Il y eut exactement deux moments où chacun de nos protagonistes sentirent leur cœur plonger au fond de leurs pieds. Vous savez, ce moment où vous réalisez que vous avez commis une maladresse irréparable dont la conséquence inéluctable changera le cours de votre vie à jamais ? Oui, voilà, ce genre de moment-là.
Le premier eut lieu lorsque Ove traina Tina, stupéfaite, dans le bugalow treize et qu'ils découvrirent que le dit-bungalow, loin d'être tapissée de sang, était nettoyé à la perfection et sentait même l'eau de javel.
— Putain, commenta Rapp.
— C'est anormal, déclara la médecin-légiste en prenant une immense inspiration.
Ils s'en furent dans le bungalow de cette dernière, très inquiets car la situation prenait tout sauf le tournant attendu. Si l'on voulait faire tomber Ove Sven Rapp pour meurtre, qui avait bien pu liquider toute preuve incriminante dans sa chambre ?!
Le second moment dont nous parlions plus haut fut cet instant précis où Tina, qui avait une envie pressante « due au stress », comme elle le cracha à la tête de son compagnon d'infortune, découvrit une mare de sang encore tiède et trois douilles chaudes dans la salle de bains.
— Ragnar... RAGNAR !
— Arrête de m'appeler comme ça et... Oh, merde... oh merde de merde... oh putain...
— Lorsque tu auras fini d'aligner les insanités, tu penses que tu vas trouver une solution à ce nouveau problème ?
— Oui, faut se barrer, en vitesse.
— Tu déconnes ?!
— Je déconne pas. Tu viens d'te faire piéger. C'était pas moi, le bouc émissaire, c'était toi.
— Je n'ai rien à voir avec le moindre cartel, moi ! siffla Tina en analysant mentalement la scène.
— T'as une minute pour ramasser des affaires dans un sac à dos. Grouille.
— Je vais m'expliquer avec la police, tout ira...
— T'as vu la tronche du mec qui est venu cogner à la porte ? La police est dedans.
Devant une grimace de doute de la jeune femme, Ove gronda :
— J'ai bossé avec ces connards pendant deux semaines. C'est des pourris, ils se font payer à longueur de journée ! Je vois pas pourquoi dans notre situation ils f'raient une exception ! T'as trente secondes pour ramasser tes tampax et on décolle, Minimoï !
Tina faillit exploser, face à ce cocktail d'injures, mais elle réalisait avec écœurement que cet imbécile blond avait raison. Tandis qu'il récupérait le vanity bleu canard et le pistolet, elle remplissait un sac de randonnée avec le minimum vital.
— Dépêche ! Dix... neuf...
— C'est bon ! Qu'est-ce qu'on doit faire ? Aller à l'ambassade ?
— Ouais, c'est ça. Trop bonne idée. Y'a aucun flic autour des ambassades, c'est bien connu. Et puis le personnel est incorruptible. Ouaaaais...
— Que les choses soient claires, si je dois partir en cavale, je pars seule !
— C'est ça... prochains gros titres « On retrouve un tronc humain embroché sur le récif corallien de Rum Point ! Horreur absolue : il semblerait qu'il s'agisse d'un petit garçon ! »
— Un petit...
Ove lança un regard entendu à la poitrine de Tina, qui leva le poing, mais la porte du bungalow s'ouvrit soudainement. Les deux jeunes gens interrompirent leur dispute : c'était le policier chinois qui était venu recenser leur présence. Un drôle de sourire – mais était-ce un sourire ? – s'affichait sur ses traits marqués par l'âge et le soleil.
— On s'apprête à faire un petit tour ?
— Eh bien pour être très honnête...
Ove s'était approché de l'homme et, sans crier gare, le fit entrer dans la chambre pour percuter la tête du policier d'un coup de genou phénoménal, sous le cri de surprise de Tina.
— Mais t'es MALADE ! hurla-t-elle. Là, c'est sûr qu'on est bon pour la prison ! Pourquoi...
— Huuuum, ça sent bon la javeeeeel ! ironisa Ove en levant l'une des manches de l'homme, mis K.O.
Tina, déconfite, nota en effet les taches décolorées sur les manches du policier.
— Mais...
— Je ne sais pas ce qui se passe, mais faut pas rester là. Va à la marina, j'te r'joins là-bas.
Le visage de la jeune femme se fit soudain inquiet :
— Tu ne vas pas le...
— Tu m'prends pour qui ?! J'vais juste l'attacher. Décarre de là ! Je te rejoins, j'te dis !
Tina obéit, chose assez rare, et se rendit du pas le plus détendu possible à la marina du resort, un petit port d'attache protégé par un récif corallien naturel. La jetée en bois était bordée de gros yachts blancs aux noms plus pompeux que ceux de rois de France ou d'Angleterre. Le soleil se couchait, mais le ciel était dégagé et la mer calme. Les coques roulaient doucement sur elles-mêmes et les gréements grinçaient sous la brise. Malgré tout, Tina Aveterco tremblait. Elle avait froid. La peur lui mordait les entrailles aussi sûrement que les balles qui avaient mis fin à la vie du macchabée qui gisait dans le Tropicana.
— C'est la dernière fois que je me marie... marmonna-t-elle.
La grande silhouette du Suédois apparut sans qu'elle l'ait vu approcher. Il désigna du menton un yacht nommé Quigley IV et aida la jeune femme à aborder.
— On va voler un bateau ?! s'étrangla-t-elle.
— Non, on va réquisitionner un moyen de transport. Je suis toujours flic, j'te rappelle.
— C'est de la folie ! On doit...
Mais Ove avait eu tôt fait de trouver la clé du bateau – cachée en évidence sous la statue creuse d'un Achab à l'air agressif, près de la barre –, d'ôter les amarres et de démarrer le moteur.
— Quand je te le dirai, tu enlèveras les bouées de protection ! s'écria-t-il.
Il vit les yeux furieux de la jeune Française et ajouta :
— T'as qu'à t'dire que j'suis un pirate et que t'es ma prisonnière, comme ça t'as la conscience tranquille. Eh, tu m'appelleras « capitaine » quand j'te ferai l'amour !
Au moment où ils parvenaient à quitter la marina et où Tina, de plus en plus en colère, relevait les bouées de protection, un bruit sourd monta du pont inférieur – à la vérité une véritable suite de luxe, mais ni Ove ni Tina n'avaient eu le temps de faire le tour du propriétaire. Le Suédois, recouvrant son sérieux, fit signe à son mousse de prendre la barre et tira de son pantalon en jersey le pistolet automatique. Une silhouette émergea du sous-pont en levant les mains :
— Damn! C'est quoi ça ?! Une surprise partie ?!
Tina, le regard noir, grinça dans l'oreille de Ove :
— Maintenant tu as deux otages... T'es content capitaine ?
*
Deux... et plus si affinités ;-)
Bon, je m'amuse toujours, tout en gérant la sortie de Vampire Consultant (vous saviez que j'étais dans le top 50 d'Amazon Kindle depuis ce week-end ? Oui ? Bon ben c'était juste un rappel, parce que ça n'arrivera pas souvent !).
Voilà voilà, la suite arrive ! Merci encore pour toooooooooous vos commentaires XDD
Sea
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Le Suédois qui n'aimait pas l'été
ChickLitGet Away Tome 1 Ove Sven Rapp est flic. Ove Sven Rapp déteste l'été . Et cette petite idiote de Française qui vient de lui renverser de la glace à la fraise sur les pieds ne fait que confirmer cela. Ce qu'il ignore, à ce moment précis, c'est qu'un m...