Envol - Cartographie des Âmes | Tome 1 |

Duo Final: Wild is the wind

Je me préparais à toute allure, fou de joie à l'idée de revoir mon âme sœur le soir-même. C'était bien lui, j'en étais sûr maintenant. Il avait l'air un peu incrédule, mais ça n'était qu'une question de temps avant qu'il ne réalise ce qui était en train de se passer. Mon âme sœur, depuis notre première naissance, nous ne nous étions jamais quittés. Et cette fois, l'univers nous avait fait un inestimable cadeau, nous avions pu nous souvenir de la dernière vie passée ensemble.

Ma loyauté envers toi...

J'arrivais à la soirée, le cœur rempli d'espoir. Je me sentais plein, vivant comme jamais ça ne m'était arrivé. L'idée d'avoir retrouvé ce lien surnaturel d'une évidence absolue m'emplissait le cœur de joie. Je voulais que jamais cela ne s'arrête.

... Elle sera sans limite...

Je me frayais un chemin parmi la foule pour essayer de retrouver Ethan. On aurait dit que la fac entière était invitée à cette soirée. Au bout de dix minutes de recherche, je le vis assis à côté d'une fille sur un canapé. J'avais oublié que nous avions tous deux eu des vies avant de se retrouver et lançais un « salut » assez méfiant.

...Par-delà la mort, je tiendrai mes promesses...

— Salut, me répondit la fille avec un grand sourire.

—Ezéquiel, tu es arrivé ! Je te présente Agnès, une de mes meilleures amies !

— Je vais vous laisser tranquille ! Ethan, si tu me cherches, je serai à l'étage avec les autres.

— Tu veux boire quelque chose ?

— Une bière blonde, une allemande de préférence.

— Ok, je reviens tout de suite.

Mon attente prolongée, assis seul sur le canapé, me poussait à la réflexion. Pourquoi étais-je si froid ? Je suppose qu'il me faisait un peu peur, ce qui m'incitait à me terrer dans mes habitudes misanthropes.

... Et dans toutes les vies...

Ethan revint, beau comme Bacchus, tenant à la main l'objet qui, je l'espérais, allait me permettre de faire un pas vers lui. A la moitié de nos bières, nous commencions enfin à discuter avec entrain, à se raconter nos vies. Nous riions comme des fous de nos aventures personnelles. Il me racontait ses histoires, les gens qu'il avait rencontré, ceux qu'il avait cru aimer, et de tout cela ne ressortait qu'une seule vérité, un seul constat : jusqu'à présent, nous nous étions tous les deux sentis incomplets.

...A travers tous les mondes...

Les bières s'enchaînaient, la musique devenait plus forte, les gens haussaient la voix, et nous étions contraints de nous rapprocher pour nous entendre. Loin d'être gêné, je profitais de chaque instant de cette douce promiscuité. Son souffle sur ma peau me faisait frémir.

Le souffle de Gon...

— Tu veux danser ?

— Oui, carrément !

...Dans les innombrables univers que nous pourrions traverser...

Je m'adonnais rarement à ce genre d'activité, et cela promettait d'être ridicule. Comment parvenait-il à me sortir si facilement de mes zones de confort ? Avec lui, je me foutais du regard des autres, je n'avais peur de rien.

En fait, il dansait à peu près aussi mal que moi, mais semblait ne penser qu'à l'amusement que ça lui procurait. Nous gigotions face à face, hilares. Puis je commençais à me lâcher, à profiter de mon corps qui suivait naturellement les rythmes de la musique. Je me sentais en connexion avec les autres, avec le monde

Nous dansions à l'unisson, tous ensemble, et dès lors, rien d'autre n'avait d'importance que la musique, le rythme. Toutes les différences, toutes les singularités étaient mises de côté et notre animalité, notre bestialité ressortait dans une ode à la liberté, dépossédée de tout jugement.

...Mon amour pour toi restera indéfectible...

Légèrement essoufflés, mais complètement déchaînés, nous dansions, tout sourire, en nous regardant dans les yeux. Je m'amusais comme un fou, je ne me souvenais pas avoir été aussi heureux. Le rythme plus lent de la chanson poussait à se rapprocher légèrement. Les gens commençaient à quitter la piste. Ethan et moi restions sur place, la musique plus calme ne nous dérangeant pas le moins du monde. Nous nous rapprochions encore. La soirée commençait à prendre une nouvelle tournure. Le regard d'Ethan avait changé, il était plus sauvage.

Love me... Say you do. Let me fly away with you...

La musique était forte, mais j'en entendais une autre. Perdu dans ses yeux, je me sentais loin, ailleurs.

For my love is like the wind

Je me rapprochais encore, jusqu'à être presque nez à nez avec lui. Mes mains se pressèrent autour de sa taille tandis qu'il passait les siennes enlaçaient mon cou. Nos déhanchés augmentaient peu à peu.

Give me more than one caress

J'étais complètement grisé du contact de sa peau contre la mienne.

You touch me...

J'avais l'impression d'être seul au monde avec lui, complètement perdu dans ses yeux.

You kiss me...

Son souffle était chaud contre ma peau, ses mains caressaient ma nuque, agrippaient mes cheveux, nous poussaient à nous rapprocher de plus en plus l'un de l'autre.

With your kiss my life begin...

Les lèvres de Gon...

... Je serai toujours près de toi...

Elles étaient légèrement salées, d'une douceur absolue. Une larme roula sur ma joue. Je rapprochais le corps de Gon du mien, le serrant dans mes bras. Sa présence, son corps me rassuraient terriblement.

Le temps d'un instant, j'étais à nouveau l'enfant de mes rêves. Je sentais l'air iodé de la mer, les grains de sable contre ma peau. Je rêvais d'une autre vie avec lui, d'un autre temps, d'un autre monde.

J'étais tout.

J'étais rien.

Le monde entier.

Le néant.

Ailleurs.

Un ailleurs avec toi.

Toutes nos vies.

Dans un seul baiser.

Wild is the wind...

Je te veux. Juste pour moi. Pour toujours.

Instant d'éternité perdu à jamais dans les méandres du temps.

Gon... Gon, je t'aime...

Moi aussi, Kirua, moi aussi, je t'aime.