10-Les avoeux (2)

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- Combien je vous dois ?

- Rien du tout ma petite. Tu as l'air vraiment malheureuse, et ce jeune homme aussi. Alors je sais pas ce que tu comptes faire, mais je te souhaite bonne chance. Si tu as besoin pour rentrer n'hésite pas, sauve toi aller.

La larme à l'œil, je descends du van et accours sous le perron. Tout est si calme. Je regarde mon téléphone, Neymar m'a appelé cinq fois. Mon coeur se comprime dans ma
poitrine, il doit tellement être mal. La porte d'entrée nécessite un badge, et vu l'heure je n'ose pas sonner chez ses voisins. Je vais devoir sonner chez lui... Après quelques secondes de réflexion je m'exécute enfin, la boule au ventre. Je suis bouffée par le stress et des tremblements se manifestent au fur et à mesure que j'avance vers l'ascenseur. C'est pas possible d'être aussi émotive putain ! Tout est de ma faute, à moi d'assumer maintenant. J'aurais du lui dire au restaurant, l'empêcher de s'en aller, lui expliquer. Mais au lieu de ça je l'ai regardé bêtement, incapable d'émettre le moindre son, la moindre note qui le sauverait du doute.

J'appuie sur le 3, et attends.

Lorsque j'arrive dans ce couloir, seul le bruit de mes bottines sur la moquette résonne. Je marche lentement, et plus j'avance plus j'ai l'impression que je n'y arriverai pas.

Me voilà devant la porte.

J'inspire, je souffle, j'inspire, je souffle, j'y suis.

Allez Chloé, c'est maintenant ou jamais.

Je sonne.

Le cliquetis de la serrure se fait entendre, la porte s'ouvre alors.

- Chloé ?

Il est complètement figé. Je ne sais pas trop si c'est de la colère ou de l'agacement que je lis sur son visage, mais il n'est plus le même homme que chez Margot.

- Laisse-moi entrer.

Ma voix est petite, presque inaudible tant ma gorge est nouée. Il me regarde, se renfrogne puis se détend. Des yeux maintenant marrons se posent sur la guitare accrochée à mon dos.

- C'est du harcèlement là.

- Rien qu'une minute. Je t'en prie Neymar.

- Je ne suis pas seul.

- Très bien, je vais jouer là ! Au diable tes voisins.

La colère m'envahie, je me défais de l'étui nerveusement.

- Arrête arrête.. Entre.

J'entre alors. Il ne dit pas un mot, scrutant mes faits et gestes alors que je me mets en place. J'ai appris la guitare il y a quelques années seulement, mais je n'ai joué que rarement devant mes proches. Ils m'ont toujours incité à me publier sur les réseaux, pourtant le manque de confiance fait que j'ai toujours été incapable de me lancer. Je crois que je ne réalise pas bien ce que je suis en train de faire. Lorsque nous nous sommes rencontrés, Neymar et moi, nous nous sommes souvent envoyé des musiques. Mais celle-ci était notre préférée. Combien de fois nous sommes nous endormis au téléphone en l'écoutant, elle représentait tellement de choses, peut-être même des sentiments enfouis quelque part à l'intérieur de nous. Bien que mon accent portugais soit désastreux (même si lui prétend le contraire chaque fois que je m'en plains), je m'engage dans les premières notes, concentrée pour ne pas dérailler, sans trop prêter attention aux larmes qui longent déjà mes prunelles.

Je ferme les yeux et me transporte loin d'ici, son visage ancré dans ma tête, nos conversations virevoltant contre les parois de mon crâne en effusion.

Eu quero te falar, o que se passa aqui
Eu quero retornar e se você deixar eu juro que....

J'ouvre enfin mes paupières, osant l'affronter, souriant bêtement, tandis qu'il m'observe ahuri. Ses sourcils sont renfrognés, il ne bouge pas, mais ses yeux changent de couleur et j'ai l'impression qu'il s'approche du but.

