La vie après la mort

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- Dis-moi, Hailey... Quel âge as-tu? demande Isabella en lui caressant la joue.

Jamais elle n'était douce avec quiconque, mais cette jeune fille... Cette jeune fille lui rappelait sa propre vie. En d'autres termes, Isabella se voit en Hailey.

- J'ai dix-sept ans, je ne suis même pas encore majeure, annonce Hailey, presque honteuse, en baissant le volume de sa voix.

La vieille dame hoche la tête comme si elle le savait depuis toujours.

- Je savais que tu ne faisais pas ton âge...

- Vous n'allez pas me chasser d'ici, hein?

- Non! Non, ne t'en fais pas. Après tout, Hailey a dix-huit ans, non? Et maintenant, je veux que tu oublies tout de Lena.

Plus facile à dire qu'à faire...

Parler d'elle-même comme si elle possédait deux identités différentes allait la rendre folle.

- Comment voulez-vous que je fasse cela? Je suis Lena! Je ne possède pas de prénom aussi stupide, je n'ai pas les cheveux presque blancs et mes parents ne m'ont jamais maltraités!

Isabella lui fait signe de baisser d'un ton - ce que fait Hailey en retenant les larmes qui hurlent pour s'échapper

- C'est plus simple que tu penses. Tes parents t'ont privés d'un des biens les plus précieux de l'humain: la liberté. Ce n'est certes pas une maltraitance physique, mais d'une certaine façon...

En voyant le drôle d'air sur le visage de l'adolescente, Isabella ne finit pas sa phrase. La jeune fille n'arrive tout simplement pas à comprendre que si elle perd autant les pédales, c'est à cause justement de ses parents. Comment peut-elle supporter ce monde si elle n'y a jamais vécu pleinement?

- Il te suffit de croire en toi. Commençons par ça.

Hailey hoche la tête maladroitement, mais confiante.

- Tu ne dois pas te dire: "je suis Lena, mais sous un autre nom". Tu dois te dire: "je suis Hailey". Dis comme ça, je comprends que ça puisse paraître beaucoup trop simple, mais tu comprendras assez vite et, tu verras, tu te sentiras beaucoup mieux lorsque tu accepteras qui tu es.

- Qui est Hailey, corrige la jeune fille.

- Non, Hailey. Qui tu es.

Hailey lève les yeux au ciel et hausse les épaules. 

- Je crois que je vais aller me coucher...

Isabella penche la tête sur le côté en fronçant les sourcils. 

- Je croyais que tu allais au moins te joindre à nous autour du feu.

Aussitôt, un flot de souvenirs la submergent. Elle se rappelle de grands yeux verts qui l'observent, reflétant les constellations dans le ciel. Elle se souvient d'une douce mélodie qui provoquait en elle une chaleur réconfortante. 

- Euh... Non. Je ne préfère pas...

Elle en veut toujours à Nathan de s'être mêlé ainsi de ses histoires. D'ailleurs, elle n'arrive toujours pas à comprendre pourquoi il a réagi ainsi. Oui, pour la protéger, mais pourquoi ressentait-il ce besoin?

Les yeux matures d'Isabella pétillent de malice. Elle semble comprendre quelque chose d'inexistant, interpréter quelque chose d'invisible.

- Viens ce soir et je te promets qu'on te laissera tranquille aussi longtemps que tu le souhaites, Hailey.

- C'est tout ce que je veux...

Hailey réfléchit un instant. Cela en vaut sûrement la peine et un bon moment autour du feu ne fera de mal à personne. Quelques minutes plus tard, ils se réunissent (excepté Chloé, le voyageur et la femme enceinte) autour du feu. Charles parle surtout avec Isabella et laisse Nathan et Hailey dans un silence imposant. Aucun des deux n'ose parler. Nathan ne semble même pas remarquer la présence de la jeune fille, perdu dans ses pensées, le regard concentré sur les flammes rougeoyantes du feu de camp. Après un long moment d'ennui, Hailey se racle la gorge et lui demande d'un air timide: