Cet été-là

JARED

Merde. Moi qui pensait pouvoir partir sans problème de cette prison, il a fallu que la mini garce décide de jouer la rebelle et sorte elle aussi. Apparemment je me suis fais une mauvaise impression sur elle. Elle n'est pas si différente de moi finalement. Ma première peur ce soir était de croiser Allison sur la plage mais c'est de sa petite sœur dont je dois me méfier à présent. Elle est plus redoutable que ce que je pensais. Elle n'est plus du tout la Eva qui pouvait rester des heures au bord de la plage à lire un livre au nombre incalculable de page. Désormais, elle préfère sortir par la fenêtre de sa chambre pour aller faire n'importe quoi avec je ne sais qui. Si seulement ses parents savaient, ils feraient sûrement un arrêt cardiaque et l'enverraient tout droit au pensionnat sans attendre la moindre explication.

Lorsque je me suis retrouvé nez a nez avec elle, j'ai d'abord crû a une hallucination. Je ne m'attendais pas du tout à ce qu'elle fasse le mur pour s'enfuir en pleine nuit. Ce n'est pas du tout son genre. Quand on la voit, on s'imagine que c'est une fille sage et sans problème et non le contraire. Avec ses longues cheveux blonds et ce visage de poupée, elle donne l'impression d'être un véritable ange tombé du ciel. Elle m'intrigue de plus en plus. De quoi est-elle capable ? Je ne réalise toujours pas ce qui vient de se passer dans ce jardin. Je demeure interloqué pendant de longues minutes, caché derrière la maison loin d'elle et de son regard inquisiteur.

Néanmoins je ne m'attarde pas et pars de mon côté avant qu'un de nos parents ne se réveille et s'aperçoive que nous ne sommes plus là, tranquillement couché dans notre lit. Autant profiter de la soirée avant de nous faire prendre sur le fait. Je suis un habitué de ce genre de plan en douce. Je suis allé plus d'une dizaine de fois sur cette plage pour boire et m'amuser avec mes amis, parfois même jusqu'au petit matin. Je connais donc la route sur le bout des doigts, je pourrais presque m'y rendre les yeux bandés.

Je longe les buissons pour emprunter le chemin longeant la plage. Hors de question d'y aller avec elle, je préfère faire mon chemin seul. J'essaie tant bien que mal de ne pas mettre du sable dans mes chaussures mais en vain. De petits grains s'entassent dans mes baskets. Cette sensation est vraiment désagréable à tel point que l'idée de faire chemin avec elle me parait de plus en plus abordable. Je préfère marcher sur le même trottoirs qu'elle, même si ça ne me réjouis pas, plutôt que de m'engouffrer dans le sable comme un idiot. A la première occasion, j'entre dans un jardin que je ne connais pas et avance discrètement jusqu'à l'immense demeure bleu pour rejoindre la route. Sans surprise, je l'aperçois sur le trottoirs en face de moi.

Ses sourcils se froncent et les muscles de son visage se crispent lorsqu'elle me voit marcher droit vers elle. Elle ne sait plus où se mettre et semble décontenancé par la situation et ça m'amuse de la voir se décomposer face à moi. Je suis sûr de l'intimidé et compte bien en jouer. C'est une attitude quelque peu sadique mais la tentation est beaucoup trop forte et prend le dessus sur tout le reste.

-Tu me suis ? s'écrit-elle exaspérée.

-Non mais le sable dans mes nouvelles chaussures ça ne me plaît pas trop.

Elle soupire avant de reprendre sa marche et de continuer son chemin vers la plage.

-Ne me dit pas que ça te déplaît de faire le chemin avec moi, je la taquine en insistant sur le ton que prend ma voix afin qu'elle comprenne l'ironie de ma phrase.

Elle adopte le même comportement qu'un peu plus tôt à la piscine et ne me répond pas ce qui a le don de me prendre la tête. J'ai horreur de cette manie de faire comme si je n'étais pas là, comme si j'étais invisible à ses yeux.

-Allez Eva, ne fais pas la tête. Je sais que tu m'adores et que tu rêves de ce moment tout les soirs dans ton lit.

-Oui bien sûre mais ce n'est pas un rêve, c'est un cauchemar.