Allez Neymar je t'en prie, réfléchis. J'y arriverai pas toute seule, je sais que tu es intelligent, je sais que tu peux faire le rapprochement.

Só que essa solução pode ser bem melhor
Pra mim do que pra você...

Une larme s'écrase sur sa joue, il l'essuie rapidement et serre la mâchoire comme pour contenir ses émotions alors que moi, je suis déjà en train d'étouffer. Les dernières notes sortent de ma poitrine en un souffle et lorsque je termine, je m'effondre littéralement face à un homme complètement sonné. Et s'il n'a pas comprit, je prends mon téléphone et fais sonner le sien. Il regarde l'objet comme s'il allait exploser, puis pose ses iris sur moi, faisant l'aller retour deux fois.

- C'est toi.. Souffle-t-il enfin entre ses dents.

Il pose ses mains sur son visage et s'y enfonce. Sa respiration se fait plus rapide, par saccades.

- Je suis désolée.

- Tu m'as pris pour un con pendant tout ce temps...

- Je n'ai jamais voulu ça, je te jure, jamais. Laisse moi t'expliquer..

Il se lève, les paumes en l'air comme pour se protéger de toutes mes paroles aux allures de suppliques. De toute évidence, il ne me croit pas.

- Ca suffit! Pourquoi tu ne m'as rien dit ?

- Neymar, c'est allé tellement vite.. Et je te rappelle que TU es venu me voir au restaurant, que TU as cherché à me retrouver après l'entrainement alors que tu parlais déjà avec moi... Si ça avait été une autre ? On en serait où hein ?!

J'ai insufflé de la colère dans ma dernière phrase.

- Tu ne voulais même pas me donner ton prénom, putain Chloé c'est pas vrai !

- Comment aurais-tu voulu que je te le donne alors que tu m'avais déjà rencontré ?!

- Tu aurais du me le dire, au stade, tu aurais du me dire que c'était toi ! J'ai du mal à croire que tu es la fille avec laquelle je parle depuis tout ce temps.

J'ai l'impression de percevoir de la déception dans sa voix. Je voudrais tellement répliquer que j'ouvre la bouche de manière impulsive, mais me ressaisis à temps. Évidemment que je n'ai rien à dire, bien sûr. Je reste dans le silence, écoutant le bruit des traîtresses frappant mes joues avec force. C'est trop tard maintenant, je l'ai perdu. Je n'aurais jamais du lui dire la vérité.

Je n'aurais jamais dû lui mentir, en réalité.

- C'est pas comme ça que tu m'imaginais ? Je suis là même, je t'assure. Je n'ai jamais joué la comédie avec toi, je n'ai jamais rien changé..

- Chloé c'est vraiment difficile à digérer, je suis vraiment en colère. Si tu avais si peu confiance en moi alors fallait arrêter cette relation tout de suite.

- J'ai essayé.. Je renifle, mais c'était trop dur, tu ne m'as jamais laissé partir...

Nous sommes interrompus par des bruits de talons qui dévalent les escaliers se trouvant à l'entrée, je me retourne et vois une magnifique brunette que je reconnais tout de suite, Bruna Marquezine. La situation s'inverse alors, hébétée je fusille le noiraud du regard et essuie mes larmes d'un revers de la main avant de me lever.

- Qui a prit l'autre pour un con ?

Je prends mes affaires.

- Chloé...

- Fous moi la paix.

Bruna s'approche minutieusement, qu'est-ce qu'elle est belle, je me sens tellement ridicule à côté. Elle me fait part d'un pauvre sourire que je lui rends difficilement, à vrai dire j'ai envie de vomir. Sans me retourner je sors de son appartement en appelant Gérard pour qu'il vienne me chercher, cette fois-ci, c'est bel et bien terminé.

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Après le soleil, la pluie... | NeymarOù les histoires vivent. Découvrez maintenant