à son regard qu'une idée vient de germer dans sa tête d'idiot.

Un léger rire m'échappe, me valant le regard foudroyant de Madame Clerc.

-À quoi tu penses ?

Il sourit à s'en fracturer la mâchoire.

-Ma grand-mère vient de m'envoyer un message pour me prévenir que sa maison de campagne est libre pour le week-end et que j'ai le droit d'y inviter "quelques amis".

Les guillemets qu'il mime avec ses doigts m'arrache encore une fois un rire et encore une fois, Madame Clerc me réprimande sur mon volume sonore.

-T'es libre ce week-end mon amour, demande-t-il d'une voix qui se veut sexy, accompagné d'un clin d'œil.

Cette fois-ci, en revanche, on se fait tous les deux virer du cours passionnant de notre professeur de littérature anglaise.

La fille qui crééait les nuagesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant